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08 mai 2007

L’appui d’Emploi-Québec aux jeunes entrepreneurs

Ce document a été réalisé pour le compte du CAJ par :
Recherche et rédaction :
Jean-François Venne

Introduction

Au Québec, comme ailleurs en Occident, l’entrepreneuriat et le travail autonome occupent un espace de plus en plus important [1]. En 2004, les 484 000 travailleurs autonomes (dont plus de six sur dix étaient sans employés) représentaient 13,2 % de l’ensemble des personnes en emploi au Québec [2]. Les jeunes de moins de 35 ans sont particulièrement susceptibles de se lancer dans l’entrepreneuriat sous une forme ou une autre. Les données les plus récentes indiquent que c’est dans ce groupe d’âge que l’on retrouvait, en 2004, la plus grande proportion d’individus prévoyant créer une entreprise, seuls ou avec d’autres personnes, au cours des trois années suivantes. Ainsi, 18,1 % des Québécois de 18 à 34 ans avaient l’intention de créer une entreprise pendant cette période, avec des pointes à près de 25 % dans des régions comme les Laurentides et Laval. Par comparaison, la proportion chutait à 9,7 % chez les personnes de 35 à 64 ans (Riverin et Jean, 2004).

Bien que cette intention ne se concrétise pas toujours, la tendance se confirme au regard des statistiques récentes sur la création réelle d’entreprises. En 2004, 34 % des nouvelles entreprises étaient le fait d’individus âgés de 18 à 24 ans (13,4 %) ou de 25 à 34 ans (20,6 %) (Riverin, 2004). L’étude de Riverin et Jean [3]indique, par ailleurs, qu’il y avait au Québec, en 2004, près de 90 000 jeunes de moins de 35 ans en démarrage d’entreprise, soit 5,3 % de leur groupe d’âge, avec des pointes à plus de 9 % dans les régions du Centre-du-Québec, des Laurentides et de Laval. Une fois de plus, cette proportion est supérieure à celle qui caractérise le groupe d’âge des 35 à 64 ans (4,7 %).
« Les PME sont la forme dominante d’organisation de l’entreprise dans les pays du monde entier, où elles représentent entre 95 % et 99 % de la population des entreprises » (OCDE, 2005, p. 16). La création de conditions propices à l’entrepreneuriat se révèle donc importante à plus d’un titre. Année après année, les rapports du Global Entrepreneurship Monitor [4] (GEM) corroborent le lien positif entre l’entrepreneuriat et le développement économique d’un État ou d’une région. En 2005, le rapport canadien du GEM décrivait ainsi l’impact de l’entrepreneuriat sur l’économie : « Parmi les avantages qui découlent de leurs activités, on peut mentionner la création d’emplois, l’accroissement de la production de biens et de services et l’amélioration des niveaux de compétence qui assurent une croissance soutenue de l’industrie » (Riverin, 2005). Réalité reconnue également par le gouvernement québécois dans le Plan d’action triennal 2004-2005-2006 du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse [5] : « Il est établi que les entrepreneurs et les entreprises qu’ils exploitent, notamment les petites et moyennes entreprises (PME), concourent de façon déterminante au développement et à la croissance économique de leur communauté et de leur région » (SAJ, 2004, p. 9). À cela on peut ajouter l’innovation et le développement de nouveaux secteurs de pointe, nécessairement soutenus par l’arrivée sur le marché d’entrepreneurs qui perçoivent, dans les nouvelles technologies ou les nouveaux procédés, des occasions d’affaires intéressantes.

L’importance de l’entrepreneuriat, en particulier chez les jeunes, est soulignée par l’OCDE : « Premièrement, les jeunes sont capables de créer des entreprises et de réussir. Deuxièmement, la création d’entreprise peut largement contribuer au dynamisme et à la croissance économique. Troisièmement, pour les deux raisons qui précèdent, les mesures tendant à promouvoir l’esprit d’entreprise au sein de la jeunesse doivent trouver leur place dans les politiques nationales, régionales et locales du marché du travail et de l’éducation » (OCDE, 2001, p. 13).

Au Québec, entre 2002 et 2004, la proportion de jeunes de moins de 35 ans ayant l’intention de créer une entreprise aurait augmenté de 80 %. Malgré cette croissance importante des intentions entrepreneuriales des jeunes Québécois, le gouvernement québécois reconnaît, dans le Plan d’action triennal du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse, que la situation de la création d’entreprises au Québec « demeure fragile » (SAJ, 2004, p. 10).

De plus, l’OCDE affirme que l’âge de l’entrepreneur a un impact sur la survie de son entreprise. Les jeunes entrepreneurs demeurent moins souvent en affaires que leurs aînés et « les taux de survie des entreprises appartenant aux entrepreneurs les plus jeunes (moins de 25 ans) ne représentent même pas la moitié de ceux des entreprises appartenant à des entrepreneurs âgés de 50 à 55 ans » (OCDE, 2002, p. 110).

Cela incite à questionner plusieurs aspects du soutien à l’entrepreneuriat offert au Québec, en particulier celui qui s’adresse aux jeunes entrepreneurs. Le mandat du CAJ étant ce qu’il est, la recherche à venir devra surtout s’attarder aux aspects relevant plus directement d’Emploi-Québec, notamment les mesures Jeunes volontaires et Soutien au travail autonome, ainsi que la formation en entreprise et la promotion de la carrière d’entrepreneur.

Une première inquiétude repose sur le constat que l’entrepreneuriat des jeunes demeure relativement plus faible au Québec que dans le reste du Canada. Ainsi, malgré une proportion équivalente de gens ayant l’intention de se lancer en affaires, il y a moins de nouvelles entreprises (moins de 42 mois) au Québec que dans le reste du Canada, et il continue d’y avoir moins de démarrage de nouvelles entreprises (GEM, 2004). La différence est surtout marquée chez les 25 à 34 ans, lesquels représentaient 31,6 % des propriétaires dirigeants d’entreprise en 2004 au Canada, et seulement 20,6 % au Québec. On comptait aussi un peu moins d’entrepreneurs motivés par la recherche d’occasions d’affaires au Québec (48 %) que dans le reste du Canada (57 %). Ces différences sur le plan de la culture entrepreneuriale soulèvent des questions quant à la promotion et à la sensibilisation en milieu scolaire et dans l’ensemble de la société.

En ce qui a trait au démarrage comme tel, le CAJ se questionne quant au soutien logistique et financier offert aux jeunes entrepreneurs, notamment par Emploi-Québec. L’importance du soutien au démarrage est démontrée en particulier par le taux de survie relativement faible des nouvelles entreprises, ainsi que par les recherches menées ces dernières années auprès de nouveaux entrepreneurs. Au Québec, une étude du MDEIE démontrait en 2001 que seulement 35 % des nouvelles entreprises survivaient après cinq ans. En fait, pour près de la moitié de ces entreprises, la deuxième année d’exploitation est aussi la dernière. Après dix ans, il en reste moins de 20 % (Mélançon, Alarie, 2001, p. 4).

Des évaluations récentes des mesures Jeunes volontaires et Soutien au travail autonome (STA), effectuées par Emploi-Québec, ont fait apparaître certaines insatisfactions quant au niveau de l’aide accordée, à la durée des mesures, aux critères d’admissibilité ainsi qu’à leur gestion. Les mesures d’Emploi-Québec, souvent axées sur l’employabilité, sont-elles adaptées à la situation des jeunes entrepreneurs ? On remarque, en effet, que tant du côté d’Emploi-Québec que du côté des programmes éducatifs (y compris à l’université), c’est l’employabilité qui prime. N’y aurait-il pas avantage à faire une plus large place à l’entrepreneuriabilité ? Le CAJ aimerait aussi vérifier si certaines mesures d’Emploi-Québec répondent aux besoins particuliers de certains groupes de nouveaux entrepreneurs (surtout les jeunes et les femmes, etc.).

Plus généralement, ces mesures ont-elles une utilité pour stimuler la relève entrepreneuriale déjà en emploi ?

Il est, bien entendu, impossible de couvrir entièrement tous les éléments touchant la création d’entreprises par les jeunes. Toutefois, en se basant sur la documentation existante [6] et sur quelques entretiens avec des gens fortement engagés dans le domaine de l’entrepreneuriat, il est possible de dégager certains obstacles et de proposer des pistes de solution, notamment en ce qui concerne la formation et les soutiens financier et logistique. Les aspects touchant Emploi-Québec, principalement les mesures Jeunes volontaires et Soutien au travail autonome, ainsi que la formation en entreprise ont retenu davantage notre attention, en raison de la vocation même du CAJ.

1. DÉFINITIONS

Certains termes liés à la question de l’entrepreneuriat peuvent nous amener à confondre des situations qui ont en fait très peu à voir les unes avec les autres. Il importe donc de bien définir les principaux termes qui seront employés dans cette recherche.

Selon Emploi-Québec, le travailleur autonome « est une personne qui, sur une base régulière annuelle ou saisonnière, exploite une entreprise ou exerce un métier, une occupation, une profession à son propre compte dans le but d’en tirer profit [7] ». Revenu Québec ajoute à cela une précision fort importante, soit qu’il « n’existe aucun lien de subordination entre le travailleur autonome et son client. Il n’y a aucune relation d’employeur à employé, comme c’est le cas pour un salarié [8] ».

Cette précision est importante en raison d’une pratique de plus en plus courante consistant, pour un employeur, à redéfinir sa relation avec son salarié en faisant de ce dernier un travailleur autonome afin de réduire le poids des charges sociales liées au salariat. L’ancien salarié continue, dans les faits, d’accomplir sensiblement les mêmes tâches, mais dans une relation contractuelle différente, laquelle l’exclut généralement de plusieurs régimes de protection publique et, bien entendu, de toute possibilité de syndicalisation. De plus, il est généralement dépendant de son ancien employeur devenu son seul « client ». Il s’agit, on le comprend, d’une forme de salariat déguisé. Le Rapport Bernier [9] décrit bien les effets d’un tel changement pour les deux parties :

Du côté des employeurs, en plus de la flexibilité accrue qui découle de ces formes de relations d’emploi, il résulte une réduction des coûts des charges sociales, ces travailleurs indépendants n’ayant généralement pas accès aux régimes complémentaires de protection sociale existant dans les entreprises (régimes de retraite, assurances collectives, congés pour responsabilités parentales, etc.) et se trouvant exclus de certains régimes publics (assurance-emploi) ou devant payer plus cher pour en bénéficier (régime de rentes du Québec ou accidents du travail et maladies professionnelles). Cela signifie aussi que, n’ayant pas le statut de salariés, ces personnes ne peuvent avoir recours à la représentation collective prévue au Code du travail pour défendre leurs intérêts économiques et professionnels [10] .

Les travailleurs autonomes sont généralement comptabilisés dans la création d’entreprises à partir du moment où ils emploient eux-mêmes au moins un salarié. Dans le cas contraire, ils sont tout simplement considérés comme des travailleurs indépendants. Ainsi, on peut lire dans une analyse du MDEIE sur le taux de survie des nouvelles entreprises au Québec : « Chaque année, environ 11 à 15 % [sic] des entreprises sont considérées comme nouvelles, puisqu’elles n’avaient pas d’employés salariés l’année précédente, c’est-à-dire qu’elles n’émettaient pas de feuillet T4. De même, chaque année, environ 11 % à 15 % des entreprises disparaissent ou ne comptent plus d’employés salariés » (MDEIE, 2006). Le GEM comptabilise les nouvelles entreprises de la même façon : « Pour le GEM, le paiement d’un salaire à qui que ce soit, même au propriétaire, pendant plus de trois mois constitue la “naissance” d’une entreprise, le démarrage officiel » (GEM, 2005, p. 7).

Il apparaît aussi important de faire la distinction entre les jeunes qui sont engagés dans le démarrage d’une nouvelle entreprise et ceux qui travaillent à l’acquisition d’une entreprise existante. Nous nommerons donc « jeune entrepreneur » un individu de moins de 35 ans engagé dans le démarrage d’une entreprise, et « jeune propriétaire d’entreprise » un individu de moins de 35 ans étant propriétaire (ou en voie de le devenir), en tout ou en partie, d’une entreprise, que celle-ci soit nouvelle (moins de 42 mois) ou non.

Nous entendrons par « nouvelle entreprise » une entreprise de moins de 42 mois. Une entreprise en « prédémarrage » a moins de trois mois d’existence et ne verse encore aucun salaire.

2. L’ENTREPRENEURIAT JEUNESSE AU QUÉBEC ET AU CANADA

De multiples données nous permettent de dresser un portrait actuel de l’entrepreneuriat au Québec et au Canada. Nous nous intéresserons tout d’abord à la situation globale de l’entrepreneuriat, avant d’observer les particularités de l’entrepreneuriat des femmes, puis celui des jeunes de moins de 35 ans.

a. L’entrepreneuriat au Québec et au Canada

Dans l’ensemble, le Canada offre une bonne performance sur le plan de l’activité entrepreneuriale totale [11] par rapport aux autres pays à revenu élevé étudiés dans le cadre du GEM. Le Canada occupe le sixième rang en 2005, s’inscrivant toutefois seulement à la quatorzième position quant à la variation la plus positive par rapport à l’année précédente (voir tableau 2-1). De plus, le GEM démontre qu’avant 2004 le Canada avait enregistré une baisse pendant trois années consécutives, passant de 12,2 % en 2000 à 8 % en 2003, avant de remonter à 8,9 % en 2004.

Tableau 2-1 : L’activité entrepreneuriale totale (TEA), pays à revenu élevé, 2004-2005

Une observation des entrepreneurs en prédémarrage permet de constater que, de 2000 à 2005, ils ont toujours représenté une plus grande proportion de la population adulte au Canada que dans la moyenne des pays étudiés par le GEM, sauf pour l’année 2003. La situation est toutefois bien différente en ce qui concerne la proportion des entrepreneurs en démarrage. Dans ce cas, et pendant la même période, le Canada s’est retrouvé sous la moyenne des pays du GEM toutes les années, sauf en 2000 et 2001 (voir tableau 2-2).

Tableau 2-2 : Entrepreneurs en prédémarrage et en démarrage, Canada, moyenne du GEM, 2000-2005 (% de la pop. adulte)

On mentionne généralement deux types de motivation à se lancer en affaires, soit l’occasion d’affaires et la nécessité. Au Canada, la première motivation est généralement plus répandue que la seconde. Selon le GEM Canada 2005, cela serait dû à « la stabilité sociale et économique relative du Canada » (GEM Canada 2005, p. 17). L’activité entrepreneuriale totale (TEA) par occasion au Canada représentait, en moyenne, 7,28 % de la population adulte totale, de 2001 à 2005. La TEA par nécessité représentait quant à elle 1,6 % de la population adulte en moyenne pour la même période (GEM Canada 2005). Des travaux effectués en 2004 (Riverin, 2004, p. 20) indiquaient qu’il y avait au Québec une proportion moins importante (48 %) d’entrepreneurs motivés par la recherche d’occasions d’affaires que dans le reste du Canada (57 %).

Le GEM 2005 révèle par ailleurs que le Québec affiche de légers retards par rapport à la moyenne canadienne en ce qui a trait aux activités entrepreneuriales, c’est-à-dire la proportion d’adultes en prédémarrage ou en démarrage d’entreprise, et la proportion d’adultes propriétaires dirigeants d’entreprises établies. Sans surprise, c’est dans l’Ouest canadien que la dynamique entrepreneuriale est la plus forte, l’Ontario suivant de près.

Tableau 2-3 : Le portrait global de l’entrepreneuriat par région, Canada, 2000-2005 (en % de la pop. adulte)

Au cours des six dernières années, le Québec a tiré de l’arrière par rapport à la moyenne canadienne pour ce qui est des activités de prédémarrage. Entre 2000 et 2005, la moyenne canadienne s’est maintenue à 6,1 % de la population adulte, contre 4,8 % pour la moyenne québécoise. Le Québec n’a dépassé la moyenne canadienne pendant aucune de ces années et ne s’en est véritablement rapproché qu’en 2001 et 2003.

Pour ce qui est des activités de démarrage, l’écart se rétrécit un peu. Entre 2000 et 2005, la moyenne canadienne (3,5 %) n’a été que légèrement supérieure à celle du Québec (3,3 %), cette dernière dépassant même la moyenne canadienne en 2001, 2003 et 2005.

Graphique 2-1 : Entrepreneurs en prédémarrage et en démarrage, Québec et Canada, 2000-2005 (en % de la pop. adulte)

Le plus souvent, les propriétaires des nouvelles entreprises (moins de 42 mois) sont propriétaires uniques. La propriété multiple est très légèrement plus fréquente au Québec (45 %) que dans le reste du Canada (41 %) (Riverin, 2004, p. 23).

Par ailleurs, le secteur des services est celui dans lequel est apparu le plus grand nombre de nouvelles entreprises en 2004, que ce soit au Québec ou dans le ROC. Ainsi, 22 % des nouvelles entreprises québécoises se trouvaient dans le secteur des services aux entreprises, contre 24 % des nouvelles entreprises du ROC. De même, 40 % des nouvelles entreprises québécoises appartenaient au secteur des services aux consommateurs, secteur en grande expansion, contre 36 % pour les nouvelles entreprises du ROC.

Tableau 2-4 : Le secteur des activités des nouvelles entreprises, GEM 2004

Enfin, deux types d’entrepreneuriat très présents au Québec, soit les PME et l’entrepreneuriat social, méritent que l’on s’y attarde un moment. Au Québec, en 1999, les PME (dont environ 75 % ont moins de 5 employés et 98 % moins de 100) employaient près de 45 % de l’ensemble de la main-d’œuvre. En 2002, selon les estimations rapportées par la FCEI, elles ont créé plus de 90 % des nouveaux emplois (FCEI, 2004, p. 1). En 2003, selon l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), 70,3 % des entreprises québécoises employaient moins de 5 personnes et 28,5 % en employaient entre 5 et 199. Le dynamisme de ce secteur n’a d’égal que sa précarité. En effet, en 2002-2003, toujours selon l’ISQ, 24 869 nouvelles PME de moins de 5 employés avaient fait leur apparition… mais 23 284 entreprises du même type avaient péri (ISQ, 2006, p. 29). Il faut donc se montrer très sensible aux besoins exprimés par les jeunes entrepreneurs, car ils sont directement liés à la progression du secteur de la PME.

L’entrepreneuriat social connaît quant à lui une progression non négligeable au Québec, liée en partie au développement du secteur des services. Un récent document le définit comme suit : « une entreprise dont les objectifs principaux sont de nature sociale, dont les surplus sont réinvestis à des fins sociales dans l’entreprise pour servir la mission ou dans la communauté plutôt que de servir des intérêts visant la maximisation des profits pour les actionnaires ou les propriétaires [12] » (Riverin, 2006, p. 2). Selon les plus récentes statistiques issues d’une étude de Nathaly Riverin [13], 7,3 % de la population adulte québécoise serait engagée dans l’entrepreneuriat social, une proportion qui dépasse la moyenne canadienne (6,3 %). Il est intéressant de constater que, dans les provinces où l’entrepreneuriat est le plus dynamique en général (les provinces de l’Ouest et l’Ontario), une moins grande proportion de la population est engagée dans cette forme d’entrepreneuriat.

femmes, mais sans que cela relève d’une amélioration de la performance des femmes dans l’absolu. En 2004, au Canada, 37 % des PME (moins de 500 employés) étaient la propriété de femmes à plus de 50 %.

Graphique 2-2 : L’activité entrepreneuriale totale (TEA) selon le sexe, Canada, É.-U. et GEM, 2005

Au Canada, les femmes sont plus présentes dans le secteur primaire (12 % contre 9 % chez les hommes) et beaucoup plus dans celui des services aux consommateurs (42 % contre 27 %), mais moins présentes dans le secteur secondaire (22 % contre 28 %) et surtout dans celui des services aux entreprises (24 % contre 35 %) [14].

Au Québec, les femmes étaient, en 2004, moins présentes en affaires que dans l’ensemble du Canada. Seulement 3,7 % d’entre elles étaient engagées dans ce type d’activité, comparativement à 5,7 % dans le reste du Canada (ROC). Il est surtout intéressant d’observer la répartition de l’activité entrepreneuriale entre les sexes dans les deux régions. Ainsi, les femmes représentaient 30 % de l’ensemble des personnes en affaires au Québec, contre 39 % dans le ROC. Toutefois, une étude de Statistique Canada souligne que la progression de l’entrepreneuriat féminin a été surtout marquée au Québec, depuis la fin des années 1990 (Carrington, 2004, p. 2).

Des études ont démontré que, de manière générale, les femmes étaient aussi moins présentes dans les domaines universitaires directement liés à l’entrepreneuriat, notamment en raison d’une perception différente de la carrière d’entrepreneur. « Dans les programmes de premier cycle, les femmes sont moins nombreuses dans les cours d’entrepreneuriat (en moyenne, 39 % contre 61 % pour les hommes). Dans les concentrations spécifiques sur l’entrepreneuriat, les femmes sont aussi moins nombreuses et cela s’explique en partie parce qu’elles sont plus susceptibles de dire que l’entrepreneuriat ne correspond pas à leur personnalité » (Borges, Simard et Filion, 2005b, p. 5).

Cette réalité pourrait changer, dans les prochaines années, la courbe de croissance des femmes devenues entrepreneures tendant à dépasser celle des hommes (Gaudreault, 2000, p. 6). De fait, selon les données de Statistique Canada, entre 1981 et 2001, le nombre d’entrepreneurs a augmenté de 208 % chez les femmes contre 38 % chez les hommes (Robichaud et autres, 2005, p. 2). Néanmoins, l’OCDE signale que « le chiffre d’affaires annuel des entreprises détenues par une femme s’est avéré nettement moindre – un peu moins de la moitié, en 2000 – que celui des entreprises détenues par un homme » (OCDE, 2005, p. 30).

Tableau 2-6 : Implication en entrepreneuriat selon le sexe, taux et répartition, Québec et ROC, 2004

Le GEM 2005 permet en outre de comparer les motivations des hommes et des femmes dans ce type d’activités. Ainsi, le GEM calcule le ratio entre la proportion de personnes motivées par l’occasion d’affaires et la proportion de personnes motivées par la nécessité. Pour les hommes comme pour les femmes, l’occasion d’affaires est la motivation la plus fréquente, mais on note une plus grande prévalence de la nécessité dans le cas des femmes, et ce, dans la plupart des pays considérés. Les analystes du GEM soulignent que « en général, les pays avec un marché du travail dynamique et diversifié ou des filets de sécurité sociale plus efficaces démontrent un ratio d’entrepreneurs féminins motivés par l’opportunité par rapport à la nécessité plus favorable » (Miniti, Allen et Langowitz, 2005, p. 15). Cela, notamment, en raison du risque plus faible lié aux autres options en matière de revenu, lesquelles réduisent la pression, surtout au moment du démarrage et dans les premières années d’exploitation de l’entreprise.

Tableau 2-7 : Motivation principale de l’entrepreneuriat (opportunité vs nécessité), Canada et autres pays du GEM, par genre

Ces données sont semblables à celles qui ont été recueillies dans une autre étude réalisée spécifiquement pour le Québec. Dans un échantillon de 196 entreprises, dont 28 étaient la propriété de femmes, on a observé que 39 % des femmes étaient d’abord motivées par une occasion d’affaires, contre 55 % des hommes, alors que 14 % des femmes étaient motivées par la nécessité, contre 8 % des hommes (Robichaud et autres, 2005, p. 21).

L’écart dans l’activité entrepreneuriale entre les hommes et les femmes apparaît aussi chez les jeunes entrepreneurs. En 2004, 26,5 % des jeunes hommes de 18 à 34 ans affirmaient vouloir créer une entreprise dans les trois prochaines années et 8,1 % étaient effectivement en processus de création d’entreprise. Chez les jeunes femmes, 9,5 % seulement affirmaient vouloir créer une entreprise dans les trois prochaines années, et 2,3 % étaient en processus de création d’entreprise. On observe aussi des différences sur le plan de la culture entrepreneuriale, les hommes étant plus nombreux à être en contact avec des entrepreneurs et à estimer avoir les compétences nécessaires pour créer une entreprise, et plus nombreux également à valoriser la « profession » d’entrepreneur.

Tableau 2-8 : Dynamisme entrepreneurial chez les 18-34 ans au Québec, selon le genre (2004)

Comme on l’a vu, les domaines entrepreneuriaux investis par les femmes sont souvent différents de ceux que privilégient les hommes. « En général, les femmes créent et gèrent des entreprises dans des secteurs d’activité autres que ceux privilégiés par les hommes. Les secteurs qu’elles choisissent volontiers sont le commerce de détail, l’enseignement et d’autres branches de services, tandis qu’elles sont moins présentes dans les secteurs nécessitant une formation scientifique et technologique en bonne et due forme » (OCDE, 2005, p. 29). Si l’on se fie aux données de l’Enquête sur le financement des petites et moyennes entreprises de Statistique Canada, on observe que « les entreprises appartenant à des femmes sont plus jeunes, plus petites et concentrées dans les services et, en général, moins rentables que les entreprises appartenant à des hommes » (Carrington, 2004, p. 10). Cette situation aurait un impact sur la structure du financement et du capital social de ces entreprises, les femmes engageant notamment beaucoup plus de capital personnel (épargne, crédit personnel, etc.) dans l’aventure que les hommes.

Les femmes sont aussi très présentes dans le domaine de l’entrepreneuriat social. Elles seraient deux fois plus actives que les hommes « dans la création d’organisations à caractère social, bénévole ou communautaire » (Riverin, 2006, p. 5), alors que les hommes seraient un peu plus présents dans les organisations établies.

Tableau 2-9 : Les entrepreneurs sociaux par genre, Canada, 2005

c. L’entrepreneuriat des jeunes de moins de 35 ans au Québec et au Canada

Les jeunes de moins de 35 ans occupent une place importante dans l’entrepreneuriat au Québec et au Canada. Pour dresser le portrait de leur situation, nous utiliserons principalement les statistiques fournies par le GEM et présentées dans une étude de HEC Montréal (Riverin et Jean, 2004), celles tirées de l’Enquête sur le financement des petites et moyennes entreprises [15] de Statistique Canada et les chiffres tirés de diverses études sur l’entrepreneuriat au Québec [16]. Par ailleurs, pour éviter les répétitions, les données portant sur la culture entrepreneuriale des jeunes seront présentées plus loin, dans une partie réservée à cet effet. Nous nous concentrerons ici sur l’activité entrepreneuriale comme telle.
Les données compilées par le GEM en 2004 indiquent que 18,1 % des jeunes Québécois prévoyaient créer une entreprise dans les trois prochaines années, une proportion plus élevée que dans le reste du Canada (16,8 %) et deux fois plus importante que chez les personnes de 35 ans et plus (9,7 %). On parle donc d’environ 300 000 jeunes intéressés à se lancer en affaires. Ce qui frappe surtout, c’est la progression : « Depuis 2002, l’intention des jeunes Québécois de moins de 35 ans de créer une entreprise a donc progressé de près de 80 % » (Riverin et Jean, 2004, p. 12). L’étude de Riverin et Jean mentionne plusieurs actions ayant potentiellement eu un impact sur la situation au cours des dernières années, notamment le Défi de l’entrepreneuriat jeunesse, le Concours québécois en entrepreneuriat et la présence d’agents de sensibilisation à l’entrepreneuriat jeunesse dans toutes les régions du Québec. Ces derniers sont très actifs dans l’instauration d’une culture entrepreneuriale dans les communautés locales et dans la composition d’un bassin de personnes intéressées à soutenir les jeunes dans de telles entreprises. Le Défi a d’ailleurs été remarqué dans le cadre des études du GEM, qui en font mention en des termes très positifs (GEM, 2006, p. 9). Les données précédentes permettent de penser qu’environ 32 670 de ces 300 000 jeunes créeront une entreprise avec succès [17].

On remarque des différences importantes entre les régions du Québec en ce qui a trait aux intentions entrepreneuriales des jeunes. En effet, il semble que ces dernières soient plus importantes dans les régions situées en périphérie de Montréal que dans les régions éloignées. Les régions situées près de Montréal sont des pôles d’attraction pour les jeunes familles et l’immigration, ce qui pourrait expliquer en partie leur dynamisme entrepreneurial. Apparemment, les jeunes des régions éloignées sont moins nombreux à percevoir de bonnes occasions d’affaires, ce qui pourrait s’expliquer par la perception d’obstacles plus importants : « Les freins à la création d’entreprises sont plus importants dans ces régions éloignées et les occasions d’affaires doivent permettre de surpasser l’ensemble de ces freins, ce qui est loin d’être évident » (Riverin et Jean, 2004, p. 9).

Tableau 2-11 : Les intentions entrepreneuriales des jeunes Québécois, par région, 2004

Tableau 2-10 : Les intentions entrepreneuriales des jeunes Québécois, 2004

En 2004, 5,3 % des Québécois de moins de 35 ans, soit approximativement 90 000 jeunes, étaient effectivement en processus de création d’entreprise (Riverin et Jean, 2004, p. 15). Cette proportion est moins élevée que dans le reste du Canada (7,3 %), et elle se situe sous la moyenne canadienne, qui est de 6,9 %. Les jeunes sont toutefois plus actifs sur ce plan que leurs aînés (4,7 %).

Tableau 2-12 : Les jeunes en processus de création d’entreprise, Québec et Canada, 2004

Les données sur le démarrage d’entreprise sont conséquentes avec celles présentées précédemment sur les intentions entrepreneuriales. Encore ici, les jeunes du Centre- du-Québec (10,0 %), de Laval (9,5 %), des Laurentides (9,4 %) et de Lanaudière (8,8 %) mènent le bal, alors que les régions éloignées ont été moins actives.

Tableau 2-13 : Les jeunes en processus de création d’entreprise, régions du Québec, 2004

Au Québec, en 2004, 13,4 % des jeunes de 18 à 24 ans et 20,6 % des jeunes de 25 à 34 ans étaient propriétaires dirigeants d’une entreprise. Si le premier groupe se classait légèrement au-dessus de la moyenne du reste du Canada (12,3 %), le second affichait un net retard sur le ROC (31,6 %).

Graphique 2-3 : Répartition des nouvelles entreprises, selon l’âge des propriétaires dirigeants, Québec et ROC, 2004

Les jeunes du Québec sont donc moins souvent propriétaires d’une nouvelle entreprise (moins de 42 mois) que dans le reste du Canada. Dans l’ensemble, 3,1 % des jeunes Québécois de moins de 35 ans étaient propriétaires d’une nouvelle entreprise en 2004, contre 3,9 % dans le ROC. Chiffre encore plus significatif, seulement 1,6 % des jeunes Québécois étaient propriétaires d’une entreprise établie, contre 3,5 % des jeunes du ROC.

Tableau 2-14 : Les entreprises de moins de 42 mois et de plus de 42 mois détenues par les jeunes de moins de 35 ans, Québec et ROC, 2004 (en % de la population de ce groupe d’âge)

Il est intéressant de constater que les jeunes de 18 à 24 ans étaient assez nombreux à s’investir dans le démarrage d’entreprises d’économie sociale. En fait, leur proportion se rapprochait de celle des personnes de plus de 45 ans, traditionnellement plus nombreuses que leurs cadets à créer ce type d’entreprises. Au Canada, en 2005, 6,4 % des jeunes de ce groupe d’âge se qualifiaient comme entrepreneurs sociaux, soit 3,9 % dans des organisations actives et 2,5 % dans des organisations en prédémarrage (Riverin, 2006, p. 5).

Tableau 2-15 : Les entrepreneurs sociaux par groupe d’âge, Canada, 2005

Les jeunes entrepreneurs de 25 à 34 ans seraient, au Canada, presque deux fois plus présents que leurs aînés dans l’industrie du savoir. Cela suppose généralement un plus grand recours à la R-D et un investissement plus important dans l’acquisition de compétences et de licences. Leurs entreprises présentent aussi plus souvent une forte croissance et sont plus viables que celles de leurs aînés [18].

3. CULTURE ENTREPRENEURIALE

Développer l’entrepreneuriat requiert que l’on se penche à la fois sur l’environnement et le milieu, en favorisant l’essor d’une culture entrepreneuriale, et sur certaines habiletés et compétences individuelles nécessaires à la réussite d’un projet de création d’entreprise. Le gouvernement québécois a fait plusieurs gestes en ce sens ces dernières années, notamment par l’entremise du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse et des concours d’entrepreneuriat dans les écoles. De même, dans les régions, des acteurs publics ou privés ont entrepris des actions, privilégiant des formules souvent axées sur le mentorat. On pense, entre autres, au réseau de mentorat de la Fondation de l’entrepreneurship du Québec, dont le programme de parrainage a bénéficié d’un appui explicite dans le Plan triennal du Défi, qui consacre 630 000 $ sur trois ans à sa stabilisation et à son renforcement.

La formule de mentorat est celle qui semble donner les meilleurs résultats dans bien des cas. La relation de confiance qui s’établit est difficile à reproduire dans le contexte plus structuré d’une relation avec un organisme de soutien comme un CLE ou un CLD. Il y aurait certainement lieu d’accroître le travail de sensibilisation pour recruter des mentors et de financer davantage d’initiatives de ce genre.

a. La culture entrepreneuriale

La culture entrepreneuriale est un concept relativement complexe, mais dont la compréhension est essentielle à quiconque souhaite concevoir ou améliorer des mesures axées sur le développement de l’entrepreneuriat. La recherche québécoise récente la plus complète sur ce sujet est probablement celle réalisée en 2005 sous la responsabilité de la Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier [19]. Cette recherche s’appuie sur la théorie de l’entrepreneuriat qui place au cœur de la démarche entrepreneuriale l’intention de créer. Le modèle auquel elle se réfère a été élaboré par Shapero et Sokol. Selon eux, la décision de créer une entreprise est d’abord provoquée par un événement (souvent la perception d’une occasion d’affaires ou la nécessité) qui vient briser la routine. Par la suite, le choix de l’individu de passer à l’acte ou non serait fonction de trois éléments [20] :

  • Sa perception de la désirabilité du comportement en question ;
  • Sa propension à agir, qui réfère à la volonté d’agir selon ses intentions ;
  • Sa perception de la faisabilité du comportement envisagé.

Une culture entrepreneuriale s’enracinerait donc dans un milieu qui valorise les gestes et les valeurs associés à l’entrepreneuriat et qui permet aux entrepreneurs de mettre leurs habiletés et leur créativité en œuvre dans des projets concrets. La Fondation de l’entrepreneurship du Québec la définit ainsi : « l’ensemble des convictions partagées, des manières d’être, de voir et de faire, qui orientent le comportement des personnes, des institutions et de la population en général à l’égard de l’entrepreneurship [21] ». Les principales valeurs entrepreneuriales, dont la plupart sont mesurées dans le cadre du GEM, seraient : « l’innovation et la créativité, l’attitude face à la prise de risque, l’indépendance, la perception répandue qu’il existe des opportunités dans l’environnement, le statut social accordé à l’entrepreneur, l’image de l’entrepreneuriat projetée dans la société, l’importance accordée au travail dans la société, la peur de l’échec » (Audet, Riverin et Tremblay, 2005, p. 3).

On remarque que les facteurs culturels ont surtout un impact auprès des jeunes de 18 à 24 ans : « 15,2 % (R2 = 0,152) des intentions entrepreneuriales de ce groupe peuvent être expliquées par les facteurs culturels et les normes sociales, alors que ce taux n’était que de six pour cent pour l’ensemble de l’échantillon » (Audet, Riverin et Tremblay, 2005, p. 10). Cet impact décroîtrait par la suite avec l’âge.

L’instauration d’une culture entrepreneuriale dans les milieux de vie est donc tout aussi essentielle que le développement des habiletés entrepreneuriales chez les individus : « Bien que les caractéristiques individuelles aient une place importante dans le démarrage d’entreprise, l’environnement doit pouvoir fournir aux entrepreneurs le reste des ressources dont ils ont besoin » (Audet, Riverin et Tremblay, 2005, p. 12). L’OCDE va encore plus loin, affirmant que « l’on aura beau enseigner les compétences d’entrepreneur, y compris les plus utiles aux jeunes entreprises, la dynamique escomptée ne pourra pas s’enclencher tant que la société dans son ensemble n’aura pas accepté ou acquis l’état d’esprit et les attitudes appropriés » (OCDE, 2001, p. 85). Le gouvernement du Québec a d’ailleurs reconnu ce fait dans sa Stratégie d’action jeunesse 2006-2009, en faisant de la promotion de la culture entrepreneuriale un outil de premier plan dans l’objectif de combler le déficit entrepreneurial du Québec par rapport à la moyenne canadienne (SAJ, 2006). Le gouvernement avait auparavant souligné, dans le Plan d’action triennal 2004-2005-2006 du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse, l’importance du rôle de l’école dans le développement de la culture entrepreneuriale, notamment par la transmission des attitudes et des valeurs entrepreneuriales (SAJ, 2004, p. 15).

Le GEM 2004 donne un aperçu de certains éléments de la culture entrepreneuriale des jeunes Québécois. Nous en retiendrons cinq, soit la désirabilité sociale de la carrière entrepreneuriale, le statut des entrepreneurs, l’attitude face à l’échec, la perception de bonnes occasions d’affaires et le contact avec des modèles entrepreneuriaux.

En 2004, au Québec, 85,4 % des jeunes de moins de 35 ans avaient une vision positive de la carrière entrepreneuriale, comparativement à 71,7 % dans le reste du Canada. Les Québécois, dans tous les groupes d’âge, sont aussi proportionnellement moins nombreux à croire que l’entrepreneur jouit d’un statut largement respecté dans la société. Quant à la peur du risque, elle constitue un frein à l’entrepreneuriat pour plus de 30 % des jeunes de moins de 35 ans au Québec, comparativement à un peu plus de 25 % dans le reste du Canada. À ce sujet, les analystes du GEM soulèvent deux points. D’une part, il s’agit d’un recul au Québec. En 2002, on parlait plutôt de 24,7 %. Il est aussi possible que les chiffres aient changé récemment, notamment à la suite des actions entreprises dans les institutions d’enseignement et dans les régions ces dernières années. D’autre part, les difficultés économiques vécues dans une région, notamment l’incertitude à l’égard du marché de l’emploi, tendent à réduire l’impact du risque dans la décision d’un individu de se lancer en affaires : « Quand les emplois sont rares et sans sécurité, l’entrepreneuriat est un choix de carrière moins risqué » (Riverin et Jean, 2004, p. 7). Cela contribuerait à expliquer que la crainte du risque affecte peu le dynamisme entrepreneurial dans des régions comme la Mauricie ou la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine.

Tableau 3-1 : Culture entrepreneuriale chez les jeunes, Québec et Canada, selon le GEM 2004

Les jeunes de moins de 35 ans sont, au Québec comme dans le reste du Canada, proportionnellement plus nombreux à percevoir de bonnes occasions d’affaires dans leur région pour les six prochains mois. Notons qu’à cet égard les régions éloignées semblent défavorisées, et que ce déséquilibre avec les régions périphériques des grands centres semble affecter d’abord et avant tout les jeunes de moins de 35 ans. Dans un contexte où l’exode rural demeure difficile à juguler, il faut tenir compte de ce type de données dans l’élaboration de mesures axées sur le développement d’une culture entrepreneuriale.

Enfin, 47,2 % des jeunes Québécois connaissaient une personne ayant créé une entreprise au cours des deux dernières années. Cela les place légèrement sous la moyenne canadienne (49,7 %) et la moyenne du ROC (50,4 %). On note toutefois que, dans toutes les régions, les jeunes étaient plus nombreux que leurs aînés à se trouver dans cette situation.

Au cours des dernières années, le gouvernement québécois s’est beaucoup concentré sur la question du développement de la culture entrepreneuriale, notamment par les mesures adoptées dans le cadre du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse.

Tableau 3-2 : Mesures du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse en développement de la culture entrepreneuriale [22]

Les universités ont elles aussi un rôle à jouer dans l’implantation d’une culture entrepreneuriale chez les étudiants et dans la communauté. La plupart des universités canadiennes ont mis sur pied un centre d’aide à l’entreprise « dont la fonction est de stimuler les étudiants à se lancer davantage en affaires et d’offrir des services de formation et de consultation aux PME locales » (OCDE, 2002, p. 114). Toutefois, des études récentes révèlent que ces services sont très peu connus des étudiants, même ceux qui souhaitent se lancer en affaires. Nous y reviendrons dans la section sur la formation.

b. La relève entrepreneuriale en entreprise

La question de la relève entrepreneuriale est également liée à la situation démographique, en particulier dans les régions éloignées des grands centres. Le vieillissement de la population entraîne forcément un vieillissement des dirigeants d’entreprise. « Dans certaines régions, une importante part de la population âgée de 55 ans et plus est actuellement propriétaire d’une entreprise. Dans certaines régions, comme la Montérégie, le Centre-du-Québec et Lanaudière, c’est plus de 10 % de la population » (Riverin et Jean, 2004, p. 17). Il s’ensuit que le développement de la relève entrepreneuriale ne doit pas se limiter à une incitation à créer une entreprise ; on doit aussi encourager et soutenir la vocation entrepreneuriale chez les jeunes qui sont déjà implantés dans des entreprises et qui sont susceptibles d’en devenir les dirigeants, voire les nouveaux propriétaires.

Tableau 3-3 : Nombre d’habitants et pourcentage de la population de 55 ans et plus propriétaire d’une entreprise (2004)

En règle générale, le développement de la relève entrepreneuriale déjà présente en entreprise s’articule autour de trois axes : la formation (acquisition et amélioration des compétences liées à l’entrepreneuriat et à la gestion), le transfert de connaissances (mentorat, transmission de la culture organisationnelle de l’entreprise) et l’inclusion des jeunes dans les organismes décisionnels des entreprises. Le plan triennal du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse prévoit consacrer 480 000 $ sur trois ans à une mesure visant à « encourager les entrepreneurs, notamment les propriétaires d’entreprise familiale, à planifier la relève », entre autres par le « soutien de la démarche intégrée visant à faciliter la relève en se basant sur l’approche adoptée par le Groupement des chefs d’entreprises du Québec » (SAJ, 2004, p. 39). Plus précisément, on prévoyait (SAJ, 2004, p. 25) :

• Créer 25 clubs de la relève dans les secteurs manufacturiers et de la distribution ;
• Organiser un atelier de formation d’une journée ;
• Offrir un accompagnement sur mesure par des chefs d’entreprise qui ont réussi
à assurer la relève dans leur entreprise ;
• Tenir un rassemblement annuel, d’une durée d’une journée, réunissant des
spécialistes ainsi que des aspirants chefs et chefs d’entreprise engagés dans un processus de relève et venant de toutes les régions du Québec.

Emploi-Québec, en collaboration avec le ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation (MDEIE), offre depuis peu, dans l’ensemble de ses CLE, une formation de sensibilisation à la relève entrepreneuriale qui s’adresse aux dirigeants et au personnel stratégique des entreprises, ces dernières assumant le coût de la formation. Celle-ci est ouverte à tous, car il ne s’agit pas d’une mesure d’Emploi- Québec comme telle mais bien d’une formation offerte dans le cadre du programme de formation MPA (meilleures pratiques d’affaires) du MDEIE.

La relève entrepreneuriale : « En route vers un transfert d’entreprise gagnant » est donc une formation MPA qui vise à sensibiliser les dirigeants d’entreprise à l’importance de bien planifier le transfert d’entreprise et à en comprendre l’ensemble des enjeux qui s’y rattachent, en privilégiant une approche claire et facile à mettre en œuvre, axée sur les aspects humains d’un tel transfert :

En plus de vulgariser les grandes étapes du processus, la session illustre le contexte dans lequel s’opère un transfert et fournit des outils appropriés. Elle aborde notamment les attentes et les motivations des principaux acteurs.


Elle vise plus particulièrement à présenter les différentes possibilités de transfert, et à faire connaître les stratégies et les produits de financement, les enjeux fiscaux ainsi que les principales méthodes d’évaluation d’entreprise. Plusieurs outils, comme l’inventaire des sources de financement, sont remis aux participants [23].

Cette formation n’a toutefois nullement pour but d’enseigner le métier d’entrepreneur. Une telle formation n’existe pas à Emploi-Québec à l’heure actuelle. L’entrepreneuriat ne semble d’ailleurs pas vraiment considéré comme un « métier ». Il y a probablement là une lacune à corriger.

Emploi-Québec offre aussi, dans sa mesure de formation de la main-d’œuvre, des formations aux gestionnaires des entreprises. Toutefois, ces dernières sont élaborées dans un objectif d’employabilité plutôt que dans une perspective d’entrepreneuriabilité, et elles visent surtout à améliorer la performance de l’entreprise. Il semble donc qu’il y ait un besoin à l’égard d’une formation qui inciterait les employés à croire en leurs capacités de devenir dirigeants d’entreprise, qui leur permettrait de comprendre quelles compétences leur sont nécessaires pour y arriver et qui les inciterait à se former en ce sens.

Toutefois, la question de la relève entrepreneuriale demeure un sujet délicat dans les entreprises. Le besoin de former une relève se heurte généralement au désir des dirigeants d’empêcher la création de rivalités à l’intérieur de leur entreprise ou de freiner l’émergence d’ambitions susceptibles de compromettre leur leadership. Ainsi, dans bien des cas, plutôt que d’axer les interventions sur la relève entrepreneuriale comme telle, il est préférable d’aborder la question sous un angle différent, notamment l’intrepreneuriat ou l’essaimage.

L’intrepreneuriat peut se définir comme l’utilisation de sa créativité à l’intérieur de l’entreprise dans un objectif d’innovation. Il ne s’agit donc pas tant de développer ses compétences entrepreneuriales dans le but de remplacer les dirigeants actuels que de développer sa capacité à entreprendre afin de contribuer à l’essor de l’entreprise.

Pour sa part, l’essaimage peut prendre diverses formes. Il touche particulièrement les entreprises technologiques, dans lesquelles le savoir, la R-D et l’innovation occupent une place centrale et où les employés sont très hautement qualifiés. Ses trois formes principales sont [24] :

• L’essaimage interne (spin-off) : un membre du personnel de l’organisation essaimante crée une entreprise à partir d’une technologie développée au sein de l’organisation essaimante ;
• L’essaimage externe (spin-in) : une entreprise est créée par un chercheur externe à l’organisation essaimante, mais en utilisant une technologie développée au sein de celle-ci ;
• L’essaimage de sortie (spin-out) : une entreprise est créée parce que l’organisation essaimante ne veut plus de cette technologie.

La création d’une entreprise dans ces conditions repose souvent sur de petites équipes d’entrepreneurs très compétents dans leur domaine technologique mais sans réelle formation en gestion et dont le financement principal est informel (épargne personnelle, famille, amis, etc.). De plus, les premières ventes sont souvent réalisées plus d’une année après la mise sur pied de l’entreprise. Dans un tel contexte, le rôle que pourraient jouer Emploi-Québec et ses partenaires se rapporterait essentiellement au soutien du revenu et à l’appui logistique, notamment par la formation. Comme la plupart des entreprises essaimantes accordent des congés sans solde à leurs employés « essaimés », Emploi-Québec devrait prévoir une forme de soutien du revenu pour cette période. Une telle mesure irait dans le sens d’un soutien à la création d’entreprises et s’inscrirait dans l’objectif de création d’emplois d’Emploi-Québec, l’essaimage technologique étant reconnu comme fortement générateur d’emploi.

Recommandation 1 : Qu’Emploi-Québec étudie la possibilité d’inclure des services de promotion de l’entrepreneuriat dans ses mesures de formation, volet entreprise.

Recommandation 2 : Qu’Emploi-Québec étudie la possibilité d’élaborer des formations en entreprise axées sur le développement de l’intrepreneuriat.

Recommandation 3 : Qu’Emploi-Québec ajoute, dans ses mesures de formation, volet entreprise, une formation sur les avantages d’inclure rapidement des jeunes dans les instances décisionnelles de l’entreprise et les méthodes pour y arriver.

Recommandation 4 : Qu’Emploi-Québec et ses partenaires élaborent une mesure de soutien aux entreprises essaimantes, basée sur un soutien du revenu et un appui logistique.

4. SOUTIEN AUX JEUNES ENTREPRENEURS

La disponibilité et l’accessibilité de divers types de soutien sont des éléments importants du succès ou de l’échec d’une nouvelle entreprise. Cela est particulièrement crucial lorsqu’il s’agit de jeunes entrepreneurs – et d’autant plus s’il s’agit de jeunes « défavorisés » ou provenant de communautés locales jugées comme telle – en raison d’obstacles plus difficiles à surmonter que pour les autres groupes d’âge :


Ils peuvent ne pas avoir les compétences sociales nécessaires à leur activité. Ils peuvent par exemple ne pas se sentir à l’aise pour essayer de vendre à des personnes plus âgées. Les jeunes moins expérimentés peuvent ne pas être au courant des dispositifs de soutien qui existent, tandis que les diplômés sont souvent plus capables d’accéder à une assistance. En outre, parmi les jeunes appartenant à certains groupes défavorisés, il peut y avoir une certaine méfiance à l’égard des organismes publics. Mais les principales limitations tiennent à leur manque de moyens humains et financiers, et d’expérience du travail et de l’entreprise [25] .

Le soutien aux jeunes entrepreneurs est important à plus d’un titre. Les nouveaux entrepreneurs ont besoin d’être appuyés dans les phases de prédémarrage et de démarrage, mais aussi lors de la période de pérennisation. Les premières années d’activité sont en effet cruciales dans l’acquisition d’une certaine stabilité pour l’entreprise. D’ailleurs, un grand nombre d’entre elles disparaissent dans les trois premières années d’exploitation. Un récent rapport de recherche sur la création d’entreprises [26]affirmait d’ailleurs que les systèmes d’accompagnement devraient s’étirer sur de plus longues périodes :

Les services de soutien à la création d’entreprises sont parfois concentrés au début du processus. Toutefois, les difficultés des entrepreneurs s’accroissent lorsqu’ils entrent dans la phase de démarrage et, par la suite, dans les pérennisations. En conséquence, il serait important de développer et de mettre en œuvre un système d’accompagnement et de suivi à toutes les étapes du processus de création, et non seulement pour les activités initiales du processus [27] .

Au Québec, selon la taille des entreprises, le taux de survie après trois ans variait, en 2001, entre 47 % (entreprises de moins de 5 employés) et 68 % (6 à 50 employés) [28]. Ces taux de survie varient aussi en fonction des secteurs d’activité. Les secteurs de l’hébergement et de la restauration, la pêche, la forêt et les communications semblent particulièrement difficiles, avec des taux de survie avoisinant les 30 % (Mélançon et Alarie, 2001, p. 11).

Tableau 4-1 : Taux de survie des entreprises en pourcentage selon le nombre d’années d’activité et le nombre d’emplois, Québec

La plupart (75 %) des nouveaux entrepreneurs occupent un emploi à temps plein au moment où ils lancent leur entreprise, et plus de 80 % occupent un emploi, que ce soit à temps plein ou à temps partiel. Seul un très petit nombre est sans emploi ou à la maison [29]. Ces données sont importantes lorsqu’on pense à la mesure STA. L’accessibilité à cette mesure de soutien exige que l’on soit sans travail ou, à tout le moins, que le statut d’emploi soit très précaire. Cela exclut donc les personnes déjà en emploi, tout comme la plupart des étudiants fraîchement diplômés. Il faut pourtant s’assurer que ces personnes, en particulier les jeunes entrepreneurs, puissent bénéficier d’un soutien complet, tant sur le plan financier que sur les plans logistique et technique.

L’OCDE discerne trois obstacles principaux à la réussite des jeunes entrepreneurs : leur connaissance insuffisante des possibilités offertes par le travail indépendant, le manque de formation appropriée et les problèmes normalement liés au démarrage d’une entreprise, à sa survie et à sa croissance (OCDE, 2001, p. 46). Pour surmonter ces obstacles, les pays de l’OCDE mettent généralement en place trois types de stratégie d’intervention [30] :

• Démontrer aux individus que la création d’entreprise et le travail indépendant représentent des choix de carrière réalistes ;
• Renforcer l’apprentissage et développer l’esprit d’entreprise ainsi que les compétences entrepreneuriales ;
• Offrir des services soutenant concrètement les entreprises en démarrage.

Notons, avant de poursuivre, que le soutien dont les jeunes entrepreneurs ont besoin aurait tendance à varier selon le sexe, comme le démontre l’évaluation différenciée selon le sexe de la mesure STA d’Emploi-Québec [31]. Il semble que les participantes soient généralement plus scolarisées que les participants, mais qu’en revanche leur situation financière soit plus précaire. Cela suppose donc des besoins différents. Les femmes « auraient besoin que l’on prête davantage attention à leur situation financière, alors que les hommes auraient plus de difficultés à élaborer et à rédiger leur plan d’affaires en raison de leur plus faible scolarité » (MESS, 2005b, p. 4).
Il existe, au Québec, deux grandes approches quant au soutien de l’entrepreneuriat. La première cherche d’abord et avant tout à diminuer les risques de mortalité des entreprises naissantes, notamment en offrant du financement, des conseils, de la formation, bref, en tentant de faire des individus de meilleurs entrepreneurs. C’est l’approche généralement retenue par les gouvernements, et celle qui serait à la base de la création des CLD au Québec. La seconde approche se concentre plutôt sur l’augmentation du nombre d’entreprises, en essayant de susciter davantage d’occasions d’affaires, notamment en facilitant l’utilisation par les entrepreneurs d’innovations dans les domaines de la technologie et de la gestion, en créant des réseaux au sein desquels des entrepreneurs aux expertises complémentaires peuvent se rencontrer ou en fournissant du capital de risque. C’est, par exemple, l’approche de Pluricapital [32]. Nous nous intéresserons surtout ici aux organismes procédant selon la première approche, comme les CLD et les SAJE, ainsi qu’à certaines mesures d’Emploi-Québec.

a. Formation

À la création d’un environnement propice à l’entrepreneuriat se greffe le développement des capacités et des compétences individuelles nécessaires pour mener à bien un projet de création d’entreprise et, plus encore, pour acquérir un esprit d’entreprise. On peut en distinguer deux formes, que nous appellerons ici l’éducation à l’entrepreneuriat et la formation à l’entrepreneuriat.

L’éducation à l’entrepreneuriat intervient plutôt dans les premiers stades de la formation initiale (primaire et secondaire). Elle ne vise pas tant l’acquisition de compétences pointues en entrepreneuriat que le développement de l’esprit d’entreprise en général, entendu dans son sens large comme un désir d’entreprendre. Il s’agit d’aider les jeunes à développer leur autonomie, leur créativité et leur capacité de s’investir dans des projets. La formation à l’entrepreneuriat intervient généralement dans les stades ultérieurs de la formation initiale (université, y compris les cycles supérieurs) et touche aussi une multitude de gens à l’extérieur du réseau de l’éducation. Il s’agit de donner, souvent à court terme, les compétences nécessaires à la création d’une entreprise ou à la concrétisation d’un projet de travail indépendant. Une étude récente de l’OCDE affirme que « dans la plupart des cas, l’enseignement qui vise à l’acquisition de réels talents d’entrepreneurs va en s’intensifiant tout au long de l’adolescence, puis avec l’entrée à l’université et la poursuite des études supérieures à un niveau plus élevé. La formation offerte dans ce domaine en dehors du système éducatif peut soit consolider l’enseignement dispensé à l’école, soit combler les lacunes – souvent importantes – que comporte encore ce système dans la plupart des cas » (OCDE, 2001, p. 43).

Le GEM souligne le rôle de l’éducation dans l’entrepreneuriat : « Il est largement accepté que l’éducation et la formation sont directement liées à la capacité non seulement de créer une entreprise, mais de la faire croître » (GEM, 2003, p. 33). Les institutions d’enseignement, à tous les niveaux, et les programmes de formation (incluant la formation continue en entreprise et hors entreprise) ont un rôle crucial à jouer sur ce plan. Toutefois, il est généralement admis que, même en ce qui concerne la formation initiale, on aurait tort de limiter ce type d’éducation aux seuls enseignants. On peut y associer aussi les autorités locales, les associations de quartier, le milieu des affaires, etc. Bref, si l’un des objectifs de l’éducation à l’esprit d’entreprise est le développement local, il va de soi que des partenariats entre les différents acteurs locaux seraient bénéfiques.

Au Québec, où plus de la moitié des jeunes de moins de 35 ans n’ont pas confiance en leurs capacités et compétences et ne croient pas avoir le bagage nécessaire pour créer une entreprise, l’éducation et la formation à l’entrepreneuriat jouent un rôle capital. En effet, dans le GEM 2004, seulement 46,8 % des jeunes affirmaient avoir confiance en eux à cet égard, comparativement à 55,7 % chez les personnes de plus de 35 ans. Si cet écart peut sembler normal, au regard de l’expérience acquise à la faveur d’une vie professionnelle plus longue, l’écart entre le Québec et le ROC est plus inquiétant, surtout qu’il se manifeste dans tous les groupes d’âge observés. Ainsi, dans le ROC, les jeunes de moins de 35 ans ont confiance en leurs capacités d’entrepreneur dans une proportion de 56,2 %, comparativement à 64,5 % chez leurs aînés (Riverin et Jean, 2004, p. 8).

Graphique 4-1 : Confiance des jeunes en leurs capacités et compétences

En règle générale, les entrepreneurs connaissent bien le produit ou le service à la base de leur projet d’entreprise. Ils se lancent souvent en affaires dans un domaine où ils ont une formation ou une expertise. Toutefois, ils ne possèdent pas toujours les compétences nécessaires dans des domaines essentiels à la réussite d’un projet d’entrepreneuriat, notamment la comptabilité, la gestion et le marketing. De plus, plusieurs programmes et mesures offrant de la formation (notamment les mesures d’Emploi-Québec) sont liés à des projets visant l’acquisition d’expérience, mais ne prévoient pas nécessairement un accompagnement lors de la création d’une nouvelle entreprise.

En ce sens, deux éléments nous apparaissent particulièrement importants. En premier lieu, on constate que le développement des aptitudes entrepreneuriales se fait mieux sur le long terme. On peut donc penser qu’une attention particulière devrait être accordée à l’intégration de ce type d’apprentissage dans la formation initiale des individus. Il ne s’agit pas de faire de tous les écoliers des entrepreneurs, encore moins de faire la promotion d’une manière de penser privilégiant un modèle économique ou social par rapport à un autre. L’intérêt se situe plutôt sur le plan du développement de certaines compétences et aptitudes essentielles à la réussite d’une carrière d’entrepreneur, mais très utiles aussi pour mieux réussir dans le monde du travail salarié.

Le Défi de l’entrepreneuriat jeunesse contient plusieurs mesures en ce sens qui ont été implantées ou qui sont en cours d’implantation. La plupart de celles-ci sont placées sous la responsabilité du MELS.

Tableau 4-2 : Objectifs et mesures en éducation à l’entrepreneuriat du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse

Par ailleurs, il faut répondre le mieux possible aux besoins de formation des entrepreneurs souhaitant créer une entreprise à court terme ou devenir dirigeants de l’entreprise où ils travaillent. À ce titre, l’étude de Borges, Simard et Filion (2005a) affichait le constat, à prime abord étonnant, que très peu d’entrepreneurs (à peine un cinquième33) avaient suivi une formation sur la création d’entreprises (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 31). Une autre étude (Gasse, Diochon et Menzies, 2004) parle plutôt de 40 %. « Il ressort clairement de cette étude que les entrepreneurs ont davantage besoin de formations qui les préparent à créer et gérer une petite entreprise. Ils ont besoin d’accompagnement à toutes les étapes du processus de création de leur entreprise. Alors qu’ils trouvent appui et conseils pour effectuer les démarches initiales, les entrepreneurs ont dit manquer du suivi qui les aiderait à poursuivre plus sûrement les étapes plus difficiles du démarrage et des opérations » (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 44).

Il existe pourtant un nombre très élevé de programmes et de services de formation offerts soit par les gouvernements fédéral et provincial (souvent par l’entremise des CLD, des SAJE ou d’autres organismes externes), soit par des gens ou des organismes du milieu de l’entrepreneuriat. Les Services d’aide aux entreprises (SAE) des commissions scolaires offrent une gamme étendue de formations de démarrage (Attestations de spécialisation professionnelle Lancement d’une entreprise) dans les différentes régions du Québec. Ils offrent aussi, dans certaines régions, des formations de postdémarrage. La nature et l’accessibilité de ces formations varient de façon importante d’une région à l’autre. Plusieurs cégeps et collèges délivrent des attestations d’études collégiales sur le démarrage d’entreprise. Les universités offrent aussi de la formation continue dans ce domaine, notamment l’Université de Sherbrooke (formation continue en gestion du Centre d’entreprises) et l’Université Laval (ateliers de perfectionnement du service Entrepreneuriat Laval), et la TELUQ propose un programme de formation en entrepreneuriat. Enfin, e-formation offre un programme de formation professionnelle par Internet intitulé « Lancement d’une entreprise ».

Les universités jouent également un rôle de promotion de l’entrepreneuriat et de formation directement auprès des étudiants. Le Profil entrepreneurial de l’Université Laval en est un exemple. Son objectif est de soutenir les étudiants dans le développement de leurs compétences entrepreneuriales à travers une démarche structurée où ils sont appelés à prendre des initiatives, à élaborer des projets et à les gérer. Toutefois, des améliorations peuvent encore être apportées au modèle. Borges, Simard et Filion (2005a), par exemple, soulignent l’importance de prendre en compte ’ensemble du processus de création d’une entreprise et de renforcer l’enseignement des compétences techniques (analyse de marché, plan d’affaires, marketing) en enseignant parallèlement un certain type d’attitude, notamment le réseautage. Les étudiants universitaires devraient en outre être rapidement mis en contact avec des PME et des entrepreneurs et être sensibilisés à l’importance d’établir ce genre de relations.
Il y a aussi un effort à faire en ce qui a trait à la promotion des centres d’entrepreneuriat universitaires. Bien que la moitié des étudiants universitaires envisagent de se lancer en affaires, plus de 70 % d’entre eux ne connaissent pas le centre d’entrepreneuriat de leur université et n’ont aucune idée des services qui y sont offerts. Il serait intéressant de se pencher sur le type de collaboration qui pourrait être mise en place entre Emploi- Québec et les centres d’entrepreneuriat universitaires. Emploi-Québec pourrait certes contribuer au financement de tels centres, dans le but avoué d’intervenir sur l’employabilité et l’insertion en emploi des jeunes diplômés universitaires. Une collaboration pourrait également être envisagée avec le Secrétariat à la jeunesse, par l’entremise du Défi de l’entrepreneuriat jeunesse.

Recommandation 5 : Que les universités augmentent leurs efforts de promotion de l’entrepreneuriat auprès des étudiants, notamment par l’entremise de leur Centre d’entrepreneuriat.

Le Défi de l’entrepreneuriat jeunesse reconnaît l’importance du réseautage d’entreprises et consacre 170 000 $ sur trois ans à sa promotion auprès des jeunes entrepreneurs, notamment par l’« organisation de sessions de sensibilisation au réseautage » (SAJ, 2004, p. 40).

Certains organismes s’adressent à des clientèles spécifiques, notamment les femmes. C’est le cas du Centre d’entrepreneuriat féminin du Réseau des femmes d’affaires du Québec, lequel offre aux femmes de l’accompagnement individuel en entreprise et des programmes de formation continue comme « Femmes vers le sommet ». D’autres enfin s’attachent plutôt à la formation de gestionnaires et d’entrepreneurs de secteurs spécifiques, comme la restauration, le tourisme, etc.

De son côté, Emploi-Québec offre, en plus des mesures comme Jeunes volontaires ou Soutien au travail autonome, des formations en gestion pour les personnes déjà en entreprise.

On le voit, les programmes de formation en entrepreneuriat sont nombreux et diversifiés. Cette situation crée parfois une certaine confusion, en plus de faire augmenter les coûts liés à de telles pratiques. Selon l’OCDE, une meilleure éducation à l’entrepreneuriat dans la formation initiale diminuerait le recours aux formations publiques et privées remédiant aux lacunes du système scolaire dans ce domaine. « Ceci permettra à la fois de rationaliser le dispositif et de réaliser des économies appréciables qui compenseront, au moins partiellement, les coûts de la généralisation de la formation à l’entreprenariat » (OCDE, 2001, p. 87). L’OCDE va même plus loin, affirmant que les sommes investies dans la formation pourraient, si l’on améliorait la formation à l’entrepreneuriat dans la formation initiale (notamment dans les dernières années des études universitaires), « être consacrées à l’assistance financière ou logistique aux jeunes entrepreneurs » (OCDE, 2001, p. 93).

b. Soutien financier

Le soutien financier est un aspect essentiel du démarrage d’une nouvelle entreprise. Les besoins sont importants en raison des dépenses liées au démarrage, et les revenus, en particulier dans les deux premières années, ne sont généralement pas très élevés. L’OCDE souligne toutefois que, « comparées à des entreprises déjà établies, les PME qui démarrent sont celles qui ont le plus de mal à obtenir un financement » (OCDE, 2005, p. 223). Les analystes du GEM considèrent d’ailleurs le manque d’accès au capital de risque comme l’un des plus grands obstacles à l’entrepreneuriat. On entend, par soutien financier, « la disponibilité des ressources financières, des capitaux propres et la capacité d’emprunter pour les nouvelles firmes et les firmes en croissance, en incluant les bourses et les subventions. La performance des nouvelles entreprises est largement dépendante d’un financement adéquat » (GEM, 2003, p. 30).

Les nouveaux entrepreneurs interrogés dans le cadre de l’étude de Borges, Simard et Filion (2005a) confirment la difficulté continuelle d’avoir accès à du financement. « Malgré la présence des CLD, les entrepreneurs soulignent l’absence d’un véritable “guichet unique” pour le financement ; le financement est encore plus difficile à obtenir lors d’une deuxième demande pour améliorer les opérations et assurer la croissance ; il y a absence quasi totale de financement d’activités spécifiques, telles que le marketing et le développement de produits » (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 35). Certains entrepreneurs déplorent aussi un manque de transparence quant aux raisons des refus et évoquent un certain arbitraire à cet égard. Quant à l’OCDE, elle fait remarquer que les besoins financiers de certains types spécifiques d’entreprises sont plus difficilement satisfaits : « Il existe encore pour les PME des besoins de financement qui ne sont pas couverts, en particulier dans le cas des jeunes pousses, des entreprises à forte intensité de recherche et des entreprises exportatrices » (OCDE, 2005, p. 223).

Les nouveaux entrepreneurs éprouvent deux types de difficultés : celles qui sont liées à la taille de leur entreprise et celles qui se rapportent à leur relative inexpérience [33]. Ces difficultés se résument à ce qui suit :

• Un haut niveau de risque perçu, compte tenu du taux élevé de mortalité des nouvelles entreprises et de leur vulnérabilité générale aux conditions défavorables du marché ;
• L’absence d’antécédents, en ce qui concerne les nouvelles entreprises ; • L’incapacité de certaines petites entreprises à fournir des garanties (soit parce que les garanties exigées sont de type personnel, soit parce que certaines nouvelles technologies sont plutôt immatérielles et peuvent difficilement servir
de garanties) ;
• Les coûts élevés des transactions bancaires par rapport aux montants prêtés ; • Des lacunes dans la connaissance de la comptabilité et des règles de
présentation d’un bon plan d’affaires ou d’une demande de prêt ;
• Le risque lié à l’insuffisance de liquidités, en raison d’une mauvaise gestion
financière, d’une croissance trop rapide ou d’un trop petit nombre de produits.

Dans le cas des jeunes plus précisément, les difficultés sont accentuées par l’âge. L’OCDE souligne que « l’accès des jeunes entrepreneurs aux capitaux est tout aussi important que celui de l’offre de capitaux elle-même. Il peut constituer un énorme obstacle à la création d’entreprises, même dans les pays riches dont l’économie est en plein essor » (OCDE, 2001, p. 45). Selon l’OCDE, les deux principales raisons expliquant cette difficulté sont :

  • Les banques et autres prêteurs ou investisseurs peuvent partager les préjugés généralement répandus dans la société et douter de l’aptitude des jeunes à réussir dans la création d’une entreprise ;
  • Bon nombre des dispositifs publics et privés qui ont été instaurés dans l’ensemble de la zone de l’OCDE pour favoriser la création d’entreprises par des jeunes font systématiquement dépendre de l’aptitude de ces derniers à élaborer un bon plan d’affaires l’accès à d’autres formes d’aide au démarrage (c’est le cas, par exemple, de la mesure STA au Québec).

Ces difficultés semblent se confirmer au regard de l’Enquête sur le financement des petites et moyennes entreprises de Statistique Canada. Cette étude révèle que les jeunes entrepreneurs (25-34 ans) sont plus nombreux que leurs aînés à considérer l’accès au financement comme un obstacle important. Leur taux de demande de financement serait plus élevé, tout comme le nombre de refus. Conséquemment, ils auraient plus souvent recours aux formes informelles de financement (famille, amis, etc.) [34]. Ils sont aussi plus nombreux à être prêts à partager leurs capitaux propres (actions) que leurs aînés.

Tableau 4-3 : Taux de demande de financement et taux d’approbation, Canada, 2000

Quant à l’intervention de l’État dans le financement des nouvelles entreprises, il faut comprendre dans quel contexte elle se produit. D’une part, l’État doit nécessairement faire des choix, c’est-à-dire déterminer quelles sommes il consacrera au soutien des entreprises établies et en expansion, et quelles sommes il investira dans la création d’entreprises. D’autre part, l’État semble inscrire très souvent la création d’entreprises dans une perspective de création d’emplois, voire, comme dans le cas d’Emploi- Québec, sous l’angle de la réinsertion dans le marché du travail.

La Fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI) donne un aperçu de l’environnement financier dans lequel évoluent les PME canadiennes, en se basant sur un sondage effectué auprès de 9 565 entreprises. « Les marges de crédit et les prêts aux entreprises sont de loin les deux principales sources de financement par emprunt des petites entreprises. Les hypothèques commerciales et personnelles, les prêts personnels, les crédits fournisseurs et les cartes de crédit sont utilisés par une entreprise sur quatre. Un entrepreneur sur neuf contracte un emprunt auprès de sa famille ou d’amis » (FCEI, 2004, p. 7). La FCEI note aussi que les prêts aux grandes entreprises se maintiennent alors que les prêts aux PME stagnent ou reculent.

Graphique 4-2 : Type de financement des PME

Une récente étude réalisée auprès d’entrepreneurs nous donne une idée plus précise de ce que représente la mobilisation des ressources financières pour un nouvel entrepreneur. On y constate que la plupart des mises de fonds totales pour la création d’une entreprise ont été inférieures à 100 000 $ (51 %). L’étude nous permet aussi de percevoir des différences significatives entre les différents secteurs. Ainsi, la plupart des entreprises ayant nécessité une mise de fonds très importante (plus d’un million de dollars) appartenaient au secteur des technologies (dans lequel les jeunes sont très présents), alors que dans le secteur des services, par exemple, plus du tiers des entreprises avaient nécessité une mise de fonds égale ou inférieure à 25 000 $. Les entrepreneurs ont eu besoin d’une période de 98 jours, en moyenne, pour réunir le capital nécessaire au démarrage de leur entreprise. Ici encore, les entreprises technologiques se démarquent, leurs initiateurs ayant eu besoin, en moyenne, de 130 jours pour réunir ce capital. Soulignons également que 87 % d’entre eux avaient un partenaire financier, généralement parmi les organismes gouvernementaux.

Tableau 4-4 : Mise totale de fonds, par secteur

Le tableau suivant indique clairement l’importance des mises de fonds personnelles, lesquelles dépassent 10 000 $ dans la majorité des cas, et 50 000 $ pour plus du quart des entrepreneurs (29 %). Selon les chercheurs, « environ 80 % du financement de la majorité des créateurs d’entreprises viennent d’eux-mêmes selon les recherches. Ces recherches indiquent que, dans la majorité des cas, c’est l’entrepreneur lui-même, suivi de sa famille et de ses amis, qui sont à l’origine du financement de l’entreprise et que la participation du financement public ou privé est faible » (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 18).

Tableau 4-5 : Origine des fonds et type de partenaires

Très souvent, la durée de l’aide de démarrage pose problème. Comme le terme l’indique, cette aide « de démarrage » est rarement reconduite dans la deuxième année de fonctionnement de l’entreprise. La situation n’est pas propre au Québec ou au Canada, puisqu’elle touche l’ensemble des pays de l’OCDE. On peut supposer qu’il y a là une volonté de miser d’abord et avant tout sur la création d’emploi à court terme ou sur la réinsertion en emploi comme solution au chômage chez les jeunes. Dans la mesure STA, par exemple, lorsque l’entreprise est mise en route et que le jeune n’est plus sous la responsabilité d’Emploi-Québec, le soutien au revenu cesse, et même l’aide promise par les CLD pour la deuxième année d’opération est plutôt d’ordre technique. Pareille approche peut se révéler contre-productive : « C’est pourtant quand elles sont sorties de la phase difficile de leur mise en route et qu’elles commencent à croître et à recruter que le potentiel de création d’emplois des nouvelles entreprises peut en fait se révéler de la façon la plus nette. Par conséquent, s’agissant de l’action gouvernementale, l’absence de dispositifs visant à promouvoir le développement et l’expansion des entreprises dirigées par des jeunes est sans doute à l’origine d’un important manque à gagner » (OCDE, 2001, p. 46).

Afin de limiter l’impact négatif de l’interruption trop rapide de l’aide financière liée à la mesure STA, il serait intéressant d’étudier la possibilité de prévoir une période de financement supplémentaire. Ce financement ne serait pas nécessairement automatiquement accordé à tous. Il ne s’agit pas, en effet, de simplement allonger la période de financement comprise dans la mesure, mais de s’assurer d’éviter la mort de projets viables en raison d’une rigidité administrative. Il serait donc plutôt question d’une « possibilité d’allongement de la période de soutien financier ». La période actuelle de 52 semaines (qui inclut la phase préparatoire) pourrait être allongée de 26 semaines, ce qui correspond à six mois supplémentaires. Elle passerait donc à un maximum de 78 semaines. De plus, cette aide pourrait être pondérée selon les besoins réels du demandeur. Cette pondération pourrait moduler le montant par semaine ou le nombre de semaines supplémentaires accordées. D’une part, cela éviterait que des individus reçoivent une aide dont ils n’ont pas réellement besoin ou qu’ils pourraient facilement obtenir autrement, et, d’autre part, cela diminuerait le risque que de bons projets meurent en raison d’un léger manque de financement à un moment crucial.

Recommandation 6 : Qu’Emploi-Québec étudie la possibilité de permettre une extension maximale de 26 semaines du financement d’un projet STA, en pondérant l’aide supplémentaire en fonction des besoins réels du projet.

Recommandation 7 : Sensibiliser les banques à l’importance d’adapter leurs critères de solvabilité pour ne pas pénaliser injustement les jeunes entrepreneurs.

Recommandation 8 : Adopter des mesures incitatives pour encourager les banques et autres prêteurs à financer les microentreprises et les jeunes entrepreneurs.

Recommandation 9 : Qu’Emploi-Québec participe à la mise sur pied de formations sur le métier d’entrepreneur mettant l’accent sur le financement de nouvelles entreprises, afin de promouvoir la diversification des sources de financement et le recours à des sources de financement non bancaires.

Notons, en terminant, que le gouvernement québécois a inclus, dans le Défi de l’entrepreneuriat jeunesse (SAJ, 2004, p. 40), une aide technique spécialisée pour la réalisation de projets jeunesse de microcrédit (1 012 500 $). Pour les jeunes entrepreneurs des régions, on pourrait aussi penser à étendre aux travailleurs autonomes créant leur entreprise dans les deux ans suivant la fin de leurs études le crédit d’impôt pour nouveau diplômé travaillant dans une région ressource éloignée. Ce dernier donne droit à une déduction de 40 % du salaire, jusqu’à un maximum de 8 000 $ par année. Ce crédit pourrait être appliqué sur leurs revenus, dans le cas des travailleurs autonomes, ou sur le salaire que les nouveaux entrepreneurs se versent.

Recommandation 10 : Étudier la possibilité d’étendre l’admissibilité du crédit d’impôt pour nouveau diplômé travaillant dans une région ressource éloignée aux travailleurs autonomes et aux jeunes entrepreneurs.

c. Soutien logistique

« Les ressources financières ne sont pas le seul type de ressources dont un entrepreneur a besoin pour créer une entreprise. Il a également besoin de ressources technologiques, de ressources de la région (telles que les infrastructures routières ou de télécommunications, sans négliger les matières premières), de connaissances, de ressources humaines, de son réseau de relations et de sa réputation » (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 37).

Au Québec, selon Borges, Simard et Filion (2005a), outre l’aide informelle (collègues ou ex-collègues, amis, famille, etc.), les CLD seraient les organismes les plus utilisés en cas de besoin d’aide externe dans un processus de création ou de pérennisation d’entreprise. Il est aussi intéressant de constater que le degré de satisfaction envers les organismes locaux ou gouvernementaux tend à être plus fort dans les phases de préparation et de démarrage que lorsque l’entreprise est en activité, et que c’est l’inverse dans le cas des consultants ou des firmes privées.

L’accès aux locaux peut constituer un problème pour les nouvelles entreprises issues d’un milieu économique défavorisé en raison d’un manque de partenaires locataires et d’occasions plus rentables pour les investisseurs. La situation n’est toutefois pas nécessairement plus aisée dans un milieu économiquement très dynamique : « Les petites entreprises nouvelles peuvent aussi avoir de graves difficultés à trouver des locaux lorsque le marché immobilier est dynamique, car l’immobilier à usage de bureaux et/ou d’habitations est plus rentable pour les investisseurs » (OCDE, 2003, p. 112).

Ainsi, les investisseurs immobiliers se méfient des nouvelles entreprises et leur imposent des conditions trop difficiles à remplir. Il faut tout de même noter que, selon le rapport du GEM 2003, l’accès aux infrastructures physiques est loin de constituer un problème majeur au Canada : « Le développement de l’infrastructure physique au Canada est satisfaisant au point où pratiquement aucun expert n’en a parlé. Seulement 2 % ont mentionné qu’elle pouvait être un obstacle et aucun ne l’a mentionnée comme apport positif. Mieux encore, aucun expert ne considère qu’il s’agit là d’un secteur ayant besoin d’amélioration » (GEM, 2003, p. 36). Toutefois, il peut manquer de lieux d’incubation visant directement à faciliter la création d’entreprises, par exemple par des incitatifs liés aux coûts du loyer ou encore par le regroupement de plusieurs entreprises dans un endroit doté de services professionnels (comptabilité, marketing, etc.) peu onéreux par rapport au marché.

Le soutien logistique pourrait aussi prendre la forme d’un apprentissage du réseautage, voire d’une incitation à créer une entreprise en équipe. Dans l’étude de Borges, Simard et Filion (2005a), plus des trois quarts des nouvelles entreprises ont été créées en équipe, ce qui a engendré des difficultés auxquelles les entrepreneurs n’avaient pas pensé au départ, comme le procédé pour choisir un associé et l’organisation de l’équipe entrepreneuriale (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 20).

Un autre aspect souvent négligé du soutien logistique concerne l’appui offert au cours de la période de réflexion. Plutôt que d’être limité à une aide technique, par exemple la rédaction du plan d’affaires ou la recherche de financement, ce soutien pourrait prendre la forme d’une participation au mûrissement du projet. La présence dans les organismes de soutien de personnes ayant déjà mis sur pied une entreprise serait certes profitable à cet égard. Or, plusieurs nouveaux entrepreneurs ayant eu recours aux services des organismes de soutien ont déploré le manque de personnel ayant vécu une expérience réelle de création d’entreprise, ce qui leur donne l’impression que leurs besoins concrets sont souvent mal compris (Borges Simard et Filion, 2005a, p. 35).

Par ailleurs, des entrepreneurs gagneraient à être aidés par des spécialistes dans certains domaines. On pense notamment aux PME technologiques ayant besoin d’appui en R-D, ou encore aux PME souhaitant se lancer dans l’exportation (Borges, Simard et Filion, 2005a, p. 35). Il serait intéressant d’offrir davantage de services spécialisés dans ces secteurs spécifiques, ou d’ouvrir des centres à cette fin.

5. EMPLOI-QUÉBEC ET LES JEUNES ENTREPRENEURS

a. Jeunes volontaires

La mesure Jeunes volontaires ne vise pas spécifiquement, au contraire de la mesure Soutien au travail autonome (STA) que nous verrons dans la partie suivante, la création d’entreprises. Il s’agit plutôt d’un projet de préparation à l’emploi (PPE) qui s’adresse aux jeunes adultes de 16 à 29 ans éprouvant des difficultés d’insertion sociale et professionnelle. Les projets « visent à permettre à des jeunes adultes de définir leur propre projet afin d’acquérir, de vérifier ou de développer des compétences contribuant à leur insertion sociale et professionnelle » (Emploi-Québec, 2006a, p. 4). Les projets liés aux arts y sont particulièrement nombreux. En ce qui concerne plus spécifiquement la création d’entreprises, une récente évaluation de la mesure signale l’existence de certains projets de « prédémarrage d’entreprise (développement de produit, analyse de marché) dans les domaines les plus variés (informatique, horticulture, recyclage, écologie, mode, loisirs) » (Vanasse, 2004, p. 26).

Un regard sur le profil des participants nous aidera à mieux comprendre la nature de cette mesure. En fait, on pourrait généralement classer les participants dans deux profils bien distincts [35] :

• Jeune décrocheur, prestataire de la sécurité du revenu ou sans soutien public du revenu, sans véritable expérience de travail, démontrant des comportements et des attitudes peu compatibles avec le marché du travail ;
• Diplômé du cégep ou de l’université, sans soutien public du revenu, ayant peu d’expérience de travail dans son domaine (souvent les arts, la culture, les communications ou les TIC). Défavorisé surtout par rapport à un domaine professionnel difficile à intégrer ou par rapport à un marché de travail local ou régional restreint.

Les objectifs particuliers de cette mesure consistent à :

• Permettre à ces jeunes adultes, dans le cadre d’un projet qu’ils définissent eux- mêmes, d’acquérir, de vérifier et de développer des compétences contribuant à leur insertion personnelle, sociale et professionnelle ;
• Aider et stimuler ces jeunes à se prendre en charge, afin qu’ils puissent faire valoir leurs initiatives et leur créativité dans leur localité. À ce titre, les projets Jeunes volontaires contribuent à développer leur autonomie sociale et professionnelle ;
• Inciter les jeunes adultes à s’associer aux personnes-ressources du milieu à titre de partenaires dans la réalisation de projets. Ce faisant, l’approche favorise le rayonnement et la reconnaissance de l’apport des jeunes à la collectivité.

La mesure Jeunes volontaire est perçue par certains comme constituant une préparation intéressante à une éventuelle participation à la mesure STA ou à la création d’une entreprise. « Il n’est pas toujours possible pour les jeunes de lancer directement une affaire car ils doivent explorer d’abord leur motivation et leur détermination, tester leurs idées et développer les connaissances nécessaires. De plus, le caractère exploratoire de Jeunes volontaires en fait une mesure à laquelle l’idée d’échec n’est pas associée » (Vanasse, 2004, p. 49). C’est sous cet angle que nous la considérons ici, en nous basant principalement sur l’évaluation effectuée par la Direction de l’évaluation du défunt MESSF [36].

La mesure Jeunes volontaires est unique dans le coffre à outils d’Emploi-Québec, tant par sa nature que par sa structure d’application. Les relations avec de nombreux intervenants externes, notamment au sein des comités-conseils et des organismes associés, permettent de constituer, dans le milieu, « un bassin de personnes et d’organismes intéressés à aider les jeunes et à contribuer à la relève dans leur domaine » (Vanasse, 2004, p. 48). Dans le cas où les projets sont liés à l’entrepreneuriat, on peut donc penser que cette mesure contribue à améliorer la culture entrepreneuriale du milieu et à convaincre les jeunes qu’il est possible de réussir dans leur projet de créer une entreprise, notamment en bénéficiant de l’appui disponible.

L’évaluation mentionne quatre forces de la mesure :

  • La souplesse, la polyvalence et la simplicité d’application ;
  • Le respect des idées des jeunes ;
  • La structure d’application ;
  • Le caractère exploratoire.

Toutefois, de nombreuses difficultés viennent compliquer l’application de la mesure, mettant même son existence en péril. Nous en retiendrons quatre, qui nous semblent particulièrement problématiques en ce qui concerne les projets liés au prédémarrage d’entreprises.

Insuffisance du soutien du revenu

Le soutien du revenu n’est pas déterminé en fonction de la nature du projet ou du degré d’engagement de son initiateur, mais plutôt en fonction du statut du participant. Ainsi, les bénéficiaires de l’assurance-chômage sont les mieux « rémunérés », suivi des prestataires de l’assistance-emploi. Les plus défavorisés demeurent, comme nous l’avons souligné dans de nombreux avis précédents, les jeunes sans soutien public du revenu, souvent des « sans-chèque ».

Cette déficience sur le plan du soutien du revenu découragerait relativement peu de personnes de participer (quoi que l’on peut penser que les « sans-chèque » seront réticents à s’engager dans un projet occupant la majeure partie de leur temps mais ne leur procurant aucun revenu). Toutefois, elle est responsable de l’interruption de certains projets en raison de l’épuisement des participants ou du tarissement de leurs ressources financières. Les participants sans soutien public du revenu, en particulier, travaillent généralement à temps partiel pour subvenir à leurs besoins, alors même qu’ils doivent consacrer au minimum vingt heures par semaine à leur projet Jeunes volontaires (la plupart y consacrerait, dans les faits, beaucoup plus de temps). Dans les projets réalisés en groupe, les participants, malgré un investissement personnel similaire dans le projet, ont des revenus différents, ce qu’ils comprennent difficilement.

Recommandation 11 : Qu’Emploi-Québec étudie la possibilité d’offrir le salaire minimum à tous les participants à la mesure Jeunes volontaires, ou de fixer un seuil minimal d’allocation pour tous les participants, peu importe leur statut.

Insuffisance des frais de fonctionnement et contraintes budgétaires

Les participants à la mesure Jeunes volontaires devraient concentrer leurs énergies sur la réussite de leur projet et sur les apprentissages qui en découlent. Or, ce n’est pas toujours possible. Les frais de fonctionnement, en raison de diverses contraintes budgétaires, ne couvrent pas toujours les frais réels du projet, malgré l’engagement pris à cet égard par Emploi-Québec envers les participants. Cette situation « force les participants à chercher du financement externe et risque de mettre à mal la réalisation du projet lui-même » (Vanasse, 2004, p. 49-50).

Les contraintes budgétaires étirent aussi indûment les délais de réponse dans certaines régions (parfois quatre ou cinq mois), ce qui a un effet démobilisateur sur les participants. Des projets valables ne sont pas subventionnés, un refus difficile à digérer pour des jeunes qu’Emploi-Québec est supposé aider et motiver.


Recommandation 12 : Qu’Emploi-Québec et ses partenaires calculent les frais de fonctionnement alloués à un projet Jeunes volontaires en fonction de sa nature et de ses besoins réels.

Recommandation 13 : Qu’Emploi-Québec et ses partenaires étudient la possibilité d’augmenter les frais de fonctionnement pour un projet Jeunes volontaires individuel.

Recommandation 14 : Qu’Emploi-Québec et ses partenaires répondent aux demandes de projet Jeunes volontaires dans un délai raisonnable.

Suivi inadéquat

Le suivi offert aux participants est un aspect crucial de ce type de projet. Or, un manque de moyens rend difficile l’organisation d’un suivi adéquat.

Ce suivi relève principalement des agents de programme ou des responsables locaux. Ceux-ci se demandent parfois « s’ils ont les connaissances et les compétences requises pour bien faire le suivi de projets parfois assez pointus » (Vanasse, 2004, p. 41). Le manque de temps et de personnel est comblé de diverses façons. Dans certaines régions, la responsabilité du suivi est cédée à des organismes externes. Dans la plupart des régions, le suivi sur le terrain, prévu dans le Guide d’interprétation, est carrément abandonné. Il en va de même pour la relance post-participation, qui ne se fait pas dans toutes les régions.

Recommandation 15 : Qu’Emploi-Québec assure un financement de la mesure Jeunes volontaires permettant d’accepter tous les projets qui le méritent.

Recommandation 16 : Qu’Emploi-Québec assure un financement de Jeunes volontaires permettant d’appliquer cette mesure de la manière prescrite dans le Guide d’interprétation.

Recommandation 17 : Qu’Emploi-Québec assure une formation adéquate des responsables du suivi des projets mis sur pied dans le cadre de la mesure Jeunes volontaires, afin qu’ils soient en mesure de fournir un encadrement de qualité.

Positionnement de la mesure

Lors de l’évaluation de la mesure, plusieurs ont suggéré que celle-ci ne soit plus une PPE et qu’on l’ouvre à des personnes plus proches de l’emploi (Vanasse, 2004, p. 51). Sans en faire une recommandation comme telle, on peut se demander si un tel changement rendrait la mesure plus facilement utilisable par les jeunes qui souhaitent se lancer en affaires dans des projets différents de ceux généralement admis dans la mesure STA (notamment des projets artistiques ou sociaux).

b. Soutien au travail autonome (STA)

La mesure Soutien au travail autonome (STA) est la mesure d’Emploi-Québec qui retient principalement notre attention dans ce document. En 2004-2005, les nouveaux participants à cette mesure représentaient 0,8 % de l’ensemble des nouveaux participants à une mesure d’Emploi-Québec (Emploi-Québec, 2005, p. 3). Nous traiterons dans cette partie de la nature de cette mesure (objectifs, description, admissibilité), de ses impacts et de certaines de ses carences. Le principal impact que nous aborderons ici est celui qui touche la création d’entreprises et la réussite des nouveaux entrepreneurs, notamment l’amélioration des compétences entrepreneuriales des participants. Nous nous concentrerons surtout sur les données concernant les jeunes de moins de 30 ans [37]. Les questions relatives aux ententes négociées entre les CLE et les CLD, de même que les disparités régionales, seront traitées dans la section suivante.

La mesure STA « vise à fournir de l’aide sous forme d’encadrement, de conseils techniques et de soutien financier aux personnes admissibles afin qu’elles atteignent l’autonomie sur le marché du travail en créant ou en développant une entreprise ou en devenant travailleur autonome » (Emploi-Québec, 2006b, p. 4). Plus précisément, les objectifs de cette mesure, selon le Guide d’interprétation de la mesure de 2006, sont les suivants :

  • Soutenir les individus admissibles, aptes à mettre en œuvre un projet viable d’entreprise ;
  • Favoriser la création d’emplois par la création d’entreprises ;
  • Offrir aux travailleurs autonomes prestataires de l’assistance-emploi la possibilité de consolider leur activité d’entreprise ou de travailleur autonome ;
  • Diversifier les économies locales dans un contexte de développement économique stratégique ;
  • Aider les individus à retrouver leur autonomie financière.

Les critères d’admissibilité sont généralement les mêmes que ceux des autres mesures de l’axe « création d’emplois » d’Emploi-Québec. Les personnes admissibles font donc partie de l’une ou l’autre des catégories suivantes :

• Prestataires de l’assurance-emploi ;
• Prestataires de l’assistance-emploi ;
• Personnes « sans soutien public du revenu » (ces dernières n’ont toutefois pas
accès aux allocations d’aide à l’emploi, ce qui limite sérieusement leur
participation et leur réussite) ;
• Travailleurs à statut précaire ;
• Participants au Programme de soutien pour les travailleurs licenciés
collectivement dans les régions ressources ;
• Participants de Solidarité jeunesse.

S’ajoutent à ces critères des considérations liées davantage à la nature du projet. Ainsi, le candidat doit faire la preuve, lors d’une évaluation, qu’il possède le profil d’entrepreneur et il doit manifester une réelle motivation à devenir entrepreneur. Il doit, de plus, posséder une expérience ou des compétences en lien avec le projet. Cela signifie, au dire des évaluateurs de la mesure, que dans ce type de mesure « la population cible est restreinte » (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 101). Les participants admis (en particulier les prestataires de l’assistance-emploi) ont généralement des compétences supérieures à celles des personnes qui ne sont pas admises (notamment sur le plan de la scolarité et de l’expérience de travail). Cette affirmation semble se vérifier à la lumière de l’évaluation de la mesure STA. Chez les jeunes participants de moins de 30 ans, près de six individus sur dix obtenaient de très forts scores à l’indice d’entrepreneuriat. Une proportion semblable avait une formation ou une expérience en gestion. Enfin, plus de deux sur dix avaient dirigé leur propre entreprise dans l’année précédant la participation.

Tableau 5-1 : Profil entrepreneurial des jeunes participants (moins de 30 ans) à la mesure STA

Le candidat doit également pouvoir contribuer lui-même au projet, à hauteur de 15 % de l’allocation qui lui est versée. Cette contribution n’est pas obligatoirement financière ; elle peut être faite sous forme de biens (meubles, outillage, locaux, équipement, etc.).

Une autre restriction à l’admissibilité concerne plutôt le projet d’affaires. Les projets portant à controverse ou contraires aux règles d’éthique d’Emploi-Québec ne sont pas admis. On pense notamment aux entreprises à caractère sexuel, religieux ou politique. De la même façon, les franchises et les entreprises faisant exclusivement l’objet d’une consolidation financière sont exclues. Enfin, le travail autonome dédié, c’est-à-dire à clientèle unique, est « considéré comme un emploi converti en travail autonome de sous-traitance » (Emploi-Québec, 2006b, p. 8) et n’est donc pas admis.

Entre juin 2000 et mai 2001, 738 jeunes de moins de 30 ans, soit 449 hommes et 289 femmes, ont terminé une mesure STA entreprise au plus tôt le 1er janvier 1999, soit 24,7 % de l’ensemble des participants (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 6).

Il est intéressant de noter que les projets soumis peuvent appartenir à trois catégories distinctes : le candidat peut créer sa propre entreprise ou devenir travailleur autonome ; il peut aussi consolider son entreprise ou son emploi autonome ; enfin, il peut acheter une entreprise existante. Cette dernière possibilité semble toutefois fort peu connue, et elle est peu exploitée. C’est regrettable, et il conviendrait de travailler à la promotion de ce volet. La mesure STA n’est pas le seul programme de soutien à l’acquisition d’entreprise à souffrir de cette carence promotionnelle. Plusieurs déplorent que le « Volet relève » du Fonds local d’investissement (FLI) ne soit pas davantage connu et utilisé, alors que des sommes intéressantes y sont disponibles. On dit pourtant que la mise sur pied d’une entreprise crée deux emplois, alors que l’acquisition d’une entreprise permet d’en maintenir cinq. Il y a un intérêt certain à améliorer la situation à cet égard, en particulier chez les jeunes.

Recommandation 18 : Qu’Emploi-Québec accentue la promotion de la possibilité d’utiliser la participation à la mesure Soutien au travail autonome pour acheter une entreprise auprès des clientèles visées et auprès des agents des CLE.

Selon l’évaluation de la mesure, la principale porte d’entrée des jeunes vers la mesure STA demeure les CLD (42,1 %), suivis des CLE (19,8 %). À ce titre, les jeunes sont très différents de leurs aînés, lesquels sont séparés beaucoup plus également entre les CLD et les CLE. Notons que seulement 5 % des jeunes participants avaient entendu parler de la mesure par un organisme d’aide ou de promotion de l’entrepreneuriat. La plus grande proportion des jeunes participants souhaitait créer une entreprise (70,7 %). Deux sur dix souhaitaient devenir travailleurs autonomes, et près d’un sur dix souhaitait consolider une entreprise. Par ailleurs, ils participaient surtout à la mesure pour obtenir une aide financière (44,2 %) ou un appui technique (31,7 %). À ce chapitre, toutefois, on observe une différence entre les hommes et les femmes, les premiers étant proportionnellement plus nombreux que les secondes à participer à la mesure STA pour créer ou consolider une entreprise. Conséquemment, ils sont aussi plus nombreux à rechercher une aide financière ou technique.

Tableau 5-2 : Objectif visé par les jeunes participants et raisons de la participation

La mesure comporte trois phases, la phase préparatoire, la phase de démarrage et la phase postdémarrage, et ne peut dépasser 52 semaines. Durant cette période, le participant reçoit un soutien financier et un soutien technique. Ainsi, avant d’amorcer le démarrage de son entreprise, le participant doit préparer un plan d’affaires et le soumettre à un comité composé d’un agent du CLE, d’un agent du CLD et d’un représentant de la communauté d’affaires locale. Nous reviendrons plus loin sur le rôle de ce comité.

À la fin du processus, « la personne qui a complété sa participation sera revue afin d’établir la pertinence de recourir à d’autres mesures si elle n’est pas en mesure de maintenir son entreprise ou d’assurer son autonomie financière comme travailleur autonome » (Emploi-Québec, 2006b, p. 18). Le CLD/coordonnateur offre aussi un suivi dans la deuxième année d’opération de la nouvelle entreprise, afin de consolider les opérations. Selon l’évaluation de la mesure, près de huit jeunes participants sur dix ont complété leur participation, alors que les autres ont décidé d’y mettre un terme (9,6 %) ou n’ont pu poursuivre (13,6 %). Chez les jeunes, l’interruption de la participation est le plus souvent motivée par l’obtention d’un emploi (24,9 %), les problèmes de financement venant au deuxième rang (18,8 %). Trois autres types de raisons sont aussi mentionnés : des raisons liées au projet (rentabilité, plan d’affaires refusé ou problèmes logistiques), qui comptent pour 16,7 % des cas, des raisons personnelles (y compris des problèmes de motivation ou de stress ainsi que les responsabilités familiales), qui représentent 9,3 % des cas, et des problèmes avec les CLD ou d’autres organismes (9,6 %), ou encore avec les partenaires (7,6 %).

Impact de la mesure STA sur les jeunes participants de moins de 30 ans

Plus de huit jeunes sur dix ont obtenu un soutien technique pour la réalisation de leur plan d’affaires, et près de six sur dix en ont bénéficié pour des services comme la comptabilité. Plus de quatre sur dix ont eu droit à des formations d’appoint. Par ailleurs, 65,3 % des participants ont bénéficié d’un suivi dans la phase de démarrage, et 24,6 % en ont bénéficié dans la deuxième année d’activité.

L’évaluation effectuée pour le compte d’Emploi-Québec [38]permet d’avoir un bon aperçu de la satisfaction des jeunes à l’égard de cette mesure. Si, en règle générale, les commentaires sont très positifs, il convient de noter deux points en particulier. D’une part, l’aspect qui a apporté le moins de satisfaction aux jeunes participants est le développement des compétences, dont un quart des participants s’est dit insatisfait. D’autre part, l’évaluation ayant été faite dans le but de mesurer la satisfaction des participants et les impacts de la mesure sur leurs qualifications et leurs conditions de vie et d’emploi, il s’ensuit que les questions touchant l’admissibilité ou l’évaluation du projet d’affaires n’ont pas pu être considérées.

Les personnes insatisfaites auraient généralement souhaité obtenir davantage, quel que soit l’aspect mentionné, « notamment des phases préparatoires et de démarrage plus longues » (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 22).

Tableau 5-3 : Taux de satisfaction des jeunes répondants concernant la mesure

Impact de la mesure STA sur la création d’entreprises
L’impact de la mesure sur la création de microentreprises est notable et les taux de survie sont très intéressants, notamment au regard des taux de survie des nouvelles entreprises présentés plus haut. Chez les jeunes de moins de 30 ans interrogés dans le cadre de l’évaluation, près de 60 % ont créé leur propre entreprise à la suite de leur participation à la mesure, et 14 % ont consolidé leur entreprise.

Tableau 5-4 : Les résultats bruts sur l’insertion en entreprise des participants à la mesure STA, jeunes de moins de 30 ans

Le délai de démarrage des entreprises créées dans le cadre de la mesure est généralement de six mois ou moins (79,6 %). Par ailleurs, 86,5 % de ces entreprises étaient encore en activité après 24 mois (Indicateur A). Même en utilisant un indicateur plus conservateur (Indicateur B), on obtient un taux de survie de 73 % après deux ans, ce qui reste fort appréciable [39].

Tableau 5-5 : Le démarrage et la survie des entreprises des jeunes participants à la mesure STA

D’après l’évaluation, la plupart des entreprises créées par les jeunes n’ont qu’un propriétaire (60,1 %), alors que 32,3 % en ont deux et 7,6 %, plus de deux (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 32). Ces entreprises appartiennent en majorité aux secteurs des services professionnels, scientifiques et techniques (28,9 %). Les secteurs de l’agriculture, de la forêt, de la chasse et de la pêche (14,2 %) ainsi que le secteur de la fabrication (11,7 %) sont aussi assez fortement représentés. Plus de huit entreprises sur dix sont en activité à l’année, alors que les autres sont saisonnières. Un peu plus de quatre entreprises sur dix n’ont aucun employé, près de quatre sur dix en ont entre un et cinq, et près de deux sur dix en comptent six et plus.

Par ailleurs, 19,2 % des participants se sont dits satisfaits des revenus qu’ils tiraient de leur entreprise, alors que 43 % se sont dits simplement satisfaits. En fait, en 2002, les revenus personnels de la moitié des anciens participants à la mesure STA demeuraient inférieurs à 20 000 $ par année.

Graphique 5-1 : Revenus personnels 2002 des anciens participants à la mesure STA

Il est intéressant de mettre ces revenus personnels en perspective en examinant les chiffres d’affaires des entreprises créées par les participants. On constate alors que, chez les jeunes de moins de 30 ans, près de trois entreprises sur dix avaient un chiffre d’affaires de moins de 20 000 $, alors que quatre sur dix affichaient un chiffre d’affaires de 100 000 $ et plus.

Ainsi, l’évaluation de la mesure STA permet de constater un effet généralement positif sur la création d’entreprises et sur leur survie.

Graphique 5-2 : Chiffres d’affaires des entreprises créées par les jeunes participants à la mesure STA

La mesure STA a également un impact positif sur les qualités professionnelles et entrepreneuriales des participants de moins de 30 ans. Toutefois, ses effets positifs sur le revenu sont relativement négligeables. Dans le cas des participants de 30 à
40 ans, elle a même un impact négatif, leurs revenus personnels étant moins élevés que ceux des non-participants. À ce titre, la mesure STA ressemble à d’autres mesures du même type instaurées par le gouvernement canadien ou dans d’autres pays [40]. La comparaison entre les participants et les non-participants à la mesure STA ne montre pas « d’effets probants sur l’amélioration de la rémunération d’emplois entre l’année précédant et celle suivant la participation, et ce, quel que soit le groupe d’âge considéré » (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 83).

c. Administration des programmes d’Emploi-Québec destinés aux jeunes entrepreneurs

L’administration des programmes d’Emploi-Québec destinés aux jeunes entrepreneurs, c’est-à-dire principalement la mesure STA, a retenu notre attention dans le cadre des lectures et des entrevues ayant mené à la rédaction du présent document. Principalement, nous avons relevé des irritants se rapportant à l’accessibilité ainsi qu’aux montants alloués selon les régions.

Une mesure d’employabilité plutôt que d’entrepreneuriabilité

L’un des principaux problèmes de la mesure STA est qu’elle est appliquée comme toute autre mesure axée d’abord et avant tout sur l’employabilité. Derrière le prétexte de la création d’une entreprise ou du recours au travail autonome, l’objectif principal est de sortir l’individu du chômage et de le retourner sur le marché du travail. Bien que louable, cet objectif est trop restreint pour permettre à une mesure comme STA de répondre aux besoins réels des jeunes entrepreneurs.

En ce sens, l’un des problèmes majeurs de la mesure est qu’elle demeure axée sur l’individu, et non sur un projet d’entreprise. En clair, cela signifie qu’une personne à risque de chômage prolongé se voit offrir cette mesure sur une base individuelle. Les services, le soutien du revenu et un éventuel financement ne s’adressent qu’à elle et sont limités de façon stricte à sa conformité aux critères d’admissibilité et à la durée prescrite dans le guide d’application. Or, comme on l’a vu plus haut, un nombre non négligeable de jeunes entrepreneurs lancent des entreprises avec un ou plusieurs partenaires. En 2004, au Québec, 45 % des nouvelles entreprises comptaient plus d’un dirigeant. La mesure STA ne s’adapte pas facilement à ce genre de cas. Le guide d’application de la mesure stipule, quant au projet d’entreprise en association :


Le participant peut présenter un projet en association avec des personnes non admissibles à la mesure. Dans un tel cas, il doit démontrer qu’il exerce le contrôle de l’entreprise. Il doit fournir, en annexe de son plan d’affaires, une description de la répartition de la propriété de l’entreprise ou la convention entre les associés ou les actionnaires.

Dans le cas d’un projet présenté par plusieurs participants à la mesure, les responsabilités à l’égard de l’entreprise doivent être partagées également [41].

Le rôle des CLE et des CLD/coordonnateurs

Le réseau des Centres locaux de développement (CLD) a été mis sur pied par le ministère des Régions à la suite de la création d’Emploi-Québec (1997). Les CLD constituent les principaux partenaires des Centre locaux d’emploi (CLE) dans la gestion et l’application de la mesure STA, mais d’autres organismes peuvent aussi jouer ce rôle, notamment les Services d’aide aux jeunes entrepreneurs (SAJE), dans la région de Montréal. Le ministère des Régions et Emploi-Québec ont décidé, en 1998, de ne pas signer de protocole d’entente « mais plutôt d’autoriser chaque centre local d’emploi (CLE) à transiger directement avec le CLD/coordonnateur pour encadrer les participants STA » (Emploi-Québec, 2006b, p. 33). Généralement, on peut dire que le CLE est responsable de la gestion de la mesure STA, alors que le CLD/coordonnateur se charge de son application (services techniques, encadrement, suivi).

Tableau 5-6 : Rôle respectif des CLE et des CLD/coordonnateurs dans la gestion et l’application de la mesure STA

C’est un comité de sélection qui accepte ou refuse le projet présenté par un candidat à la mesure STA. Il est formé d’un représentant des CLE, d’un représentant des CLD et d’un représentant du milieu des affaires du territoire géographique du CLE. Certains intervenants ont souligné le fait que le délégué d’Emploi-Québec a un poids très important au sein de ce comité, allant même jusqu’à parler de « droit de veto » implicite ou explicite. Le cadre de la présente recherche ne nous permet toutefois pas de vérifier ces affirmations. Le comité de sélection évalue :

• Les qualités d’entrepreneur du promoteur du projet ;
• La connaissance du domaine choisi par le promoteur ;
• Le réalisme du plan d’affaires ;
• Les possibilités du marché ;
• La pertinence du projet en lien avec le plan d’action local pour l’économie et
l’emploi ;
• La structure de financement du projet.

Le CLE et le CLD/coordonnateur négocient une entente définissant les conditions de financement, leurs engagements mutuels et les éléments de contrôle financier (Emploi- Québec, 2006b, p. 30).

Lieu d’implantation de l’entreprise, plan d’affaires et priorités du développement local

L’application des mesures d’Emploi-Québec suppose une forte décentralisation visant à respecter les priorités régionales de développement économique. Cette décentralisation du développement économique répond à des impératifs liés à la nouvelle économie, dans laquelle la promotion de l’entrepreneuriat des jeunes, entre autres, joue un rôle crucial. « Le succès vient lorsque les pouvoirs publics, les établissements d’enseignement, les milieux d’affaires et financiers et les associations locales unissent leurs efforts autour de stratégies de développement concertées. La promotion de l’entrepreneuriat au niveau local, en particulier au sein de la jeunesse, occupe une place centrale dans ces stratégies car elle accélère le développement, lui donne un ancrage local et stoppe l’exode des individus talentueux vers les centres industriels » (OCDE, 2001, p. 95). À l’inverse, cette façon de faire n’exclut pas que des considérations politiques interviennent dans l’élaboration des priorités économiques d’une communauté locale, notamment quand les mêmes personnes se retrouvent à plusieurs endroits stratégiques (Conférence régionale des élus, politique municipale, CLD, etc.).

De son côté, l’entrepreneur subit aussi certaines contraintes dans le choix de la localisation de son entreprise. Il doit tenir compte de facteurs personnels, comme la qualité de vie ou la proximité de son domicile, mais surtout de facteurs jouant dans la réussite de son entreprise, comme la disponibilité de travailleurs qualifiés (et leur coût), de capital ou d’espace, la proximité des matières premières, etc. Il est fortement souhaitable qu’une éventuelle intervention de l’État ou d’organismes régionaux ou locaux ne complique pas davantage cette décision, mais, au contraire, qu’elle la facilite.

Par exemple, lors de la phase préparatoire, le participant à la mesure STA doit choisir la région où il implantera son entreprise. Il sera référé, pour la suite du projet, au CLD de ce territoire géographique. Cela peut poser quelques difficultés. Prenons l’exemple d’un jeune entrepreneur habitant Montréal qui se présente au CLE de son quartier et soumet sa candidature à la mesure STA. Après évaluation, il prépare son plan d’affaires et définit son projet. Il se rend compte qu’il serait préférable d’établir son entreprise sur la Rive-Sud. Le CLD montréalais doit alors transférer son dossier à un CLD de la Rive- Sud et le projet doit être examiné à nouveau, cette fois par un comité de sélection de ce territoire. Une procédure semblable est prévue lorsque le participant éprouve une difficulté pendant le démarrage de son projet, le forçant à déplacer son entreprise sur un autre territoire. C’est tout le projet qui doit être revu par un comité de sélection de la nouvelle région. Cette situation provoque des délais et une grande incertitude, très néfaste lors d’un processus de création d’entreprise.

L’idée derrière cette forte décentralisation est notamment de permettre une adéquation entre un projet et les priorités de développement économique de la région d’accueil. Le projet doit notamment « s’inscrire dans le cadre du Plan local d’action concertée pour l’économie et l’emploi (PLACÉE) [42] » (Tétreault et Lacroix, 2005, p. 4). Cette décentralisation est aussi au cœur de la gestion de la mesure Jeunes volontaires. « Les mandats et les responsabilités respectives de la direction régionale et des CLE sont laissés à l’appréciation de la direction régionale. La seule obligation stipulée dans le Guide d’interprétation de la mesure est celle d’associer un comité-conseil à chaque CLE, ce qui suppose une gestion locale de la mesure » (Tétreault, Lacroix, 2005, p. 30). Dans ce cas, comme dans celui de la mesure STA, la décentralisation entraîne des différences importantes dans la gestion de la mesure. Ainsi, alors que certaines régions suivent le Guide d’interprétation à la lettre et s’assurent d’associer un comité-conseil à chaque CLE, d’autres centralisent davantage leurs opérations autour du responsable régional ou d’une structure intermédiaire.

Par ailleurs, la volonté de soutenir surtout les projets qui satisfont aux priorités de développement économique définies par les CLD et les autres acteurs locaux semble, dans le cas de la mesure STA, défavoriser les femmes. Selon l’étude du fonctionnement de la mesure [43], « les femmes présenteraient, semble-t-il, en plus forte proportion que les hommes, des projets dans des secteurs considérés comme moins ou non prioritaires en termes de développement économique local ou régional. Cette situation pourrait donc avoir un impact sur l’acceptation des projets, à l’avantage des hommes » (MESS, 2005b, p. 4). Cela est d’autant plus vrai que les projets élaborés par les femmes sont moins souvent créateurs d’emploi que les projets élaborés par les hommes. Ainsi, « il est possible que les intervenantes et intervenants ayant cette perception soient portés à accepter et à soutenir des projets qui leur paraissent davantage porteurs de développement économique régional, susceptibles de créer plus d’un emploi. Si c’est le cas, le processus de sélection des projets pourrait avantager les hommes » (MESS, 2005b, p. 4). Cette crainte est aussi appuyée par le fait que plusieurs intervenants ont l’impression que les comités de sélection favorisent les projets d’entreprises dédiées à la production de biens par rapport aux projets liés au secteur des services, dans lequel les femmes sont fortement représentées.

Les critères de la mesure STA excluent également l’entrepreneuriat social, une situation difficilement compréhensible considérant l’importance grandissante de ce type d’entreprises et sa popularité chez les jeunes et chez les femmes. Une plus grande souplesse permettrait de soutenir des projets dynamiques, créateurs d’emploi et ayant un impact positif sur la collectivité.

Recommandation 19 : Qu’Emploi-Québec étudie l’impact des critères de sélection de projet de la mesure Soutien au travail autonome sur les femmes candidates.

Recommandation 20 : Qu’Emploi-Québec modifie les critères de sélection qui rendent les projets d’entrepreneuriat social inéligibles à la mesure Soutien au travail autonome.

Critères d’admissibilité

Les critères d’admissibilité aux mesures d’Emploi-Québec ont suscité diverses critiques de la part des intervenants rencontrés dans le cadre de précédentes évaluations. Ces derniers soulignent principalement un certain manque de flexibilité dans les critères d’admissibilité de chaque localité, en même temps qu’ils s’étonnent du manque d’uniformité de ces critères entre les régions. Certains mentionnent également les disparités significatives en ce qui a trait aux ressources qui sont allouées aux mesures dans les différentes localités, et évoquent les conséquences d’une telle situation sur les sommes disponibles par projet. La plupart de ces irritants peuvent toutefois s’expliquer par la forte décentralisation dont nous avons parlé plus haut. Cette dernière remet la priorisation des mesures entre les mains des gestionnaires régionaux ou locaux, qui tentent de les établir en fonction des priorités locales et régionales en matière de développement économique et social. Or, il apparaît que de grandes divergences de vue se font jour, entre les différents responsables, sur l’utilité de telle ou telle mesure et donc sur l’opportunité d’y accorder plus ou moins de ressources. La mesure Jeunes volontaire, en particulier, est fortement touchée par ces différences d’une région à l’autre.

Recommandation 21 : Qu’Emploi-Québec s’assure que les mesures Jeunes volontaires et Soutien au travail autonome sont bien comprises et utilisées adéquatement par tous les CLE du Québec.

Accès aux mesures des jeunes diplômés

Une mesure comme Soutien au travail autonome n’est que difficilement accessible aux jeunes diplômés, car ils ne sont généralement pas admissibles à l’assurance-emploi et l’idée de recourir à l’assistance-emploi les rebute, quand ils ne travaillent pas déjà. Cela peut faire en sorte qu’ils ne soient admissibles ni à la mesure, ni aux allocations d’aide à l’emploi ou du soutien au revenu. On peut toutefois se demander si les centres d’entrepreneuriat des universités ne seraient pas mieux placés qu’Emploi-Québec pour offrir ce type de services aux étudiants ou aux diplômés récents.

Financement du suivi

Dans le cas de la mesure STA, comme avec Jeunes volontaires, un manque de moyens rend difficile l’organisation d’un suivi adéquat des participants, notamment dans les phases de post-participation. Notons que, pour ce qui est de la mesure STA, le suivi est souvent l’affaire du CLD/coordonnateur, plutôt que du CLE. Officiellement, ceux-ci offrent un suivi dans la deuxième année d’exploitation de la nouvelle entreprise.

Ce problème ne se limite pas aux mesures d’Emploi-Québec, touchant également un grand nombre d’organismes de soutien aux entrepreneurs. Ainsi, 34 % des personnes faisant partie de l’échantillon de l’étude de Borges, Simard et Filion (2005a) déploraient des problèmes relatifs au soutien disponible et considéraient le manque de suivi après le financement initial comme l’une des principales difficultés.


Recommandation 22 : Qu’Emploi-Québec et ses partenaires veillent à assurer un financement permettant un suivi adéquat tout au long de la mesure et dans la phase de post-participation.

Conclusion

Cette étude démontre qu’il demeure relativement facile de créer une nouvelle entreprise au Québec et que l’activité entrepreneuriale y est assez dynamique. Les entrepreneurs y sont plus souvent motivés par des occasions d’affaires que par la nécessité. Néanmoins, le Québec continue d’afficher un certain retard par rapport à l’ensemble du Canada dans le domaine de l’entrepreneuriat. De plus, certains groupes, notamment les jeunes et les femmes, éprouvent des difficultés particulières. Ces groupes, de même que l’ensemble des nouveaux entrepreneurs motivés par la nécessité plutôt que par une bonne occasion d’affaires, sont très susceptibles de recourir aux services d’Emploi-Québec, notamment la mesure Soutien au travail autonome.

On constate qu’il subsiste un écart entre les hommes et les femmes en ce qui a trait à l’activité entrepreneuriale, même chez les jeunes, et ce, malgré le fait que l’entrepreneuriat des femmes soit en croissance (surtout dans le secteur des services aux consommateurs). Cet écart serait plus important au Québec que dans le reste du Canada. De plus, l’entrepreneuriat féminin serait plus souvent motivé par la nécessité que par la perception d’une bonne occasion d’affaires.

On observe également un écart dans l’activité entrepreneuriale entre les jeunes du Québec et ceux du reste du Canada, à la faveur de ce dernier. Les jeunes de 25 à 34 ans sont beaucoup moins nombreux au Québec qu’au Canada à être propriétaires dirigeants d’une nouvelle entreprise. L’écart est encore plus prononcé dans les entreprises établies, lesquelles sont deux fois plus nombreuses à être détenues et dirigées par des jeunes de moins de 35 ans au Canada qu’au Québec.

Les résultats de cette étude laissent entrevoir un certain succès des mesures de développement de la culture entrepreneuriale instaurées ces dernières années. Les jeunes sont de plus en plus nombreux à percevoir l’entrepreneuriat comme une carrière possible. Toutefois, l’étude indique aussi que les jeunes continuent d’affronter des difficultés particulières directement liées à leur âge. La plupart de ces difficultés ont trait à leur accès au financement, à la confiance qu’ils inspirent – ou n’inspirent pas – à d’éventuels partenaires, clients ou bailleurs de fonds, et à un certain manque d’expérience. Dans ce contexte, le soutien offert aux jeunes entrepreneurs devient crucial. Ce soutien doit d’ailleurs pouvoir se perpétuer au-delà de la phase de démarrage, afin d’assurer la pérennisation des nouvelles entreprises. Il semble y avoir là une lacune à l’heure actuelle, l’essentiel de l’aide logistique et financière étant généralement limité aux phases de prédémarrage et de démarrage.

Ce soutien doit aussi pouvoir s’adapter aux besoins particuliers de groupes spécifiques. Par exemple, on a vu que les besoins des femmes et des hommes sont souvent différents, les femmes ayant généralement davantage besoin d’une aide financière, notamment d’un soutien du revenu, alors que les hommes auraient davantage besoin d’un soutien logistique, par exemple pour la rédaction d’un bon plan d’affaires.

C’est dans cette optique que le rôle d’Emploi-Québec dans la création d’entreprises par les jeunes a été analysé. Nous avons surtout porté notre attention sur la mesure Soutien au travail autonome et sur le rôle que pourrait jouer Emploi-Québec dans le développement de la relève entrepreneuriale par l’entremise de ses mesures de formation de la main-d’œuvre. La mesure Jeunes volontaires, comprise comme une mesure de préparation à l’emploi aidant à développer des compétences liées à l’entrepreneuriat et pouvant mener à la participation à une mesure axée sur la création d’entreprise, a aussi été observée.

En ce qui concerne la mesure Jeunes volontaires, nous avons observé une lacune relative à l’insuffisance ou à l’absence de soutien du revenu. Cette carence rend difficiles l’accès ou la réussite des jeunes les plus défavorisés, lesquels constituent pourtant un des deux profils principaux des participants à la mesure, selon l’évaluation faite pour Emploi-Québec. Elle reproduit aussi le problème de l’exclusion de facto des « sans-chèque », lesquels ont officiellement accès à la mesure, mais pas aux allocations d’aide à l’emploi ou aux autres formes de soutien du revenu. Nous avons également observé des problèmes, liés plutôt au financement ou à la gestion de la mesure, qui compliquaient son application.

La mesure Soutien au travail autonome est la principale mesure d’Emploi-Québec axée sur la création d’entreprises. Elle est toutefois davantage appliquée comme une mesure d’employabilité que comme une mesure d’entrepreneuriabilité. Son objectif ultime est de retourner la personne en emploi, que soit dans l’emploi qu’elle s’est créé ou dans un autre. Selon les évaluations récentes, la mesure connaît un certain succès dans la création de nouvelles entreprises et dans leur survie. Son impact sur les revenus d’emplois des participants est toutefois à peu près nul. Si la mesure semble généralement appréciée des utilisateurs, il subsiste certaines carences à corriger. Il semble entre autres régner une certaine confusion dans l’administration de la mesure, notamment en raison d’une très forte décentralisation et de la règle voulant que les projets doivent satisfaire aux priorités de développement local de leur lieu d’implantation. La décentralisation fait en sorte que la priorisation accordée à la mesure, ainsi que certains aspects de son financement et de son application, sont laissés à la discrétion de la direction régionale ou du responsable local. Inévitablement, il apparaît donc des divergences, parfois importantes, d’une localité à l’autre. De plus, certains critères de sélection défavoriseraient les femmes candidates, dont les projets toucheraient plus souvent le secteur des services aux consommateurs et répondraient moins souvent aux priorités de développement des localités où elles souhaitent s’implanter.

Plus généralement, il semble qu’Emploi-Québec gagnerait à élargir sa vision de l’apport qu’il peut avoir à la création d’entreprises au Québec. Présentement, son mandat est surtout axé sur l’employabilité. Force est d’admettre que, dans le contexte actuel, employabilité et entrepreneuriabilité sont loin de s’exclure mutuellement. La situation démographique fait que la question de la relève entrepreneuriale gagne en importance. Adapter les mesures de formation de la main-d’œuvre afin de développer les capacités et les intentions entrepreneuriales des jeunes en entreprise répondrait à la fois à des objectifs d’employabilité et d’amélioration du rendement des entreprises, propres aux mesures de formation, volet entreprise, et à des objectifs plus larges de développement de la culture et des compétences entrepreneuriales. De la même façon, une interprétation du mandat d’Emploi-Québec faisant une meilleure part à la création d’entreprises permettrait de maximiser les résultats obtenus par la mesure STA, notamment en s’assurant d’adapter la durée du soutien aux besoins réels des nouveaux entrepreneurs. La plupart des recommandations de cette analyse doivent donc être comprises dans l’optique d’un certain repositionnement du mandat d’Emploi- Québec permettant de faire une meilleure place au développement de l’entrepreneuriat, notamment chez les jeunes de moins de 35 ans.

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[1Sauf dans le secteur agricole, où ce type de statut est en forte baisse depuis les années 1970. Ainsi, lorsque l’on observe la proportion globale des travailleurs indépendants par rapport à la population active, on constate qu’elle est relativement la même depuis le milieu des années 1970. Dans les faits, le travail indépendant hors-secteur agricole a fortement augmenté, mais cette augmentation est compensée par la forte baisse dans le secteur agricole.

[2INSTITUT DE LA STATISTIQUE DU QUÉBEC (2006), Le Québec, chiffres en main, Québec, auteur, p. 19.

[3Nathaly RIVERIN et Natacha JEAN (2004), L’entrepreneuriat chez les jeunes du Québec : état de la situation (2004), Montréal, HEC Montréal, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 33 p.

[4Le GEM est un projet international (35 pays) visant à évaluer les activités entrepreneuriales à l’échelle mondiale. Au Canada, les chercheurs du GEM travaillent au HEC Montréal et à la Sauder School of Business de l’Université de la Colombie-Britannique. Notons que les augmentations récentes de son financement au Québec, par le Défi de l’entrepreneuriat jeunesse, ont permis de hausser l’échantillon de 2 000 à 5 000 répondants et de mieux représenter l’ensemble des régions du Québec.

[5QUÉBEC, Secrétariat à la jeunesse (2004), Défi de l’entrepreneuriat jeunesse. Plan d’action triennal 2004-2005-2006. Mon avenir à ma manière, Québec, auteur, 40 p.

[6Les études menées directement auprès des entrepreneurs ou des organismes de soutien ont été volontairement privilégiées par rapport à des textes essentiellement théoriques.

[7Site Internet d’Emploi-Québec, consulté le 30 janvier 2007.http://emploiquebec.net/francais/entreprises/autonome.htm

[8Site Internet de Revenu Québec, consulté le 30 janvier 2007.http://www.revenu.gouv.qc.ca/fr/travailleur_autonome/affaires/statut/definition.asp

[9Jean BERNIER, Guylaine VALLÉE et Carol JOBIN (2003), Les besoins de protection sociale des personnes en situation de travail non traditionnelle, Québec, ministère du Travail, 568 p.

[10Jean BERNIER, Guylaine VALLÉE et Carol JOBIN (2003), op. cit., p. 407.

[11L’indice de l’activité entrepreneuriale totale (TEA) regroupe l’indicateur des entrepreneurs en prédémarrage (pourcentage des individus, propriétaires de l’entreprise en tout ou en partie, ayant fait des gestes afin de créer cette entreprise au cours de la dernière année, sans versement de salaire ou de rémunération pendant plus de trois mois) et l’indicateur des entrepreneurs en démarrage (pourcentage des individus, propriétaires de l’entreprise en tout ou en partie, qui la gèrent depuis moins de 42 mois avant la date de l’enquête et qui ont versé des salaires ou des rémunérations).

[12Cette définition est celle du Small Business Services, une organisation gouvernementale du Royaume- Uni.

[13Nathaly RIVERIN (2006), L’entrepreneuriat social, une force tranquille. Un portrait de l’entrepreneuriat social au Canada et au Québec en 2005, Montréal, Centre de vigie et de recherche sur la culture entrepreneuriale de la Fondation de l’entrepreneurship, et HEC Montréal, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 13 p.

[14Yves ROBICHAUD et autres (2005), A Comparison of Female and Male Entrepreneurs – Insights from GEM Canada, Montréal, HEC Montréal, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, p. 6.

[15Un rapport rédigé dans le cadre du Programme de recherche sur le financement des PME du gouvernement fédéral.

[16En particulier Cândido V. BORGES, Germain SIMARD et Louis-Jacques FILION (2005c), Entreprendre au Québec, c’est capital ! Résultats de recherches sur la création d’entreprises, Cahier de recherche no 2005-03, Montréal, HEC, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 47 p., et Nathaly RIVERIN, GEM (2004), Les spécificités de l’entrepreneuriat québécois, présentation PowerPoint à partir des données du GEM 2004, Montréal, HEC Montréal, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 30 p.

[17Environ un tiers des répondants créera une entreprise et un tiers de ceux-ci réussira.

[18Christine CARRINGTON (2006), Profils de financement des petites entreprises : Les jeunes entrepreneurs, Ottawa, Industrie Canada, 12 p.

[19Josée AUDET, Nathaly RIVERIN et Maripier TREMBLAY (2005), L’influence de la culture d’un pays sur la propension entrepreneuriale de ses citoyens : Le cas du Canada. Cahier de recherche no 2005-12, Montréal, HEC, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 16 p.

[20Josée AUDET, Nathaly RIVERIN et Maripier TREMBLAY (2005), op. cit., p. 2.

[21Site Internet de la Fondation de l’entrepreneurship du Québec, consulté le mercredi 7 février 2007.http://www.entrepreneurship.qc.ca/fr/accueil/notre_organisation_mission.asp

[22Les mesures directement liées à l’éducation à l’entrepreneuriat dans les écoles, cégeps et universités sont plutôt abordées dans la section portant sur la formation.

[23Site Internet du MDEIE, consulté le 6 mars 2007.http://www.mdeie.gouv.qc.ca/page/web/portail/entreprises/nav/Formation/47538/47546.html?iddoc=47 546#releve

[24Louis-Jacques FILION (2004), Particularités de l’essaimage technologique et intérêt pour les jeunes scientifiques. Document PowerPoint. Montréal, HEC, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 61 p.

[25ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES (OCDE) (2003), L’entreprenariat et le développement économique local. Quels programmes et quelles politiques ?, Paris, auteur, p. 123.

[26Cândido V. BORGES, Germain SIMARD et Louis-Jacques FILION (2005c), Résultats de recherches sur la création d’entreprises 2004-2005. Rapport sommaire. Cahier de recherche no 2005-20, Montréal, HEC, Chaire d’entrepreneuriat Rogers-J.-A.-Bombardier, 11 p.

[27Cândido V. BORGES, Germain SIMARD et Louis-Jacques FILION (2005c), op. cit., p. 7.

[28Sylvain MÉLANÇON et Marc ALARIE (2001), Taux de survie des entreprises au Québec et taux de passage, Québec, ministère de l’Industrie et du Commerce, p. 4.

[29Nathaly RIVERIN (2004), op. cit., p. 21.

[30ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES(OCDE) (2001), Encourager les jeunes à entreprendre. Les défis politiques, Cahiers Leed no 29, Paris, OCDE, p. 46.

[31QUÉBEC, ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (2005b), Approche différenciée selon les sexes : rapport de deux évaluations de mesures d’Emploi-Québec : soutien au travail autonome et subventions salariales. Faits saillants, Québec, auteur, p. 4.

[32Hubert WALLOT et Patrice BARBEAU (2001), « Entre l’entrepreneur et l’entreprise, faut-il choisir ? », Organisations et territoires, vol. 10, no 2, printemps-été 2001, 7 p.

[33OCDE (2003), op. cit., p. 103-104.

[34Christine CARRINGTON (2006), Profils de financement des petites entreprises : Les jeunes entrepreneurs, Ottawa, Industrie Canada, p. 7.

[35Diane VANASSE (2004), L’évaluation de la mesure Jeunes volontaires. Rapport d’analyse des entrevues et de l’étude documentaire, Québec, MESSF, Direction de l’évaluation, p. VII.

[36Diane VANASSE (2004), op. cit. Cette évaluation repose sur une étude documentaire et sur des entrevues réalisées auprès de cinq catégories d’interlocuteurs dans six régions du Québec en 2002- 2003.

[37Notre principale source de statistiques est une évaluation réalisée pour le compte d’Emploi-Québec qui présente trois groupes d’âge, soit les moins de 30 ans, les 30 à 44 ans et les 45 ans et plus.

[38Le but de l’évaluation était d’analyser les effets bruts de la mesure sur les participants en les comparant à des non-participants de même statut eu égard au soutien public du revenu. La collecte de données, faite par sondage téléphonique, a été effectuée par la firme SOM inc. Ces données ont été jumelées à d’autres provenant des fichiers du MESSF et de RHDCC.

[39Le premier indicateur ne tient pas compte du fait que certains participants peuvent avoir créé une entreprise qui n’était plus en activité au moment de la fin de leur participation. Le second indicateur tient pour acquis que toutes les personnes dont le plan d’affaires a été accepté ont bel et bien créé une entreprise, et que certaines de ces entreprises ont péri avant la fin de la participation.

[40Notamment le programme d’Aide au travail indépendant (ATI), au Canada, et le Self-Employment Assistant Program, aux États-Unis.

[41QUÉBEC, Emploi-Québec (2006b), Guide des mesures et des services d’emploi. 5.7 Soutien au travail autonome, Québec, auteur, 52 p.

[42Ce plan est élaboré par le CLD de la localité.

[43QUÉBEC, ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (2005a), Approche différenciée selon les sexes : rapport de deux évaluations de mesures d’Emploi-Québec : soutien au travail autonome et subventions salariales, Québec, auteur, 75 p.

Extrait

Au Québec, comme ailleurs en Occident, l’entrepreneuriat et le travail autonome occupent un espace de plus en plus important [1]. En 2004, les 484 000 travailleurs autonomes (dont plus de six sur dix étaient sans employés) représentaient 13,2 % de l’ensemble des personnes en emploi au Québec [2]. Les jeunes de moins de 35 ans sont particulièrement susceptibles de se lancer dans l’entrepreneuriat sous une forme ou une autre. Les données les plus récentes indiquent que c’est dans ce groupe d’âge que l’on retrouvait, en 2004, la plus grande proportion d’individus prévoyant créer une entreprise, seuls ou avec d’autres personnes, au cours des trois années suivantes. Ainsi, 18,1 % des Québécois de 18 à 34 ans avaient l’intention de créer une entreprise pendant cette période, avec des pointes à près de 25 % dans des régions comme les Laurentides et Laval. Par comparaison, la proportion chutait à 9,7 % chez les personnes de 35 à 64 ans (Riverin et Jean, 2004).

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