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17 septembre 2015

Politique québécoise de la jeunesse

Introduction

Durant les quatre dernières années, le Comité consultatif Jeunes (CCJ) a fait preuve d’une grande proactivité en termes de recherche et de production de contenus. Dans un premier temps, il a recueilli auprès de ses membres en employabilité les principaux constats du terrain relativement aux jeunes éloignés du marché du travail (2012), constats qu’il a notés également en créant des liens avec tous les agents régionaux d’Engagement jeunesse. Dans un deuxième temps, le CCJ a sillonné le Québec pour documenter le point de vue des jeunes immigrants de première génération (2012) en ce qui a trait aux obstacles auxquels ils font face ainsi qu’aux différentes stratégies qu’ils utilisent pour les surmonter. Dans un troisième temps, le CCJ a souhaité établir des ponts avec les comités sectoriels de main-d’œuvre (CSMO) de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) en recensant les multiples enjeux de relève de la jeune main-d’œuvre que les industries vivent au Québec (2013), mais cette fois du côté des employeurs. Finalement, dans le cadre de rencontres de travail avec deux directions d’Emploi-Québec et plusieurs membres du CCJ, la question des transitions des jeunes entre l’école et le marché du travail a été abordée, ce qui a mené le CCJ à documenter ces phénomènes par une recension des écrits (abondante mais non exhaustive). Chacun de ces travaux a mené aux dépôts d’avis à la CPMT et à Emploi-Québec. Fort de ses résultats, le CCJ est aujourd’hui emballé de constater que la majorité des sujets traités dans les dernières années font partie intégrante de la présente consultation du gouvernement du Québec en vue du renouvellement de la politique jeunesse, confirmant la justesse de ses intérêts de recherche. Le CCJ souhaite ardemment que ses principaux constats puissent guider, ou du moins éclairer, les principaux acteurs de la consultation afin de mieux accompagner les jeunes québécois qui souhaitent intégrer, réintégrer ou se maintenir en emploi.

Rappelons que le CCJ a la responsabilité de définir les problématiques vécues par les jeunes dans leurs démarches d’intégration, de réintégration et de maintien en emploi. À cet effet, il participe et collabore à l’établissement des priorités d’actions ainsi qu’au suivi et à l’évaluation des modes d’intervention utilisés par Emploi-Québec. Les avis et les recommandations du Comité consultatif Jeunes sont publics et accessibles. Ils sont le fruit de la réflexion et de la concertation des nombreux regroupements qui le composent.

AXE 1 : De saines habitudes de vie

Il existe plusieurs catégories de jeunes que l’on peut accompagner vers une intégration en emploi. Certains d’entre eux n’ont besoin que d’un peu d’aide alors que pour d’autres, un accompagnement soutenu se présente comme un incontournable. Les jeunes vivant les plus grands besoins peuvent parfois présenter d’importantes problématiques de santé mentale ou adopter des comportements à risque. Dans cet axe, le CCJ soulève également le cas des jeunes décrocheurs de 16 et 17 ans ainsi que celui des enfants encore plus jeunes présentant des risques de décrochage permanent du système si une intervention en amont n’est pas réalisée à temps.

1.1. Les jeunes éloignés du marché du travail

En février 2013, le CCJ déposait un avis dans lequel apparaît une série d’obstacles que vivent les jeunes éloignés du marché du travail au Québec. Ces obstacles portaient notamment sur la méconnaissance des services qui sont offerts aux jeunes, sur l’hétérogénéité des besoins de cette clientèle ainsi que sur la rigidité du cadre de fonctionnement dans lequel œuvrent les ressources externes en employabilité pour venir en aide aux jeunes.

L’avis cherchait à rappeler les problématiques de plus en plus lourdes vécues par ces jeunes et l’importance d’un accompagnement soutenu pour favoriser leur mise en mouvement. En effet, avant d’être en mesure d’intégrer un emploi, plusieurs d’entre eux doivent d’abord effectuer un retour à la santé mentale et reprendre un certain pouvoir sur leur vie, particulièrement s’ils vivent des dépendances diverses. Plus spécifiquement, leur participation à un programme d’employabilité (ou leur retour aux études) sera compromis(e) si ces jeunes vivent des problèmes de santé mentale ou ont des comportements à risque, que ce soit l’alcoolisme, la toxicomanie ou le jeu (pour ne nommer que ceux-là). Les acteurs en employabilité doivent être en mesure de collaborer avec les secteurs de la santé ainsi qu’avec les divers réseaux publics qui peuvent favoriser l’intégration en emploi de ces jeunes éloignés du marché du travail (ou jeunes en difficulté). L’Ontario annonçait par ailleurs le lancement de son Programme d’accès à l’emploi pour les jeunes, qui cible les jeunes vivant diverses problématiques telles que le fait de vivre dans la pauvreté, être sans abri, devoir composer avec un handicap physique ou des problèmes de santé mentale. Plus de 27 000 jeunes se verront offrir une formation préprofessionnelle rémunérée, des possibilités d’emploi et du mentorat (Ministère de la Formation et des Collèges et Universités de l’Ontario, 2015).

Pour répondre aux nombreux besoins hétérogènes des jeunes qui vivent des problématiques de plus en plus lourdes, le CCJ réitère sa recommandation formulée en 2013 :

Recommandation 1


Que le gouvernement du Québec formalise des collaborations entre les secteurs de la santé et de l’emploi ainsi qu’entre les réseaux publics et communautaires en employabilité afin de mieux desservir la clientèle jeune et éloignée du marché du travail.

À l’époque, le CCJ concluait son avis en mentionnant la situation complexe des jeunes très éloignés du marché du travail. Il rappelait l’intérêt certain du travail de proximité, un concept qui mérite d’être examiné pour rejoindre ces jeunes là où ils sont.

1.2. Les jeunes décrocheurs âgés de 16 et 17 ans : une clientèle qui cadre difficilement dans les programmes actuellement offerts

Dans son avis sur les transitions, la problématique des jeunes décrocheurs sans soutien du revenu et âgés de 16 et 17 ans a été abordée. Considérés d’âge scolaire, ils ne sont admissibles ni à l’aide sociale, ni aux mesures d’Emploi-Québec qui pourraient notamment leur venir en aide. Il existe certes quelques options spécifiquement pour cette clientèle : IDEO 16-17, financé par le Secrétariat à la jeunesse et offert dans les Carrefours jeunesse-emploi ainsi que Connexion compétences, un programme fédéral, soit le seul offrant une rémunération aux participants. Également, plus d’une dizaine d’entreprises d’insertion peuvent proposer un parcours aux jeunes de cet âge, mais il semblerait, selon les acteurs du terrain, que les conditions d’admission soient de plus en plus restrictives quant à cette clientèle, freinant leur participation.

Ces jeunes se trouvent à un moment charnière de leur vie, puisqu’ils ne sont ni des enfants, ni des adultes et ne disposent que de peu d’outils ou compétences de base pour intégrer le marché du travail (CCJ, 2013c ; 2005). Il serait intéressant que les instances gouvernementales, malgré certains critères relatifs à l’admissibilité et à l’âge des participants, agissent davantage en amont pour ces clientèles, soit avant qu’elles ne deviennent dépendantes de l’État de façon permanente (CCJ, 2013c). C’est pourquoi le CCJ proposait à Emploi-Québec d’évaluer la pertinence que les jeunes décrocheurs de 16 et 17 ans soient plus facilement admis à des programmes et mesures qui favoriseraient leur mise en mouvement.

Dans son analyse-réponse, Emploi-Québec reconnaît que la « difficulté rencontrée par ces jeunes, lorsqu’ils décident d’entreprendre une démarche d’intégration en emploi, concerne le manque de ressources financières » (2015, p. 3). Il conviendrait donc d’adapter le système et son processus d’admissibilité qui n’est actuellement pas en mesure de répondre aux nombreux besoins.

Dans une logique d’intervention en amont, il serait par ailleurs intéressant que l’on se penche sur la situation des jeunes de 2e et 3e secondaire qui sont les plus à risque de décrochage, par exemple en leur offrant la possibilité de participer à la mesure IDEO malgré leur jeune âge. En effet, selon Pica et al. (2013, p. 117), la proportion d’élèves à risque de décrochage scolaire augmente drastiquement entre la 1re et la 2e secondaire ainsi qu’entre la 1re et la 3e secondaire, passant respectivement de 16 % à 22 % et 25 %, proportion qui diminue par la suite en 4e et 5esecondaire. À cet effet, le deuxième volet offert du programme ontarien d’accès à l’emploi pour les jeunes, mentionné précédemment, cible spécifiquement les élèves de 15 à 18 ans en leur offrant des possibilités d’emplois d’été et des emplois à temps partiel après l’école (Ministère de la Formation et des Collèges et Universités de l’Ontario, 2015).

Recommandation 2

Que le gouvernement du Québec priorise une intervention en amont auprès des jeunes plus à risque, notamment dès la 2e secondaire.

AXE 2 : Un milieu favorable à la persévérance et à la réussite scolaires

Même chez les décrocheurs et les jeunes à risque, un des meilleurs moyens d’encourager la persévérance scolaire chez les jeunes (et, par le fait même, la persévérance dans les programmes d’employabilité) reste l’identification d’un projet porteur (d’études, d’emploi, de vie) qui suscitera suffisamment de motivation à persévérer. Les travaux plus récents du CCJ ont soulevé à cet effet plusieurs constats qui rejoignent les thèmes de la présente consultation. D’une part, 1) l’orientation scolaire et professionnelle, en tant que facteur de renforcement de la persévérance, doit être au cœur des services offerts pour les jeunes. D’autre part, 2) les études professionnelles et techniques doivent également être valorisées pour aider les jeunes à identifier des projets d’études porteurs de sens, dans des secteurs d’emploi en demande et offrant des conditions de travail alléchantes.

2.1. Services d’orientation scolaire

Dans son avis sur les transitions entre l’école et le marché du travail, la question de l’indécision vocationnelle chez les jeunes prenait une large part. Les jeunes font face à une multitude d’informations qui crée parfois de la confusion dans leur choix de carrière. Ils méconnaissent les différents métiers et secteurs d’emploi qui s’offrent à eux. Plus spécifiquement, ils boudent les programmes de formation professionnelle et technique, qui pourtant aboutissent dans des secteurs d’emploi offrant souvent de bonnes conditions de travail et faisant face à d’importants besoins de main-d’œuvre tant qualifiée que non qualifiée.

À l’instar de nombreux organismes, l’avis mentionnait notamment une offre de service en orientation scolaire et professionnelle morcelée et insuffisante pour répondre aux besoins des adolescents et jeunes adultes.

Recommandation 3


Que le gouvernement du Québec augmente l’accompagnement des jeunes dans leur choix de carrière en ce qui a trait aux services d’orientation offerts en milieu scolaire et à l’extérieur de l’école.

Ces réflexions pourraient être à l’origine d’une réelle stratégie nationale en matière d’orientation professionnelle. Les travaux seraient réalisés en collaboration avec les acteurs de l’orientation et l’information scolaire et professionnelle ainsi que ceux de l’employabilité, dans l’objectif ultime de favoriser l’intégration en emploi des jeunes québécois.

2.2. Valorisation des formations professionnelles et techniques

La formation professionnelle (FP) souffre d’une image parfois négative tant auprès des jeunes, de leurs parents que des ressources scolaires. Des problèmes de structure, de financement en lien avec les besoins du marché du travail et d’accessibilité limitée (impossibilité d’étudier à temps partiel, par exemple) sont évoqués parmi les principaux irritants (ICÉA, 2011, p. 28).

En ce qui a trait à l’approche canadienne :

L’approche de marché adoptée au Canada vis-à-vis de la FP présente l’avantage de répondre rapidement aux besoins locaux ; par contre, elle s’accompagne d’un manque de coordination centrale, qui aboutit à une fragmentation et à des inégalités possibles. Le travail requis pour établir et entretenir des partenariats efficaces n’est pas suffisamment reconnu et les initiatives locales sont trop fluctuantes. S’il existe un équilibre nécessaire entre contrôle central et autonomie locale, […] les gouvernements devraient intervenir beaucoup plus directement pour assurer la durabilité et l’efficacité de la FP (Taylor, 2007 dans CCJ, 2014, p. 9).

Il s’agit là d’une occasion importante de réfléchir conjointement à une façon de promouvoir les différents programmes de FP, voire les programmes de formation en général, notamment ceux présentant d’importants besoins de main-d’œuvre. Outre l’existence du portail Tout pour réussir (www.Toutpourreussir.com), il y a lieu de se questionner sur ce qui peut être fait de plus pour améliorer la notoriété de ces programmes auprès des jeunes. Les acteurs de l’éducation, de l’emploi et de la jeunesse pourraient sans doute développer conjointement une réflexion pour travailler à modifier les perceptions et façons de faire actuelles en ce qui a trait à la FP.

Pour l’instant, les actions isolées des entreprises, secteurs d’emploi ou établissements scolaires (CCJ, 2013c, p. 8) sont certes nobles et visent à valoriser certains métiers méconnus ou mal aimés, mais elles auraient davantage d’impacts s’il y avait une réelle stratégie concertée entre tous les acteurs touchés par les programmes de FP. En effet, les sources d’information se révèlent nombreuses et le message transmis aux jeunes reste diffus. Il y a lieu de se questionner sur la meilleure façon d’adapter le propos afin, d’une part, de rejoindre les jeunes et, d’autre part, de vulgariser l’information destinée aux différentes ressources en milieu scolaire.

Recommandation 4

Que le Secrétariat à la jeunesse collabore avec la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT), Emploi-Québec et le Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) à l’identification de nouvelles façons de promouvoir les différents programmes d’études, notamment ceux en formation professionnelle et technique.

AXE 3 : Des jeunes prêts pour le travail, une économie prête à les accueillir

Outre les jeunes qui ont un grand besoin d’aide tel qu’évoqué en axe 1, il y a les jeunes ayant moins besoin d’aide, mais qui éprouvent malgré tout des difficultés à s’intégrer en emploi et ce, pour différentes raisons. Dans cet axe, le CCJ aborde en premier lieu trois catégories de jeunes qui pourraient aisément être intégrés en emploi s’ils recevaient un type d’aide adéquat, au meilleur moment et par le bon intervenant. En deuxième lieu, le CCJ traite la question complexe des jeunes qui ne sont ni en emploi, ni aux études, ni en formation (NEEF). En troisième lieu, la question des différentes conditions de travail avec lesquelles les jeunes doivent souvent composer, tels que le sous-emploi et le travail atypique, est traitée. En quatrième lieu, il est question de la culture entrepreneuriale qui doit être valorisée chez les jeunes, dans un Québec en manque de releveurs et d’entrepreneurs. En dernier lieu, le CCJ termine cette section par le thème de la conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie.

3.1. Arrimage entre l’offre et la demande de main-d’œuvre : prioriser trois catégories de chercheurs d’emploi

Dans son avis sur la relève des jeunes dans les organisations, le CCJ observait, d’une part, des organisations faisant face à d’importants besoins de main-d’œuvre (certains secteurs vivent une pénurie, mais généralement, la plupart des secteurs sont en rareté de main-d’œuvre) et, d’autre part, des chercheurs d’emploi qui ne demandent qu’à être embauchés. Dans le cadre de la présente consultation, le CCJ souhaite cibler trois catégories de chercheurs d’emploi qui pourraient être priorisées, soit :

1) les jeunes non qualifiés, mais pouvant occuper des postes d’entrée sur le marché du travail (abordés en axe 1) ;
2) les jeunes surqualifiés, occupant les postes d’entrée sur le marché du travail (voir section sur le sous-emploi), mais qui devraient obtenir des emplois en meilleure adéquation avec leurs compétences ;
3) les jeunes immigrants qualifiés qui sont prêts à occuper un emploi, mais dont les compétences ne sont pas reconnues ou qui ne maîtrisent pas le français.

Les deux premières catégories étant abordées dans les axes précédents, seule la question des jeunes immigrants de première génération au Québec est traitée dans la présente section.

En effet, il paraît indéniable que plusieurs actions ont été menées par les acteurs locaux, régionaux et provinciaux depuis la diffusion de l’avis du CCJ sur les jeunes immigrants de première génération. Malgré tout, les collaborations interministérielles, la francisation accrue et obligatoire des nouveaux arrivants et la sensibilisation des employeurs et des populations locales restent des actions incontournables pour mettre à profit le talent de ces jeunes qualifiés qui arrivent au Québec pour y commencer une nouvelle vie.

3.2. L’employabilité des NEEF

Un concept qui a émergé principalement en Europe, dans les années 90, les jeunes qui ne sont ni en emploi, ni aux études, ni en formation (NEEF) « sont devenus une préoccupation majeure pour les décideurs politiques, en particulier dans les économies développées » (Bureau international du travail, 2012, p. 5). Ces jeunes ont décroché du « système » formel et s’occupent de diverses manières. Leur décrochage peut être temporaire (quelques semaines) ou permanent (plusieurs années) (CCJ, 2014).

Cinq typologies, inspirées des travaux d’Eurofound , sont proposées pour mieux comprendre ces jeunes :

  • les chômeurs traditionnels en recherche active d’emploi ;
  • les personnes non disponibles (responsabilités familiales ou incapacités diverses) ;
  • les désengagés (ne cherchant pas d’emploi, n’étant pas aux études et ne vivant aucune contrainte) ;
  • les personnes à la recherche d’une opportunité (emploi ou formation qui cadre avec leurs compétences) ;
  • les volontaires (voyages, arts ou auto-apprentissage).

Cette catégorisation et les proportions qui y sont reliées ne sont toutefois pas accessibles pour le Québec en raison de l’indisponibilité des données. Observons dans ce cas plus en détail les données sur les jeunes Canadiens (Marshall, 2012, p. 3) :

(Tableau)

Puisque le Québec compte 200 000 jeunes NEEF, dont 112 000 sont inactifs et 89 000 en recherche active d’un emploi (ISQ, 2013, p. 1), nous pouvons poser l’hypothèse qu’environ 50 000 jeunes québécois (soit un jeune NEEF sur quatre) sont sans jeunes enfants et sans activité connue.

À cet effet, Marshall signale que l’Enquête sur la population active, source de données pour établir l’indicateur NEEF, ne contient aucune question permettant d’en savoir davantage sur les activités des jeunes inactifs menées en dehors du marché du travail (2012, p. 13). Puisque l’on connaît mal la nature exacte de leurs activités, ces dernières ne devraient pas être automatiquement associées à une conduite nuisible ou une situation de marginalisation. En effet, ces jeunes peuvent faire le choix de partir en voyage, de pratiquer un loisir ou subir une contrainte non économique telle qu’une conscription. Par exemple, en Suède, le service militaire ou le voyage à l’étranger occupent la moitié des jeunes hommes inactifs (Quintini et Martin, 2006, p. 11).

En fait, plusieurs des raisons les plus souvent citées lors d’autres études pour prendre une pause sont axées sur le désir de s’éloigner du système d’enseignement structuré, d’élargir ses horizons personnels, de se familiariser avec différentes personnes, différentes cultures et différents lieux, d’acquérir des aptitudes utiles pour la vie quotidienne et d’apporter une contribution à la société (Jones, 2004 dans CTREQ, 2013, p. 7).

En résumé, l’indicateur considère des groupes vulnérables et d’autres qui le sont moins. Ainsi, bien que près de 40 % des jeunes aient fait partie des NEEF pendant cinq mois ou plus, seulement un petit groupe de jeunes Canadiens seraient définitivement détachés du système scolaire ou du marché du travail (Drewes, 2011 dans Marshall, 2012, p. 13).

Les jeunes NEEF ne peuvent donc pas être considérés comme un groupe homogène. Avant de proposer des mesures ou programmes pour favoriser leur mise en mouvement, il convient d’investiguer davantage cette catégories de jeunes et d’analyser les obstacles auxquels ils sont confrontés.

En effet, si le gouvernement choisit d’entreprendre une action et d’investir des sommes considérables auprès de ces clientèles, il s’agit alors de mieux connaître les jeunes NEEF dits désengagés en cherchant à comprendre qui sont-ils, que souhaitent-ils et comment les rejoindre dans leur milieu de vie.

Le CCJ recommandait en mars 2014 que le Ministère de l’emploi et de la Solidarité sociale (MESS), via la Direction générale adjointe de la recherche, de l’évaluation et de la statistique (DGARES), réalise une étude de type longitudinal sur les jeunes NEEF au Québec. Le ministère répondait au CCJ, le printemps dernier :

[…] Emploi-Québec est préoccupé par la situation des jeunes qui ne sont ni aux études, ni au travail, ni en formation (NEET), notamment lorsqu’ils sont prestataires de l’aide financière de dernier recours […]. Emploi-Québec adhère à cette recommandation du CCJ et évaluera avec la Direction générale adjointe de la recherche de l’évaluation et du suivi de la performance du Ministère, la pertinence et la possibilité d’une étude longitudinale sur les jeunes qui ne sont ni à l’école, ni aux études, ni en emploi (NEET) (2015, p. 4).

Le CCJ recommande donc :

Recommandation 5


Que le gouvernement du Québec investigue la catégorie des désengagés parmi les NEEF avant d’investir des sommes importantes pour leur mise en mouvement vers l’emploi.

Tel que mentionné en début de section, il conviendrait peut-être de prioriser certains jeunes tels que les non-qualifiés prêts à intégrer un emploi, les surqualifiés et les jeunes immigrants. Ils présentent en effet un risque de marginalisation sur le marché du travail, des emplois de piètre qualité, des difficultés à se faire embaucher voire même des problématiques de santé physique ou mentale (ISQ, 2013, p. 2). « Ces jeunes n’ont vraisemblablement pas les compétences nécessaires pour faire face à la concurrence […] [et] risquent de demeurer des chômeurs chroniques si rien n’est entrepris pour remettre leur éducation à niveau ou leur offrir une formation axée sur les compétences » (Banque CIBC, 2013, p. 3). En apparence, ces jeunes ne semblent pas une clientèle prioritaire puisqu’ils sont en recherche active d’emploi, mais si leurs difficultés d’intégration en emploi sont maintenues durant plusieurs mois, ils risquent la déqualification ou un décrochage du système en général, ce qui, ultimement, entraîne de lourdes conséquences pour l’État et pour eux-mêmes.

3.3. Les conditions de travail des jeunes

Parmi les conditions de travail pouvant affecter les jeunes, le CCJ a principalement documenté, ces derniers mois, les questions du sous-emploi et du travail atypique puisqu’ils touchent d’abord et avant tout les jeunes.

3.3.1. Sous-emploi

Dès l’obtention de leur diplôme, plusieurs jeunes cherchent à intégrer rapidement un emploi pour prendre de l’expérience de travail, mais aussi pour rembourser leur – parfois imposante – dette d’études. Pour ce faire, certains d’entre eux vont, dans les premières années, accepter un emploi inférieur à leur talent ou leurs compétences. Il est alors question de sous-emploi.

Naturellement, la scolarisation de plus en plus importante des jeunes augmente leur risque de se retrouver en situation de sous-emploi. L’Organisation internationale du Travail (OIT) définit le sous-emploi de la façon suivante : « les personnes en sous-emploi ont toutes travaillé ou exercé un emploi durant la semaine de référence, mais elles ont la volonté et la capacité d’accéder à un emploi plus adapté [à leurs compétences ou leur formation] » (OIT, s.d.). Le sous-emploi entraîne donc une déqualification ou dégradation des compétences, qui à son tour agit sur la qualité de la main-d’œuvre et la productivité d’une nation.

Le sous-emploi peut être influencé par l’offre et la demande changeantes en ce qui a trait aux diplômes ou aux progrès technologiques, entre autres choses. D’autres facteurs indirects peuvent également influencer le sous-emploi, tels que la structure de l’économie, la migration des jeunes ainsi que la qualité de l’information sur le marché du travail (IMT) (Association des CGA, 2012, p. 13). En ce qui a trait à l’IMT, il est avant tout question d’adéquation formation-emploi en termes de jumelage entre l’offre et la demande de travailleurs (Association des CGA, 2012, p. 58). Néanmoins, pour effectuer un choix éclairé, les jeunes doivent disposer des bons renseignements tant sur les programmes disponibles que sur les besoins des employeurs et sur les compétences pouvant faire l’objet de pénurie ou de rareté (Saunders, 2008, p. 19). En somme, il semblerait qu’aucune analyse approfondie n’ait été réalisée pour bien comprendre les causes du sous-emploi en contexte canadien (Association des CGA, 2012, p. 13).

3.3.2. Travail atypique

Le travail atypique, tremplin fréquent vers un emploi typique, représente une façon courante d’intégrer le marché du travail et une forme de « tri » naturel pour les employeurs en recrutement de nouveaux employés. Le travail atypique peut prendre de nombreuses formes : le travail à temps partiel, le double-emploi (deux emplois à temps partiel ou à temps plein), le travail temporaire, le travail autonome (indépendant), le travail invisible (au noir), etc. Il présente certainement des avantages, tels que répondre à des besoins de conciliation travail-famille en offrant une flexibilité supérieure à celle offerte dans le cadre d’un travail typique. Il comporte également de nombreux inconvénients. En effet, le travail atypique « désavantage les jeunes non seulement parce qu’ils [y] sont surreprésentés […], mais aussi parce qu’ils subissent disproportionnellement l’impact de la rémunération plus faible, de l’accès restreint aux régimes de protection sociale et à la représentation syndicale associés à ces emplois » (Noiseux, 2012, p. 32). Parmi les désavantages, il est également question du nombre d’heures moins important que la moyenne des travailleurs typiques et du risque de vivre des périodes de chômage durant l’année, tout en étant moins susceptibles d’être admissible à l’assurance-emploi.

Selon un récent rapport de l’OIT, trois travailleurs sur quatre dans le monde vivent de contrats à durée déterminée, travaillent à temps partiel, se disent travailleurs autonomes ou gagnent leur vie par le travail invisible (au noir). Les jeunes sont les plus touchés par cette condition de « précariat » : les moins de 30 ans occupent plus de la moitié des emplois temporaires (OIT, 2015 dans Dupaul, 2015).

En ce qui a trait précisément à l’emploi temporaire au Québec :

[…] qu’il soit à temps partiel ou à temps plein, [il] touche davantage les plus jeunes, révélant ainsi leur insertion plus difficile sur le marché du travail. En 2011-2013, cinq jeunes sur dix âgés de 25-29 ans se trouvant dans un emploi atypique occupent un tel emploi contre un peu plus de trois travailleurs sur dix chez les 30-44 ans et un peu plus de deux travailleurs sur dix chez les 45 ans et plus (ISQ, 2014, p. 3).

Recommandation 6

Que le gouvernement du Québec réalise (ou finance) une analyse approfondie pour bien comprendre les causes et les conséquences du sous-emploi (sous-emploi et travail atypique) au Québec (répartition selon l’âge et les régions, situation volontaire ou non, etc.) en portant une attention particulière aux jeunes.

3.4. Entrepreneuriat et repreneuriat

Tel que vu dans l’avis sur le même thème, la relève entrepreneuriale du point de vue des jeunes comporte deux dimensions, soit le fait d’opter pour une carrière entrepreneuriale pour créer son emploi, ou bien une carrière repreneuriale pour maintenir les activités d’une entreprise existante, familiale ou non. Puisqu’il manquera plusieurs milliers de releveurs pour les entreprises familiales du Québec (Audet, Gasse et Tremblay, 2009 ; FCEI, 2010 ; Fondation de l’entrepreneurship, 2010), les cédants ont intérêt à bien planifier la transmission de leur entreprise. Environ 38 000 repreneurs seraient recherchés d’ici 2020, selon la Fondation de l’entrepreneurship (FCEI, 2010, p. 6). Or :

Le transfert d’une entreprise est un long processus — jusqu’à 15 ans dans certains cas (dans le secteur de l’agriculture par exemple) — qui doit être planifié. Une absence de planification ou un manque de préparation peut entraîner des fermetures d’entreprises, menaçant ainsi la pérennité des organisations établies dans la région ainsi que plusieurs générations de travailleurs (CCJ, 2013a, p.11).

Dans son avis, le CCJ recommandait à Emploi-Québec d’adapter l’IMT en ligne de façon à favoriser la promotion de l’information et l’accompagnement disponibles sur l’ensemble des ressources disponibles en entrepreneuriat et en relève entrepreneuriale. Le CCJ rappelait également que le rôle de ces diverses ressources était de sensibiliser et initier ces ressources tant à la culture entrepreneuriale qu’à la reprise d’entreprise comme moyen de se créer son propre emploi.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Québec maintienne et poursuivre les différentes initiatives de sensibilisation et d’initiation à l’entrepreneuriat et au repreneuriat comme moyen de créer son propre emploi, tant en milieu scolaire qu’à l’extérieur de l’école.

3.5. Conciliation des obligations du travail avec les autres sphères de la vie

En 2011, le CCJ soumettait à la CPMT un avis portant sur la conciliation travail-famille-études dont certaines recommandations semblent toujours d’actualité :

Recommandation 8

Que le gouvernement du Québec encourage et étudie la recherche d’innovations dans le domaine de la conciliation travail-famille-études du côté des milieux professionnels et académiques.

Le CCJ souhaite saluer le fait que cette recommandation est présentement mise en œuvre par la présente consultation. Toutefois, à la lumière des nombreux écrits et des différentes consultations ayant eu lieu durant les dernières années et puisque la situation n’a pas tellement évolué en termes de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie, le CCJ estime qu’il est maintenant temps de passer à l’action :

Que le gouvernement du Québec mette en œuvre une véritable politique de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie.

Plus spécifiquement :

Que le gouvernement du Québec, par l’entremise du Secrétariat à la jeunesse, implante une table interministérielle visant le développement de mesures destinées aux jeunes (étudiants, travailleurs, parents) en situation de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie.

Outre les jeunes et dans un contexte de société vieillissante, les enjeux de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie touchent également les travailleurs de tous âges, par exemple, dans le cas d’un travailleur expérimenté qui doit prendre soin d’un parent en perte d’autonomie. La mise en œuvre d’une telle politique répondrait aux besoins de l’ensemble des travailleurs québécois, peu importe leur génération.

AXE 4 : Une citoyenneté active et plurielle

Lors des entrevues réalisées dans le cadre de l’avis sur la relève des jeunes dans les organisations, certains secteurs ont déploré les taux de roulement élevés chez les jeunes ayant moins d’un an d’ancienneté ou étant moins spécialisés. Ils expliquent ce phénomène en parlant du « choc de la réalité du marché du travail ». Le CCJ, interviewé par la Presse (2014) après la diffusion de son avis, soulevait le fait que la réalité du marché du travail chez les jeunes est souvent différente de ce qu’ils imaginaient. Ils peuvent ainsi vivre certains doutes, voire prendre conscience qu’un secteur ou un environnement de travail ne leur convient pas. En effet, les conditions de travail pouvant varier d’un endroit à l’autre, les jeunes semblent rarement bien préparés à « vivre » l’emploi. Une réalité que le CCJ souhaiterait documenter et qui intéresse vivement de nombreux secteurs d’emploi. Les prochains paragraphes proposent les différentes actions possibles qui peuvent contribuer à augmenter la rétention des jeunes en emploi, entre autres avantages.

4.1. L’engagement bénévole ou volontaire et le travail à temps partiel : des actions susceptibles de diminuer le choc d’entrée sur le marché du travail

Le CCJ estime que toutes les expériences peuvent être susceptibles de diminuer le choc de la réalité du marché du travail. Que ce soit par le bénévolat – en siégeant sur un conseil d’administration ou un instance décisionnelle locale par exemple – ou par du travail à temps partiel, les jeunes doivent vivre des expériences suffisamment formatrices pour les aider à mieux se connaître (et s’orienter) et développer certaines compétences professionnelles afin de les aider à mieux intégrer le marché du travail. Par conséquent :

[…] il y a lieu de favoriser à tous les ordres du système scolaire de nombreux allers-retours entre le monde scolaire et le monde du travail, par exemple, par des travaux-terrain, des stages de toutes sortes (observation, initiation, approfondissement, etc.), des juniorats et des noviciats, des internats et des externats, et ainsi de suite. En somme, il y a lieu de pousser à fond cette notion trop souvent abstraite ou frileuse d’alternance études-travail (Limoges, 2015).

Recommandation 9

Que le gouvernement du Québec valorise et finance les initiatives où les jeunes peuvent expérimenter et vivre l’emploi avant d’effectuer un choix de profession ou de secteur d’emploi.

Pour assurer une cohérence du système et encourager les jeunes à s’engager dans leur communauté, ces expériences de vie devraient être davantage et plus facilement reconnues, notamment dans un contexte de rareté de main-d’oeuvre. En effet, les jeunes vivent plusieurs opportunités de développer des compétences hors du cadre scolaire et sont nombreux à poursuivre un parcours atypique (Doray et al., 2009, p. 1). L’ICÉA mentionnait la pertinence, justement, de « reconnaître la diversité des lieux et des expériences d’apprentissage qualifiant » (2011, p. 5).

En 2009, plus de 130 000 jeunes (26 %) réalisaient potentiellement des apprentissages à l’extérieur de l’école (ISQ, 2009 dans ICÉA, 2011, p. 10). De plus, puisque de nombreux jeunes font le choix de changer de programme scolaire, des passerelles efficaces devraient être mises en place pour favoriser la reconnaissance de ces apprentissages et l’obtention de crédits pour le travail réalisé. Le CCJ soulignait dans son avis sur les transitions entre l’école et le marché du travail l’importance capitale de la reconnaissance des acquis et des compétences (RAC) dans un contexte actuel où les besoins de main-d’œuvre se présentent comme aussi importants.

Recommandation 10

Que le gouvernement du Québec priorise la reconnaissance des acquis et des compétences (RAC) dans l’élaboration de la future politique jeunesse, pour les jeunes immigrants comme pour les jeunes ayant poursuivi un cheminement non traditionnel.

4.2. Un dialogue et l’entraide entre les générations… en milieu de travail

La littérature traite abondamment de la gestion des âges (Lamonce, 2002 ; Lefebvre, 2013 ; Conjard et Rousseau, 2005), mais rares sont les études menées sur la diversité générationnelle en milieu de travail. Les entrevues du CCJ auprès des secteurs d’emploi ont fait ressortir que le transfert intergénérationnel des compétences et des connaissances ne semble pas prioriser spécifiquement le transfert vers une relève « jeune ». En effet, bien que le transfert s’effectue entre travailleurs de générations différentes, il semble préconiser le mentorat des travailleurs expérimentés vers des travailleurs de niveau intermédiaire ou vers des jeunes se situant dans les catégories supérieures des 18-35 ans plutôt que vers les plus jeunes.

Étant donné que les travailleurs expérimentés restent en emploi de plus en plus longtemps –bonne santé physique, épargne insuffisante pour prendre sa retraite, augmentation du coût de la vie –, les jeunes ont de plus en plus de difficulté à se faire remarquer des employeurs, notamment dans certains secteurs et régions du Québec (Radio-Canada, 2015). Dans un tel contexte et outre l’école et la famille, un des meilleurs endroits pour encourager un dialogue ouvert et productif entre les générations reste le milieu de travail. En effet, qu’elle soit privée, publique ou communautaire, l’organisation est un excellent lieu pour favoriser le jumelage entre travailleurs expérimentés et recrues. D’une part, le jumelage (mentorat) assure un transfert de connaissances et de compétences vers les plus jeunes, atténuant de ce fait le choc de la réalité du marché du travail, et contribue à la rétention des jeunes en emploi. D’autre part, il valorise les travailleurs expérimentés qui se sentent parfois « poussés vers la porte ». De surcroît, un tel transfert contribue à conserver une mémoire organisationnelle, représentant autant d’information menacée de disparaître à tout jamais à la suite du départ de ces travailleurs d’expérience.

Recommandation 11

Que le gouvernement du Québec multiplie les initiatives de mentorat avant (à l’étape du choix de carrière) et pendant l’intégration en emploi des jeunes (sur les lieux de travail).

En effet, les jeunes doivent être en contact avec des travailleurs effectuant le métier qu’ils convoitent afin d’en savoir plus sur ce dernier. Aussi, un mentorat par les pairs devrait également être mis de l’avant durant l’intégration en emploi des jeunes de façon à favoriser la rétention des jeunes en emploi.

Conclusion – Le besoin d’aide

Il existe plusieurs catégories de jeunes. En fait, il y a presque autant de catégories qu’il y a de jeunes. Tel qu’évoqué en début de document, il y a, parmi eux, ceux qui ont un grand besoin d’aide – jeunes éloignés et très éloignés du marché du travail – et ceux qui ont moins besoin d’aide (jeunes surqualifiés, jeunes immigrants, jeunes non qualifiés pouvant occuper des postes d’entrée sur le marché du travail). Il y a finalement ceux dont les besoins d’aide n’ont pas été évalués : les NEEF. Le coût financier et les retombées d’une aide possible se présentent donc comme difficiles à évaluer à ce stade-ci.

En ce qui a trait à la question des travailleurs expérimentés, ils représentent une source importante de savoirs qui doit être mise à profit pour les plus jeunes. Cette future relève des organisations est en effet menacée par la perte de savoirs critiques si les connaissances ne sont pas documentées et transmises. Ces travailleurs expérimentés vivent les mêmes besoins que les plus jeunes : ils ont, eux aussi, besoin d’une politique conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie afin d’être en mesure de se maintenir en emploi tout en faisant face à leurs obligations personnelles. Générations différentes, mêmes besoins.

Au-delà de ces jeunes et moins jeunes, il y a les enfants ; nos futurs « jeunes ». Ces enfants ont besoin de services dont les coûts représentent un investissement en l’avenir. Notre société pourra en mesurer les impacts, tel que nous l’avons vu tout au long de ce mémoire, dans différentes sphères : santé mentale, diminution des comportements à risque, alphabétisation, éducation, éducation à la citoyenneté via l’implication sociale ainsi qu’employabilité en général. Par conséquent, les soins et services offerts aux plus jeunes représentent un moins grand besoin d’aide demain.

Nota bene

Le présent mémoire est inspiré des travaux les plus récents du Comité consultatif Jeunes :

  • Les jeunes éloignés du marché du travail (Décembre 2012)

Transmis à la CPMT en février 2013, cet avis porte sur une série d’obstacles que vivent les jeunes éloignés du marché du travail au Québec et qui fait l’objet de recommandations du CCJ. Ces obstacles portent notamment sur la méconnaissance des services qui sont offerts aux jeunes, sur l’hétérogénéité des besoins de cette clientèle ainsi que sur la rigidité du cadre de fonctionnement dans lequel œuvrent les ressources externes en employabilité pour venir en aide aux jeunes.

  • Les jeunes immigrants de première génération (Mars 2013)

L’avis soulève trois obstacles importants vécus par les jeunes immigrants de première génération, soit la non-reconnaissance des diplômes et des titres de compétences, le manque d’expérience de travail québécoise et les difficultés reliées à la langue. Pour surmonter ces obstacles, les jeunes rencontrés ont dit utiliser deux grands types de stratégies, soit l’utilisation du capital social et l’utilisation de l’aide organisée. Les obstacles et les stratégies mentionnés par les participants aux groupes de discussions menés à l’été 2012 ont fait l’objet de douze recommandations dans le cadre de cet avis.

  • La relève des jeunes dans les organisations (Décembre 2013)

Dans le cadre d’une enquête téléphonique réalisée auprès de 26 comités sectoriels de main-d’oeuvre, de deux regroupements d’entreprises et de cinq informateurs-clés, le CCJ a pu documenter à l’été 2013 différentes problématiques relatives à la relève des jeunes dans les organisations. Dans un premier temps, les intervenants ont mentionné des difficultés de recrutement et de rétention assez importantes pour l’ensemble des secteurs ainsi que divers enjeux relatifs à la formation des jeunes, tant en milieu scolaire qu’en milieu de travail. Onze recommandations ont été transmises à la CPMT.

  • Les transitions des jeunes entre l’école et le marché du travail (Mars 2014)

Les jeunes, en tant que groupe sous-représenté sur le marché de l’emploi, sont tous à risque de vivre, un jour ou l’autre, des difficultés lors de leur transition à la vie active et ce, peu importe leur niveau de scolarité. L’avis est découpé en chapitres présentant les six problématiques ciblées par le CCJ, telles que l’indécision vocationnelle chez les jeunes, les difficultés de jumelage entre l’offre et la demande de travailleurs, les notions de décrochage et d’abandon des différents programmes scolaires et mesures d’emploi, à la fois cause et conséquence des transitions plus difficiles. Ces trois problématiques peuvent – de façon non exhaustive – mettre les jeunes dans des situations de sous-emploi, de travail atypique ou de chômage. L’objectif de cet avis est de présenter une sélection de problématiques sur lesquelles les services publics d’emploi peuvent avoir davantage d’emprise afin de diminuer les impacts négatifs sur la vie des jeunes.

Rappel des recommandations

Recommandation 1

Que le gouvernement du Québec formalise des collaborations entre les secteurs de la santé et de l’emploi ainsi qu’entre les réseaux publics et communautaires en employabilité afin de mieux desservir la clientèle jeune et éloignée du marché du travail.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Québec priorise une intervention en amont auprès des jeunes plus à risque, notamment dès la 2esecondaire.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Québec augmente l’accompagnement des jeunes dans leur choix de carrière en ce qui a trait aux services d’orientation offerts en milieu scolaire et à l’extérieur de l’école.

Recommandation 4

Que le Secrétariat à la jeunesse collabore avec la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT), Emploi-Québec et le Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR) à l’identification de nouvelles façons de promouvoir les différents programmes d’études, notamment ceux en formation professionnelle et technique.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Québec investigue la catégorie des désengagés parmi les NEEF avant d’investir des sommes importantes pour leur mise en mouvement vers l’emploi.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Québec réalise (ou finance) une analyse approfondie pour bien comprendre les causes et les conséquences du sous-emploi (sous-emploi et travail atypique) au Québec (répartition selon l’âge et les régions, situation volontaire ou non, etc.) en portant une attention particulière aux jeunes.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Québec maintienne et poursuivre les différentes initiatives de sensibilisation et d’initiation à l’entrepreneuriat et au repreneuriat comme moyen de créer son propre emploi, tant en milieu scolaire qu’à l’extérieur de l’école.

Recommandation 8 (3 volets)

Que le gouvernement du Québec encourage et étudie la recherche d’innovations dans le domaine de la conciliation travail-famille-études du côté des milieux professionnels et académiques.

Que le gouvernement du Québec mette en œuvre une véritable politique de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie.

Que le gouvernement du Québec, par l’entremise du Secrétariat à la jeunesse, implante une table interministérielle visant le développement de mesures destinées aux jeunes (étudiants, travailleurs, parents) en situation de conciliation entre le travail et les autres sphères de la vie.

Recommandation 9

Que le gouvernement du Québec valorise et finance les initiatives où les jeunes peuvent expérimenter et vivre l’emploi avant d’effectuer un choix de profession ou de secteur d’emploi.

Recommandation 10

Que le gouvernement du Québec priorise la reconnaissance des acquis et des compétences (RAC) dans l’élaboration de la future politique jeunesse, pour les jeunes immigrants comme pour les jeunes ayant poursuivi un cheminement non traditionnel.

Recommandation 11

Que le gouvernement du Québec multiplie les initiatives de mentorat avant (à l’étape du choix de carrière) et pendant l’intégration en emploi des jeunes (sur les lieux de travail).

Bibliographie

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Extrait

Durant les quatre dernières années, le Comité consultatif Jeunes (CCJ) a fait preuve d’une grande proactivité en termes de recherche et de production de contenus. Dans un premier temps, il a recueilli auprès de ses membres en employabilité les principaux constats du terrain relativement aux jeunes éloignés du marché du travail (2012), constats qu’il a notés également en créant des liens avec tous les agents régionaux d’Engagement jeunesse. Dans un deuxième temps, le CCJ a sillonné le Québec pour documenter le point de vue des jeunes immigrants de première génération (2012) en ce qui a trait aux obstacles auxquels ils font face ainsi qu’aux différentes stratégies qu’ils utilisent pour les surmonter. Dans un troisième temps, le CCJ a souhaité établir des ponts avec les comités sectoriels de main-d’œuvre (CSMO) de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT) en recensant les multiples enjeux de relève de la jeune main-d’œuvre que les industries vivent au Québec (2013), mais cette fois du côté des employeurs. Finalement, dans le cadre de rencontres de travail avec deux directions d’Emploi-Québec et plusieurs membres du CCJ, la question des transitions des jeunes entre l’école et le marché du travail a été abordée, ce qui a mené le CCJ à documenter ces phénomènes par une recension des écrits (abondante mais non exhaustive). Chacun de ces travaux a mené aux dépôts d’avis à la CPMT et à Emploi-Québec. Fort de ses résultats, le CCJ est aujourd’hui emballé de constater que la majorité des sujets traités dans les dernières années font partie intégrante de la présente consultation du gouvernement du Québec en vue du renouvellement de la politique jeunesse, confirmant la justesse de ses intérêts de recherche. Le CCJ souhaite ardemment que ses principaux constats puissent guider, ou du moins éclairer, les principaux acteurs de la consultation afin de mieux accompagner les jeunes québécois qui souhaitent intégrer, réintégrer ou se maintenir en emploi.

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