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Vers le rapatriement de la Stratégie emploi jeunesse

Mots-clés : Emploi | Jeunes
Vers le rapatriement de la Stratégie emploi jeunesse

En 1940, le gouvernement fédéral votait la Loi sur l’assurance-chômage et créait, par le fait même, le Régime d’assurance-chômage du Canada. Au fil des ans, l’objectif de ce régime a été d’offrir une assurance universelle aux travailleurs qui avaient une perte temporaire de revenu associée à la perte d’un emploi. Cette assistance financière était versée sous forme d’une prestation qui, jusqu’à tout récemment, était financée à l’aide de trois sources différentes, à savoir :

  • les cotisations des travailleurs ;
  • les cotisations des employeurs ;
  • la cotisation du gouvernement du Canada.

Depuis 1990, le gouvernement fédéral ne contribue plus au régime d’assurance-chômage. Actuellement, seuls les travailleurs et les employeurs cotisent à ce régime. Parallèlement à ce désengagement, le gouvernement fédéral a procédé à une série de réformes entre 1992 et 1994 (les projets de loi C-105, C-113 et C-17), lesquelles ont touché négativement les travailleurs qui ont perdu leur emploi depuis cette période.

La dernière de ces réformes a affecté les jeunes chômeurs, les femmes et les travailleurs saisonniers en imposant aux « nouveaux travailleurs » un critère d’admissibilité additionnel, en occurrence la nécessité de compléter 910 heures, pour accéder aux prestations du régime canadien d’assurance-chômage. Cela équivaut à 26 semaines de 35 heures, comparativement à 20 semaines de 15 heures antérieurement. En fait, le nombre minimal d’heures de travail nécessaires pour que cette nouvelle catégorie de travailleurs ait droit aux prestations de ce régime est passé de 300 à 910 heures, une augmentation de 200 %.

De plus, une étude de 1999, menée par Nicole Lemieux et Pierre Lanctôt, suggère clairement que les jeunes qui ont perdu leur emploi bénéficient de moins en moins de l’assurance-chômage du gouvernement fédéral, surtout en période de ralentissement économique. Dans ce contexte, ceux-ci sont contraints de faire appel au programme québécois d’assistance-sociale. Autrement dit, la réduction de l’accès au régime d’assurance-chômage invite les jeunes à recourir plus rapidement à l’assistance-sociale. Pourtant, nous savons que ces jeunes, de même que leurs employeurs, ont cotisé annuellement pour plus de 480 millions de dollars au régime canadien d’assurance-chômage.

À cet égard, il est pour le moins incompréhensible que le gouvernement fédéral, parallèlement à une restriction de l’accès au régime, ait cumulé des surplus de 36 milliards de dollars au compte d’assurance-chômage depuis 1995, une somme qui est estimée à 42,8 milliards de dollars en 2002-2003. Ces surplus n’ont pas été réinvestis au profit des jeunes qui ont perdu leurs emplois. Ils furent plutôt annexés aux fonds du Trésor fédéral dans le but de pouvoir participer au financement d’autres éléments du budget du gouvernement fédéral, mais aussi à éponger les déficits successifs du gouvernement canadien ces dernières années.

Dans un autre ordre d’idées, les gouvernements du Québec et du Canada ont signé une entente sur la formation de la main-d’œuvre en 1998. Cette entente Québec / Canada prévoyait, notamment, le transfert des sommes du gouvernement fédéral à l’État québécois en matière de main-d’œuvre. Ces sommes, jumelées à d’autres fonds du Trésor québécois, ont permis à la Société québécoise de développement de la main-d’oeuvre et plus tard à Emploi-Québec d’amorcer le développement de diverses mesures d’employabilité pour les chômeurs et les prestataires de l’assistance-sociale.

Cependant, le gouvernement fédéral n’a pas cédé au Québec les montants qui étaient destinés aux personnes de moins de trente ans dans le cadre de cette entente. Cette manœuvre lui a permis de financer en 1998 une Stratégie emploi jeunesse destinée aux jeunes canadiens qui sont en situation de chômage ou à risque de chômage de longue durée.

En ce qui concerne cette stratégie, il est pertinent de souligner que le gouvernement canadien y a investi, en 2000-2001, près de 70 M$ seulement au Québec. En vérité, les jeunes Québécois sont pénalisés par l’incapacité de Québec et d’Ottawa de signer une entente prévoyant le transfert de l’ensemble des sommes en matière de main-d’œuvre pour l’ensemble des cohortes d’âge. Les jeunes de moins de trente ans sont les seuls à avoir été soustraits de cette entente et à faire les frais d’un dédoublement de services injustifiable.

En fait, selon une analyse de la distribution des subventions de DRHC pour les initiatives emploi jeunesse (page 26 du document), il est raisonnable de croire que les sommes qui sont actuellement distribuées par l’entremise de la Stratégie emploi jeunesse du gouvernement fédéral le sont, dans une proportion notable de cas, de façon aléatoire et incohérente pour les jeunes chômeurs ou à risque de chômage de longue durée. Selon nous, le fait que le gouvernement fédéral ait dépensé, du moins, jusqu’à tout récemment, l’argent prévu dans le cadre de cette stratégie dans une panoplie d’associations dont le mandat est éloigné de l’intervention en employabilité des jeunes, a pour conséquence immédiate de priver les Centre locaux d’emploi (CLE) du Québec, les établissements d’enseignements ainsi que les organismes communautaires de ressources financières considérables permettant d’aider concrètement les jeunes à retrouver leur autonomie sociale et à se qualifier sur le plan professionnel dans le but d’occuper un emploi.

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