Publications

27 juin 2013

L’insertion en emploi des jeunes immigrants de première génération

L’insertion en emploi des jeunes immigrants de première génération : le cas de quelques régions québécoises

Rapport de recherche

Décembre 2012

Comité consultatif Jeunes (CCJ)
533 rue Ontario E., bureau 202
Montréal (Québec) H2L 1N8
(514) 721-3051 poste 5
info@ccjeunes.org

Recherche et rédaction
Alexandra Charette, M. Sc.
Samuel Vaillancourt, M.A. (chap. 2)

Coordination
Emilie Grégoire, MAP

Révision linguistique
Thierry Bruyère
Emilie Grégoire

Membres du comité d’orientation
Association des centres locaux de développement du Québec :Jeanne Marcotte
Centre Génération Emploi : Sid Boukhalfa
Chantier de l’économie sociale : Rym Lamrani
Collectif des entreprises d’insertion du Québec : Darllie Pierre-Louis
Regroupement des organismes québécois pour le développement de l’employabilité : Valérie Roy
Réseau des services spécialisés de main-d’œuvre :Sylvie Baillargeon
Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec : Julien Tessier
Table de concertation des forums jeunesse régionaux du Québec : Elie Belley-Pelletier
Pour la CPMT : Lyne Fortin
Pour le CCJ : Emilie Grégoire

Remerciements particuliers à Olivier Beaulieu-Mathurin

© Comité consultatif Jeunes 2013
Bien que le genre masculin soit souvent utilisé dans le texte, les mots relatifs aux personnes désignent aussi bien les femmes que les hommes.

Pour des raisons de confidentialité, des noms fictifs ont été attribués à chacun des participants.

Cet avis a été réalisé grâce à une aide financière de la Commission des partenaires du marché du travail

CRÉ Montérégie-Est
CRÉ Vallée-du-Haut-St-Laurent
Emploi-Québec – Direction régionale Estrie
Forum Jeunesse de la région de la Capitale-Nationale

et grâce à la collaboration des organismes suivants :

Sherbrooke

• Carrefour jeunesse-emploi
• Centre d’orientation et de recherche d’emploi (CORÉE)
• Engagement Jeunesse Estrie
• ProGestion Estrie
• Récupex
• Service d’aide aux Néo-Canadiens (SANC)

Capitale-Nationale

• CJE Capitale-Nationale
• GIT
• Option-Travail Cj-e
• Recyclage Vanier
• SOIIT

Montérégie Est

• CJE Granby
• CJE Pierre-de-Sorel
• CJE St-Jean
• CDC Pierre-de-Saurel
• CLD Haut-Richelieu
• CLE de Sorel
• COFFRE L’ANCRE
• Engagement Jeunesse Montérégie Est
• Espace Carrière
• Forum-2020
• Maison de la Famille des Maskoutains
• Orienthèque
• Recyclo-Centre
• SERY
• Centres de formation professionnelle et d’éducation des adultes Sorel-Tracy

Vallée-du-Haut-St-Laurent

• Circonscription de Vaudreuil-Soulanges – Relations communautaires
• CJE Châteauguay
• CJE Valleyfield
• CJE Huntington
• CJE Vaudreuil
• CLD Châteauguay
• CLD Haut-St-Laurent
• CLE Châteauguay
• CLE Vaudreuil
• Club de recherche d’emploi de Châteauguay
• Collège de Valleyfield
• Commission scolaire Vaudreuil
• Communauté latinoaméricaine de Châteauguay
• CRESO
• PS Jeunesse
• Réseaux Emploi-Entrepreneurship (REE)
• Ville de Valleyfield
• Ville de Vaudreuil

Pour les groupes de Montréal, Longueuil, Laval, Terrebonne et St-Jérôme

• AMINATE
• Cap Emploi
• CJE des Moulins
• CJE La Porte
• CJE Rivière-du-Nord
• CJE Laval
• CJE Centre Nord
• COFFRET Le méridien
• Engagement Jeunesse Laval
• Engagement Jeunesse Montréal
• Intégration jeunesse du Québec
• Opération Placement Jeunesse
• Perspective Carrière
• Perspectives Nouvelles
• Petites Mains
• PITREM

Table des matières
Liste des acronymes
Liste des tableaux

Introduction

Le marché de l’emploi au Québec pose divers défis aux différents sous-groupes de la population qui tentent de s’y tailler une place à leur mesure. La conjoncture économique actuelle, les trajectoires professionnelles et personnelles et les exigences de certains secteurs du marché de l’emploi sont autant de facteurs qui influent sur l’accès à un emploi satisfaisant les attentes des candidats. Cette recherche a pour objectif de porter un regard analytique sur les processus d’insertion en emploi des jeunes immigrants de première génération. Partant d’une méthode de recherche qualitative, cette étude exploratoire vise à mieux comprendre les processus par lesquels les nouveaux arrivants s’intègrent au marché de l’emploi, les obstacles qu’ils rencontrent ainsi que les liens entre les attentes en termes d’emploi qu’ils avaient à l’arrivée et leurs conditions de travail actuelles.

En premier lieu, nous présentons une recension des écrits récents portant sur le thème de l’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration au Québec. Les écrits théoriques et empiriques qui la sous-tendent posent les bases conceptuelles de la recherche à réaliser. Un portrait global de la situation socioéconomique et d’emploi des immigrants vivant au Québec est suivi d’une revue de certaines études abordant le sujet de l’utilisation des ressources en employabilité disponibles au Québec. Finalement, la revue de la littérature propose une brève analyse des principaux obstacles rencontrés par les nouveaux arrivants lors de leur recherche d’emploi.

Le second chapitre propose une ré-interrogation et une réinterprétation des données d’une enquête par questionnaire portant sur les jeunes éloignés du marché du travail au Québec. Construite à partir d’un cadre qui analyse la problématique de l’intervention auprès d’une clientèle cible, ses données permettent de distinguer les réponses provenant de répondants immigrants et non-immigrants. Les résultats permettent notamment d’obtenir des informations très actuelles sur la question peu étudiée de la perception et de la satisfaction des jeunes – immigrants et non-immigrants – de l’aide à l’emploi qui leur est offerte. Au terme de tests statistiques, il s’avère que les jeunes issus de l’immigration semblent significativement moins satisfaits que les non-immigrants vis-à-vis de l’aide reçue, notamment parce que les attentes, en amont, ne sont pas les mêmes chez les immigrants et les non-immigrants. Les résultats de cette analyse visent à orienter les questions de recherche de l’étude qualitative qui est réalisée par la suite. Par son caractère qualitatif et exploratoire, elle est en mesure d’explorer en plus de détails les informations provenant des questionnaires.

Le troisième chapitre fait état des choix méthodologiques qui ont été effectués afin de réaliser la recherche qualitative la plus complète que possible. À la lumière de la revue de littérature sur l’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration et de la réinterprétation des données de la recherche de Nolet (2012), force est de constater que peu d’information détaillée sur les modes, pratiques et motifs d’utilisation des différentes ressources d’aide à l’emploi se destinant aux jeunes immigrants sont disponibles. La collecte de données par des entretiens de groupe (focus groups) est suivie d’une analyse interprétative des contenus des discussions. Les informations tirées de ces discussions composent la plus vaste partie des données ethnographiques analysées.

Les deux chapitres d’analyse présentent respectivement un portrait des défis de l’insertion en emploi des jeunes immigrants et une analyse des stratégies mises en place par ceux-ci pour surmonter les obstacles qui jonchent leurs parcours. Dans un premier temps, le portrait analytique des obstacles à l’employabilité des immigrants de première génération vise d’une part à mieux connaître la nature de ces obstacles spécifiques au sous-groupe étudié, et d’autre part à comprendre la façon dont les participants à l’étude se situent par rapport à ces obstacles et la façon dont ils perçoivent et interprètent la situation.

Dans un second temps, l’analyse des stratégies mises en place par les jeunes immigrants pour intégrer le marché de l’emploi vise à connaître les perceptions qu’ont les jeunes nouveaux arrivants des ressources – organismes, programmes, projets, mesures – d’aide à l’emploi qui leur sont offertes. Elle prétend à la fois comprendre les raisons de l’utilisation des ressources d’aide en employabilité, et les points de vue et opinions sur l’utilité de celles-ci pour des gens comme eux. L’analyse aborde également les stratégies alternatives à l’aide organisée auxquelles les nouveaux arrivants recourent lorsque les besoins en emploi s’avèrent urgents, et les résultats de la recherche d’emploi par des méthodes classiques sont peu concluants. L’intérêt de ces deux chapitres d’analyse réside certainement dans la façon dont l’important corpus de données qualitatives autorise un certain avancement des connaissances sur le thème de l’insertion en emploi des jeunes immigrants, et plus précisément à propos des perceptions de ce sous-groupe de leur positionnement vis-à-vis du marché de l’emploi et des ressources en employabilité offertes aux Québécois.

Chapitre 1 L’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration au Québec : état actuel de la question Introduction

L’insertion en emploi des immigrants, jeunes et moins jeunes, présente de nombreuses particularités et pose des défis complexes dans le contexte socioéconomique québécois. La revue de la littérature présentée ici se fonde sur les écrits théoriques et empiriques les plus pertinents et récents qui étudient la question de l’insertion et des conditions d’emploi des personnes immigrantes au Québec. Dans un premier temps, nous dressons un portrait global de la situation socioéconomique et d’emploi des immigrants de première génération qui vivent sur le territoire québécois. Pour ce faire, nous nous référons aux résultats du travail du comité d’adaptation de la main-d’œuvre pour personnes immigrantes (CAMO-PI, 2006) et aux données publiées par le Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles (MICC, 2009 ; 2010 ; 2011). L’étude intitulée Un portrait de l’emploi chez les immigrants des cinq régions de la métropole de Montréal, 2006 publiée par Bélanger et Bastien (2010) sera également recensée et contribuera à ce portrait global.

Ensuite, la recension des écrits abordera l’utilisation que font les jeunes immigrants des services d’employabilité qui leur sont offerts. Outre ceux du CAMO-PI, les travaux de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et des chercheurs Chicha et Charest (2008) contribueront à documenter cette section. Finalement, la revue de la littérature abordera les obstacles rencontrés par les immigrants lors de leur recherche d’emploi. Pour traiter de cette question, nous retenons les travaux suivants : L’intégration des immigrés sur le marché du travail à Montréal : politiques et enjeux (Chicha et Charest, 2008) ; L’origine nationale et l’insertion économique des immigrants au cours de leurs dix premières années au Québec (Renaud, Piché et Godin, 2003) ; Recension de politiques et expériences d’intégration en emploi des immigrants dans trois grandes RMR canadiennes d’immigration » (Bastien et Bélanger, 2010) ; et Immigration au Québec : Politiques et intégration au marché du travail (Boudarbat et Boulet, 2010).

Portrait de la situation socioéconomique et d’emploi des jeunes immigrants
Dans cette section, nous présentons d’abord un bilan des caractéristiques socioéconomiques générales des immigrants arrivés au Québec entre 2009 et 2011. Ce portrait est dressé à partir des données compilées par le MICC, notamment dans les bulletins statistiques sur l’immigration permanente pour les années 2009, 2010 et 2011, ainsi que du document Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 produit par la Direction de la recherche et de l’analyse prospective (MICC, 2012). La seconde sous-section traitera plus particulièrement du cas de Montréal et la troisième présentera un portrait plus détaillé de la question de l’emploi et de l’immigration dans certaines régions québécoises.

Statistiques sur la situation socioéconomique des immigrants
En 2011, 51 727 immigrants se sont installés au Québec ; ils étaient moins nombreux que les nouveaux arrivants de 2010 (53 982), mais plus nombreux qu’en 2009 (49 488) [1].

La plupart des immigrants sont jeunes : 69,9 % ont moins de 35 ans lors de leur arrivée en 2011. La structure d’âge est semblable pour 2010 (70,1 % d’immigrants de moins de 35 ans, 19,3 % pour le groupe 35 à 44 ans et 10,6 % pour les 45 ans et plus) [2] et 2009 (70,3 % d’immigrants de moins de 35 ans, 20,9 % pour le groupe 35 à 44 ans et 8,8 % pour le groupe 45 ans et plus) [3].

Tableau : Âge des immigrants en 2011 [4]

En ce qui a trait à la répartition des immigrants par rapport au sexe, il y a un nombre à peu près égal d’hommes (50,1 %) et de femmes (49,9 %) qui s’installent au Québec en 2011 [5]. Cette proportion est sensiblement la même en 2010 (50,6 % pour les hommes et 49,4 % pour les femmes) [6] et en 2009 (50,3 % pour les hommes et 49,7 % pour les femmes) [7].

Les immigrants qui arrivent dans les catégories d’immigration économiques sont les plus nombreux, constituant près de 70 % de l’immigration totale à chaque année.

Tableau Catégorie d’admission des immigrants, 2009 à 2011

Pour ce qui est de la connaissance du français, 63,4 % des nouveaux arrivants en 2011 disent connaître le français, comparativement à 65,1 % en 2010 et 64 % en 2009 [8]. Il est à noter que 19,8 % des immigrants arrivés en 2011 ne connaissent ni le français ni l’anglais, contre 20,4 % en 2010 et 19,8 % en 2009 [9]. Ainsi, selon Chicha et Charest (2008), environ un immigrant sur cinq peut éprouver des problèmes d’insertion économique à cause de son manque de connaissance des principales langues d’usage, et plus particulièrement du français, langue officielle au Québec.

On peut constater une légère progression de l’immigration provenant de l’Asie (25,1 % en 2009 et 25,4 % en 2010), et une légère diminution du nombre de nouveaux arrivants en provenance et d’Europe. Pour ce qui est de l’immigration américaine, elle progresse lentement, tandis que celle de l’Océanie demeure relativement stable [10].

Tableau – Continent de naissance des immigrants, de 2009 à 2011 [11]

Le marché du travail québécois pour l’immigrant entre 2009 et 2010

Taux d’activité, taux d’emploi et taux de chômage

La crise économique mondiale a eu un impact sur le taux d’activité [12] des immigrants en 2009 et 2010. Le taux d’activité était de 62,3 % en 2008, est descendu à 61,7 % en 2009 et a effectué une remontée à 64 % en 2010 [13]. Le taux d’emploi [14]des immigrants a été aussi affecté. Il était de 55,4 % en 2008, est descendu à 53,3 % en 2009 et a rebondi à 56 % en 2010 [15]. Cette progression du taux d’activité et du taux d’emploi depuis la crise économique a occasionné une diminution de l’écart entre le taux d’activité de la population immigrante et celle de la population non- immigrante. Il est à noter que les taux d’activité et d’emploi des femmes immigrantes sont inférieurs à ceux des hommes immigrants, et à ceux des femmes non-immigrantes. En ce qui a trait au taux d’emploi, ce dernier est de 56 % pour les immigrants en 2010 contre 60,2 % dans l’ensemble de la population. De 2009 à 2010, le taux d’emploi des immigrants a augmenté de 2,7 %, alors qu’il a augmenté de 0,4 % dans le reste de la population. Pour ce qui est du taux de chômage, il est de 12,5 % pour la population immigrante en 2010, par rapport à 13,7 % en 2009 [16]. Pour la population non-immigrante, le taux de chômage est de 8 % en 2010, comparativement à 8,5 % en 2009.

Emploi et continents de naissance
Le taux d’activité selon l’origine nationale en 2010 se divise comme suit : Amérique latine (69,2 %), Afrique (68,8 %), Asie (65,4 %) et Europe (58 %). Quant aux taux d’emploi en 2010, ils se répartissent ainsi : Amérique latine (59,4 %), Afrique (58,1 %), Asie (55,6 %) et Europe (53,4 %). En 2010, le taux de chômage est moins élevé chez les personnes immigrantes provenant de l’Europe (7,9 %), ce qui est à peu près équivalent au taux de chômage de la population non-immigrante au Québec [17].

Scolarité
Le taux d’activité et le taux d’emploi des personnes immigrantes peuvent aussi varier selon leur niveau de scolarité. En fait, plus le niveau de scolarité est élevé, plus les immigrants ont un taux d’activité et un taux d’emploi élevés. Le taux d’activité des personnes immigrantes ayant un grade universitaire est de 72,9 % en 2009 et de 76,9 % en 2010, alors que celui des immigrants n’ayant aucun diplôme est de 36,6 % en 2009 et 38,5 % en 2010 [18]. On constate également que le taux d’activité et le taux d’emploi de la population immigrante, peu importe la nature du diplôme, ont diminué au cours des dernières années, alors que ceux de la population non immigrante sont restés relativement stables.

Types d’emploi
Les personnes immigrantes occupent souvent des emplois dans l’industrie des services (82,5 %) et dans celle de la production de biens (17,5 %) en 2010 [19]. Il y a surreprésentation de la population immigrante dans les secteurs scientifique et technique (11,7 % de travailleurs immigrants) par rapport à la population non immigrante (7,6 %), alors qu’il y a sous-représentation dans le secteur de la construction (3,4 % de travailleurs immigrants contre 5,9 % de non-immigrants). Les travailleurs immigrants occupent plus souvent des emplois dans les sous-secteurs de la vente et des services (21,4 %), du commerce de détail (14,4 %), de la santé et des services sociaux (13,7 %) et de la fabrication (13,4 %) [20].

Emplois permanents et emplois temporaires
Pour ce qui est de la stabilité de l’emploi, 84,9 % de la population immigrante occupe un emploi permanent en 2010 contre 85,6 % de la population non-immigrante. Par contre, 15,2 % de la population immigrante occupe un emploi temporaire, contre 14,4 % de la population non-immigrante [21]. Ce sont les immigrants récents (cinq ans et moins) qui occupent le plus souvent des emplois temporaires. Cette tendance tend à s’atténuer au fil du temps : de 25,6 % des immigrants arrivés au Québec depuis cinq ans et moins, elle diminue à 17,6 % chez les immigrants arrivés depuis 5 à 10 ans et à 11,1 % pour ceux qui sont au pays depuis plus de 10 ans [22].

Travail autonome
Il est intéressant de constater que la proportion d’immigrants qui font du travail autonome est de 19,4 % contre 14 % pour la population non-immigrante. La durée de résidence semble être un facteur déterminant dans ce choix. En 2010, 11 % des immigrants arrivés il y a moins de 5 ans choisissent le travail autonome contre 23 % pour ceux qui sont arrivés il y a plus de 10 ans [23]. Est-ce par choix ou une question de culture ? Certains chercheurs, dont Bélanger et Bastien et (2010) et Chicha et Charest (2008) suggèrent que cette question peut mener à de nouvelles pistes d’analyse de la qualité des services – notamment d’aide à l’emploi – offerts aux nouveaux arrivants.

Salaire
Le salaire hebdomadaire moyen (pour un emploi à temps plein) est de 602,73$ pour les immigrants arrivés il y a moins de 5 ans contre 746,62$ pour ceux arrivés il y a plus de 10 ans. La durée de résidence a donc une certaine incidence sur les conditions salariales des nouveaux arrivants. Entre 2006 et 2010, le salaire hebdomadaire moyen des immigrants a augmenté de 10,9 % contre 10,4 % pour la population non-immigrante [24].

Statistiques montréalaises
La région métropolitaine de Montréal comporte des activités économiques variées, notamment dans les secteurs industriel, commercial, culturel et financier. Selon Bélanger et Bastien et (2010), les perspectives d’emploi y sont favorables dans plusieurs domaines, dont la consommation, la santé, l’enseignement et les services publics et parapublics.

Une grande majorité d’immigrants installés au Québec vivent à Montréal : selon le recensement de 2006, près de 88 % d’entre eux, soit environ 695 000 individus, vivent à Montréal et dans les environs (Bélanger et Bastien 2010 : 4). Plus de 172 617 immigrants se sont installés à Montréal entre 2006 et 2011, ce qui porte le nombre total de personnes immigrantes à plus de 1 958 000. En outre, une grande majorité des immigrants arrivés au Québec entre 1991 et 2006 résident sur le territoire de l’agglomération de Montréal. La population immigrante y est aussi plus diversifiée que dans le reste du Québec.

Statistiques régionales
Cette sous-section présente le portrait de différentes régions du Québec accueillant des nouveaux arrivants et développant des programmes d’aide à l’emploi pour cette clientèle spécifique. Une étude réalisée par le CAMO-PI (2006) relate certaines données relatives à l’insertion en emploi des immigrants dans les régions du Bas-Saint-Laurent, de la Capitale-Nationale, du Centre-du-Québec, de la Chaudière-Appalaches et de l’Outaouais.

Le Bas-Saint-Laurent
Le Bas-Saint-Laurent est une région où plusieurs industries cohabitent, dont les secteurs touristique, agroalimentaire et forestier. Le domaine manufacturier est aussi bien développé, notamment en métallurgie et transport. Les perspectives d’avenir sont variées, dont plusieurs projets dans les domaines éolien, biotechnologique et diamantaire. L’industrie de l’information et des télécommunications est aussi en plein essor.

Selon des données recueillies par l’Institut de la statistique du Québec (2012), la population totale de la région du Bas-Saint-Laurent était de 200 462 habitants en 2011 [25]. De 2006 à 2011, 346 immigrants y ont emménagé. Le MICC évalue la population immigrante à environ 1 % de la population totale. Il est aussi à noter que la plupart des immigrants qui s’installent dans le Bas-Saint-Laurent s’établissent à Rivière-du-Loup.

La Capitale-Nationale
La région de la Capitale-Nationale connaît un essor économique important depuis les dix dernières années. Les domaines pour lesquels on prévoit une hausse d’emplois significative sont diversifiés, notamment les services professionnels, scientifiques et techniques, la gestion, l’administration, la santé, le tourisme, le transport et le commerce de détail. La région de la Capitale-Nationale est aussi reconnue pour développer les secteurs de la recherche et de la technologie de pointe : selon le CAMO-PI (2006), ces domaines représentent environ 6,5 % des emplois dans la région, ce qui constitue la plus haute proportion au Québec. De plus, la région de la Capitale-Nationale est le siège politique du Québec : environ 40 000 personnes sont employées dans la fonction publique.

Les perspectives d’emploi dans la région de la Capitale-Nationale pour les années à venir semblent encourageantes, même si l’organisme estime que la dénatalité et le vieillissement de la population de la région puissent avoir des conséquences néfastes sur le marché du travail dans la région. En ce sens, les institutions économiques en place (dont le MICC et la Conférence régionale des élus (CRÉ)) croient que l’immigration pourrait éventuellement pallier cette pénurie, même si l’immigration n’est pas si importante dans la région en ce moment. En effet, environ 12 000 personnes immigrantes se sont installées dans la région de la Capitale-Nationale entre 2006 et 2011, parmi une population totale de 701 204 habitants en 2011 [26]. Le CAMO-PI (2006) mentionne par ailleurs que le haut taux de scolarisation des immigrants s’avère un problème, car bien des emplois sont réglementés (notamment par des ordres professionnels) et que les immigrants doivent passer par des processus parfois fastidieux avant de pouvoir intégrer le marché du travail.

Le Centre-du-Québec
La région de Centre-du-Québec offre surtout des emplois dans les secteurs agroalimentaire et manufacturier. Selon le CAMO-PI (2006), on y retrouve aussi de nombreuses entreprises de domaines variés tels que le papier, le plastique, et le transport et la transformation des métaux. Depuis les années 1990, le Centre-du-Québec est une figure de proue en termes d’accueil et d’intégration des immigrants et de nombreuses familles réfugiées s’y sont établies. De 2006 à 2011, plus de 1 846 immigrants se sont installés dans la région, qui comporte plus de 233 500 habitants en 2011 [27]. Par contre, comme dans plusieurs régions au Québec, le vieillissement de la population, la dénatalité et la mondialisation ont des effets néfastes sur le développement socioéconomique du Centre-du-Québec. Toutefois, il semble que pour l’instant, cette région s’en tire relativement bien en termes d’employabilité et de rétention des immigrants.

Chaudière-Appalaches
La région de Chaudière-Appalaches est reconnue pour être une région à la fois agricole, manufacturière et touristique. On y retrouve plusieurs industries de domaines variés tels la transformation du bois, et le secteur minier. Les activités du secteur tertiaire prennent aussi beaucoup d’importance, notamment le commerce et la restauration. Du point de vue de l’immigration, il ne s’agit pas encore d’une région d’accueil très reconnue. Entre 2006 et 2011, quelques 776 immigrants se sont installés dans la région, qui compte 406 401 personnes en 2011 [28]. Comme toutes les régions du Québec, la région de Chaudière-Appalaches connaît différents défis démographiques qui occasionnent une certaine dévitalisation. Jusqu’en 2011 (où une entente a été signée entre le MICC et la CRÉ de Chaudière-Appalaches), ces enjeux ne semblent pas affecter la région de façon importante.

L’Outaouais
Une forte proportion des emplois en Outaouais est concentrée dans le secteur tertiaire. Selon le CAMO-PI (2006), près de 83 % des emplois sont occupés dans ce secteur en 2006. En outre, cette région est considérée un centre de haute technologie, dont la croissance est l’une des plus fortes en Amérique du Nord. Elle comporte aussi de nombreux employés du gouvernement fédéral. Plus de 6 900 immigrants se sont installés entre 2006 et 2011, l’Outaouais comportant une population totale de 363 181 habitants en 2011 [29]. La plupart des immigrants s’installent à Gatineau, la deuxième ville d’importance en termes de proportion d’immigrants après Montréal (environ 7%). On compte des immigrants majoritairement en provenance d’Afrique francophone, de Colombie, d’Haïti, d’Europe et de Chine. C’est la région qui connaît la plus forte croissance démographique au Canada : contrairement aux autres régions québécoises, les défis démographiques que constituent le vieillissement de la population et la dénatalité ne sont pas considérés comme des priorités pour revitaliser la région. Ceci étant, Gatineau connaît une forte croissance, mais pas nécessairement ses environs : des employés qualifiés sont donc essentiels à la vitalité de ses MRC. Par ailleurs, les personnes immigrantes tendent à s’installer à Gatineau pour profiter d’un marché du travail en plein essor. Le défi de l’immigration et de l’employabilité des personnes immigrantes dans la région de Gatineau s’articule surtout autour des lieux de travail des immigrants : selon le CAMO-PI (2006), plus de 70 % des immigrants qui vivent à Gatineau travaillent en Ontario. L’Outaouais peut être considéré comme un chef de file en termes de structures mises en place pour intégrer les immigrants. La reconnaissance des acquis est au cœur des priorités d’insertion en emploi des nouveaux arrivants, ce qui peut conférer un avantage comparatif à cette région par rapport à d’autres.

Conclusions

Diverses conclusions peuvent être tirées à la suite de l’analyse du portrait de l’immigration au Québec.

En premier lieu, on constate qu’une majorité d’immigrants sont jeunes (sept individus sur dix n’ont pas encore 35 ans). Il faut certainement considérer cette donnée dans le développement de mesures adéquates pour l’intégration des immigrants sur le marché du travail. De plus, la plus grande catégorie d’admission est la catégorie économique. Les immigrants qui s’installent au Québec sont en majorité recrutés sur la base de leurs qualifications acquises à l’étranger ; ils ont la volonté d’intégrer le marché du travail. Par ailleurs, la plupart des immigrants travaillent dans les industries reliées aux services. Il serait intéressant d’analyser plus en profondeur cette question, afin de savoir si ces emplois sont liés à la scolarité, aux diplômes et aux titres de compétences acquis à l’étranger.

Dans un autre ordre d’idées, les sous-sections portant sur Montréal et les régions dressent des portraits qui établissent une différence entre la réalité de la métropole et celle de la région au Québec. En effet, même si c’est aussi le cas dans une certaine mesure à Montréal, les problématiques du vieillissement de la population et de la dénatalité représentent des défis de plus en plus importants pour les régions. De plus, la mondialisation a transformé les perspectives dans plusieurs secteurs (plus particulièrement les secteurs manufacturier et commercial). Certes, le marché du travail dans les régions poursuivra le cours de sa transformation durant les prochaines années. Dans cette optique, le CAMO-PI (2006) exhorte le gouvernement de miser sur l’immigration pour faire face à certains de ces enjeux. De nombreuses initiatives, tant à Montréal qu’en région ont été mises de l’avant depuis quelques années ; or, il semblerait que les différents ministères auraient avantage à adopter une vision commune par la mise sur pied d’un projet rassembleur (CAMO-PI, 2006). En outre, un travail de sensibilisation et d’éducation semble nécessaire pour faciliter l’intégration sociale et économique des immigrants.

La situation diffère à Montréal, puisque la métropole accueille près des deux-tiers de la population immigrante du Québec. Montréal représente un attrait certain pour les personnes immigrantes, et ce pour diverse raisons, dont l’emploi, la diversité et la présence de certains groupes ethnoculturels. Toutefois, le taux de chômage et les revenus moindres par rapport au reste de la population constituent toujours des défis importants. Tel que mentionné par Bélanger et Bastien (2010), la situation est complexe à Montréal : il est difficile de généraliser et d’analyser des groupes immigrants plus ou moins homogènes. Il importe alors de considérer une multitude de facteurs dans l’analyse. Dans cette optique, les données amassées lors de l’analyse du cas montréalais doivent être utilisées avec précaution et ne peuvent être généralisées.

Les services d’employabilité offerts aux jeunes immigrants

Cette section s’intéresse aux services en employabilité offerts et utilisés par les jeunes immigrants au Québec. Nous présentons également un bref portrait des principaux plans et cadres qui gèrent ces services au niveau de la province.

Bref portrait des services d’employabilité au Québec

Il existe une gamme de services d’employabilité très variée au Québec. Ils prennent des formes différentes, de la formation de courte durée à celle qui s’étend sur plusieurs mois, en passant par des cours de langue et des programmes qui visent à faire reconnaître des acquis dans certains domaines. Plusieurs organismes offrent aussi un soutien aux immigrants dans leur insertion sur le marché du travail.
Une méconnaissance des différentes facettes du marché du travail québécois (tel le recrutement) peut être un obstacle de taille à l’accès à l’emploi. Dans cette optique, des programmes d’employabilité pour les immigrants sont mis en place pour développer leurs compétences en recherche d’emploi et, ultimement, intégrer et se maintenir en emploi. Tel que le mentionnent Chicha et Charest (2008), ces compétences touchent deux aspects : la dimension plus formelle (contexte légal et juridique du marché du travail) et la dimension informelle (les compétences interpersonnelles, appelées aussi soft skills).

En ce qui concerne l’aspect formel, le gouvernement met à la disposition des nouveaux immigrants différents documents explicatifs sur les lois et règles du monde du travail québécois et canadien. Les organismes communautaires appliquent les initiatives gouvernementales en organisant des séances d’information où plusieurs sujets sont abordés, notamment les normes du travail et la santé et sécurité au travail.

En ce qui a trait aux compétences interpersonnelles, différents programmes sont mis en place au Québec pour aider les immigrants, notamment dans les organismes d’aide à l’emploi. Ceci étant, Chicha et Charest (2008) soulignent que le rôle des organismes communautaires est indéniable dans ce domaine aussi. Ils offrent des formations plus spécialisées sur une recherche d’emploi efficace, la rédaction de curriculum vitae, la préparation à l’entrevue de sélection, etc. Chicha et Charest (2008 :26) notent aussi que les organismes communautaires à vocation d’aide aux nouveaux arrivants offrent des services personnalisés : « …une approche de counselling interculturel qui prend en considération le parcours migratoire individuel de chaque participant ».

De plus, ces organismes communautaires sensibilisent les employeurs à la question de l’immigration et agissent ainsi comme « courroie de transmission » entre les entreprises et les immigrants. Les auteurs constatent que le rôle des organismes communautaires est essentiel, mais mais que la nature et le détail des services offerts sont méconnus des organismes gouvernementaux (dont Emploi-Québec). Ils reçoivent peu de financement et offrent dans cette perspective des services collectifs, alors que les immigrants semblent avoir besoin de services encore plus personnalisés, en lien avec leur parcours individuel. En outre, il y a une telle multiplicité d’acteurs et d’organismes de soutien que les immigrants ont parfois du mal à s’y retrouver. Les immigrants se retrouvent aussi confrontés au problème des critères d’éligibilité : un programme peut très bien convenir à un immigrant selon des critères précis auxquels il correspond « formellement » mais qui ne conviennent pas à ses besoins réels. Bref, les chercheurs estiment que, bien qu’il y ait une diversité de services d’employabilité, il semble que l’offre ne suffise pas à la demande et que cette offre ne soit pas toujours adéquate.

Montréal
Une multitude d’organismes, dont un nombre significatif est financé par Emploi-Québec, dessert la clientèle de Montréal. Également, de nombreuses initiatives ont vu le jour et sont actuellement en cours pour favoriser l’intégration socioéconomique des immigrants. À titre d’exemples, le MICC a développé en collaboration avec la métropole en 2009 le plan Défi Montréal comportant deux volets : la mobilisation, où il est question de faciliter l’intégration des immigrants en collaborant avec tous les acteurs concernés, et les projets, où différentes stratégies sont mises en œuvre pour concrètement intégrer les immigrants au marché du travail [30]. Également, un vaste projet a été coordonné par le Conseil Emploi Métropole (initié par la Table métropolitaine de Montréal et Emploi-Québec) afin de réaliser un inventaire des pratiques d’intégration des immigrants en emploi de la RMR de Montréal. Ont également participé à la démarche les réseaux d’Emploi-Québec, du MICC et du milieu de l’enseignement.

Les services d’employabilité dans les différentes régions

Bas-Saint-Laurent
Le Bas-Saint-Laurent a mis en place des politiques régionales et locales pour favoriser l’employabilité des immigrants au cours des dernières années. Celles-ci s’adressent plus particulièrement aux jeunes immigrants. La première est une entente entre la CRÉ et le MICC et porte sur la régionalisation de l’immigration (2002-2005) [31], qui vise à accueillir et intégrer les nouveaux arrivants en région. Cette entente a été renouvelée au fil des années, dernièrement en 2011. La CRÉ s’est plus particulièrement concentrée sur un projet d’établissement en région d’étudiants réunionnais, qui, après leurs études, devaient être intégrés au marché du travail. Pour le moment, aucune donnée concernant le succès de ce programme n’est disponible, mais le MICC et la CRÉ font une évaluation satisfaisante des perspectives d’avenir que présente le projet.

La Capitale-Nationale
À la suite du plan d’action Des valeurs partagées, des intérêts communs [32], développé par le MICC avec des partenaires sociaux et économiques en 2004, la région de la Capitale-Nationale a été identifiée comme un pôle important pour l’intégration des immigrants au cours des prochaines années. Une entente régionale entre Emploi-Québec et le MICC en vue de mieux intégrer les immigrants a été ensuite été signée. La Ville de Québec et le MICC ont aussi signé une entente pour favoriser l’immigration comportant trois grands objectifs : la promotion, l’accueil et le rapprochement entre les immigrants et la population [33]. En 2011, l’Entente spécifique sur l’accueil et l’intégration des personnes immigrantes dans la région de la Capitale-Nationale a été signée entre la CRÉ de la Capitale-Nationale (qui est aussi le gestionnaire de l’entente) et le MICC. Les objectifs de cette entente consistent à financer des projets visant à mobiliser les partenaires, favoriser l’intégration des immigrants, sensibiliser et éduquer la population en termes d’immigration [34].

Centre-du-Québec
Le Centre-du-Québec a signé différentes ententes de régionalisation avec le MICC, la première entente couvre la période de 2000 à 2005 et une seconde entre 2001 et 2004 pour la mise en œuvre de projets spécifiques. Une entente régionale a aussi été signée en 2006, où il est question de faciliter l’accueil et l’installation des nouveaux immigrants. De cette entente est née le Comité centricois en immigration qui a pour objectif d’initier des projets d’envergure régionale et de développer des structures de concertation adéquates. Ces ententes sont cruciales pour le Centre- du-Québec, étant donné qu’il accueille à chaque année de nombreux réfugiés qui devront intégrer le marché du travail.

Chaudière-Appalaches
En 2010, le MICC et la CRÉ de la Chaudière-Appalaches ont signé une entente en régionalisation de l’immigration dans le but de développer les projets déjà en place, mais aussi de permettre un essor de l’immigration dans la région [35]. Auparavant, il n’existait pas d’ententes ou d’action concertée pour accueillir et intégrer les immigrants dans la région.

Outaouais
Il existe de nombreuses ententes entre le MICC et les divers organismes de concertation en Outaouais. D’abord, le plan d’action régional développé par le MICC vise à mettre en œuvre des stratégies pour « repérer » les immigrants et leur offrir des services. Le plan met aussi de l’avant des stratégies pour former et favoriser l’adaptation des immigrants en fonction des besoins sur le marché du travail.

Conclusions
Chicha et Charest (2008) suggèrent qu’il y a un sous-financement des services d’employabilité offerts par les organismes communautaires, qui constituent pourtant des acteurs de première ligne. Selon eux, ces restrictions budgétaires provoquent un « gaspillage humain », puisque les immigrants qualifiés ne reçoivent pas nécessairement les services d’employabilité de façon adéquate ou assez rapide pour optimiser leur insertion économique. De plus, les auteurs notent qu’il est difficile pour les immigrants de faire un choix rationnel en termes de parcours professionnel avec une telle multiplicité d’acteurs et de stratégies. Sans vue d’ensemble cohérente des programmes et politiques disponibles, les immigrants peuvent se trouver à prendre des décisions plus ou moins « informées » quant à leur avenir professionnel.

Tout comme dans le cas du portrait général de l’immigration au Québec, on peut noter une différence entre la réalité métropolitaine de Montréal et la réalité des régions du Québec en termes de politiques d’employabilité s’adressant aux immigrants. La revue de la littérature indique que les régions ont plusieurs défis à relever pour mettre en place des actions concertées et des stratégies qui correspondent à leurs besoins respectifs (CAMO-PI, 2006). Selon les auteurs, l’approche « multi-secteur » devrait en outre être considérée pour chaque région et retravaillée dans certains cas. De plus, la revue de la littérature semble démontrer qu’il y a un manque de planification des ressources régionales en termes d’immigration : il faudrait instaurer une organisation dans chaque région qui veillerait au recrutement, à l’accueil et à l’intégration des immigrants.

Obstacles rencontrés par les jeunes immigrants
Cette section traite des études qui font état des obstacles rencontrés par les immigrants lors de leur recherche d’emploi. Il est à noter que ces études ne traitent pas nécessairement du cas des jeunes immigrants, mais bien de l’insertion des immigrants au marché du travail au Québec et, plus largement, au Canada. Elles offrent toutefois de bonnes pistes de réflexion qui permettent de mettre en perspective le cas de jeunes immigrants plus spécifiquement.

La langue
Bélanger et Bastien (2010) constatent que la méconnaissance du français, langue de travail officielle au Québec, ou de l’anglais, requis dans certains secteurs de travail constitue un important obstacle à l’employabilité des immigrants. En effet, selon des données que les auteurs ont recueillies à partir de la Banque de données des statistiques officielles sur le Québec, seulement 58,2 % des nouveaux arrivants peuvent communiquer en français ou en anglais. Il demeure cependant que, comme le relatent Chicha et Charest (2008), les immigrants qualifiés sont choisis principalement en fonction de leur capacité à communiquer en français. Toutefois, la maîtrise de la langue n’est pas exigée pour la famille de l’immigrant pour les cas de regroupement familial ou de demande de refuge, ce qui ralentit l’intégration en emploi de cette dernière. De plus, Bastien et Bélanger (2010) suggèrent que malgré les différents programmes de formation linguistique offerts par le MICC et par Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), le fait d’avoir des connaissances de base en français et en anglais est insuffisant pour obtenir un emploi. En effet, un sondage du Centre syndical et patronal du Canada (2004) démontre que 66 % des employeurs canadiens considèrent que le manque de connaissances relié à la langue de travail s’avère un problème pour l’embauche d’immigrants.
Bastien et Bélanger (2010) font par ailleurs état des disparités régionales en cette matière. Par exemple, une bonne connaissance de la langue française à Montréal est parfois insuffisante pour avoir accès à certains emplois où l’anglais est essentiel. Par ailleurs, certains emplois en supervision et en gestion dans la fonction publique fédérale nécessitent le bilinguisme (dans la région Ottawa-Gatineau principalement). En ce sens, Renaud et Martin (2006) constatent que de bonnes connaissances en anglais augmentent les chances pour un immigrant d’obtenir un emploi au cours des cinq premières années de résidence au Québec. Cette exigence informelle n’est toutefois pas toujours connue des immigrants et peut leur occasionner d’importantes difficultés d’insertion en emploi.

Diplômes et titres de compétences
Selon Bastien et Bélanger (2010), la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences peut aussi créer un problème d’intégration aux nouveaux arrivants. En ce qui a trait aux diplômes, Bastien et Bélanger (2010), tout comme Chicha et Charest (2008), font la distinction entre deux réalités auxquelles les nouveaux arrivants font face : la reconnaissance des diplômes et titres de compétences étrangers régis par des ordres professionnels, et ceux qui ne le sont pas. Les professions régies par des ordres professionnels exigent certains diplômes et certifications : le nouvel immigrant doit donc passer par un processus souvent fastidieux de reconnaissance de ses acquis en plus d’avoir à compléter une formation supplémentaire. Chicha et Charest (2008) mentionnent aussi que selon des statistiques récoltées par le Conseil interprofessionnel du Québec en 2005, les ordres professionnels dans les secteurs de la santé et des relations humaines tendent à refuser plus systématiquement les demandes d’équivalence de professionnels immigrés (91,3 % de refus pour 58,8 % des décisions rendues) que dans les secteurs du génie, aménagement et sciences (5,7 % de refus pour 35,3 % des décisions rendues). Ceci étant, Chicha et Charest (2008) soulignent que le nombre de demandes dans les secteurs de la santé et des relations humaines ont augmenté de manière significative au cours des dernières années.

Pour ce qui est du processus de demande d’équivalences dans les ordres professionnels, Chicha et Charest (2008) notent que le temps d’attente peut être long avant d’obtenir une réponse de l’ordre professionnel (dans certains cas, il s’agit de plus d’un an), ce qui peut entraîner une déqualification du candidat à long terme.

De plus, s’il y a reconnaissance d’acquis à la fin du processus, il reste encore différents obstacles à franchir pour le candidat. S’il y a reconnaissance complète, le nouvel immigrant doit parfois effectuer un stage. S’il y a reconnaissance partielle, le candidat doit identifier une formation académique et pratique adaptée à sa situation. Il faut ajouter à cela la dimension culturelle reliée à l’emploi, qui ne peut être acquise que dans la pratique de ce dernier. S’il n’y a pas de reconnaissance, le candidat se retrouve face à des choix difficiles, dont l’abandon de sa profession, le retour aux études ou la réorientation de carrière. Bref, la complexité du processus et les résultats parfois peu probants qui y sont liés deviennent des obstacles de taille pour le nouvel arrivant.

D’un autre côté, pour les emplois qui ne sont pas régis par un ordre professionnel, Bastien et Bélanger (2010) constatent que les diplômes (leur nature et leur provenance, entre autre) revêtent une importance non négligeable dans l’embauche d’un candidat. N’ayant pas de moyens de vérifier la validité et la qualité de la formation suivie à l’extérieur du Canada, l’employeur peut éprouver des difficultés à évaluer la candidature du nouvel immigrant et, ainsi, la rejeter. À cet effet, Chicha et Charest (2008 :41) notent qu’il y a un obstacle supplémentaire pour le nouvel immigrant qui a complété sa formation dans un pays en développement : « La part d’arbitraire induite par l’absence de procédures transparentes, claires et rigoureuses de la plupart des acteurs, y compris les établissements d’enseignement et les employeurs, constitue un terrain propice pour l’exercice de préjugés et de stéréotypes quant à la qualité de l’éducation obtenue dans ces pays ».
De plus, Chicha et Charest (2008) mentionnent que les petites et moyennes entreprises, très présentes au Québec, tendent à voir plus de barrières à l’embauche d’un candidat ayant obtenu son diplôme à l’étranger que les plus grandes entreprises. Devant une telle situation, les auteurs ajoutent que certains immigrants éprouvent un tel découragement vis-à-vis de la démarche institutionnelle en elle-même (en plus de l’incertitude du résultat) qu’ils n’entreprendront aucune démarche de reconnaissance des acquis. Pour ce qui est des acquis professionnels, Bastien et Bélanger (2010) soulignent que les employeurs offrent rarement la chance aux immigrants de prouver leur expérience acquise à l’extérieur du Québec. Ces derniers risquent à plus ou moins long terme de se « déqualifier » vis-à-vis de certains emplois, du fait qu’ils n’ont pas pu commencer leur pratique dès leur entrée au Québec.

Boudarbat et Boulet (2010) analysent la situation de manière un peu différente. Ils suggèrent que les nouveaux immigrants proviennent de plus en plus fréquemment de nouveaux pays sources d’immigration au Canada, où l’éducation et l’économie diffèrent de celles du pays d’accueil. Ils suggèrent que cette hétérogénéité crée la confusion et ce, même si les nouveaux immigrants sont de plus en plus qualifiés grâce aux politiques de sélection. En fait, les auteurs croient que la reconnaissance des acquis dépend du lieu où le diplôme a été obtenu. Selon eux, un immigrant ayant reçu un diplôme au Canada aura moins de difficulté à se trouver un emploi qu’un immigrant ayant fait ses études dans son pays d’origine.

Expérience de travail canadienne
Bastien et Bélanger (2010) notent que les employeurs canadiens exigent souvent une expérience de travail canadienne à l’embauche. Weiner (2008 : 42) soutient pour sa part que les employeurs agissent de la sorte pour quatre raisons principales : « …connaissance du marché du travail canadien et de ses institutions ; connaissances et expériences nécessaires à l’emploi ; acculturation au lieu de travail canadien et discrimination ». Jugeant les coûts de la formation des nouveaux immigrants trop élevés pour leur entreprise (mais nécessaire si l’on veut y travailler), les employeurs créent un « cercle vicieux » qui peut conduire à la déqualification des immigrants qui n’ont pas cette formation.
Chicha et Charest (2008) établissent un lien entre la question de la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences et le manque d’expérience professionnelle en sol canadien. Selon eux, ces deux éléments sont indissociables : si on reconnaissait l’expérience à l’extérieur du pays, l’expérience du marché du travail canadien aurait une moindre importance dans les critères
d’embauche de l’employeur. Bref, on se concentrerait sur les compétences de l’immigrant et non pas sur le lieu où il a acquis ces dites compétences. Chicha et Charest (2008) complexifient l’analyse à mener : il n’existe pas, selon eux, d’outils d’analyse qui permettraient une évaluation rigoureuse du curriculum vitae des nouveaux arrivants. Sans procédure uniforme et intégrée dans un système d’évaluation unique, il est donc impossible pour ces derniers de s’adapter et d’avoir ultimement accès à ces emplois : il y a donc risque de discrimination.

Le capital social
Bastien et Bélanger (2010) suggèrent que l’absence de réseaux professionnels pour les nouveaux arrivants peut entraîner d’importantes difficultés d’insertion en emploi. Les employeurs utilisent souvent le « bouche à oreille » pour combler des emplois, alors que les immigrants peuvent éprouver beaucoup de difficultés à accéder à ce marché du travail « caché ». Le réseau social généralement limité des nouveaux arrivants constitue alors un obstacle à leur intégration professionnelle. Chicha et Charest (2008) ajoutent que les immigrants qui ont peu ou pas de connaissances en français tendent à faire appel aux membres de la communauté ethnoculturelle pour obtenir un emploi, se privant ainsi d’un bon nombre d’opportunités d’emploi.

Discrimination
Bastien et Bélanger (2010) indiquent que les nouveaux arrivants peuvent vivre des situations discriminatoires lors des entrevues d’emploi, et même avant d’y être convoqués. Les auteurs, à l’instar d’Oreopoulos (2009), soutiennent que les employeurs ont tendance à écarter les curriculum vitae où le nom du candidat a une consonance étrangère. Cette conclusion touchait à la fois les emplois demandant d’excellentes compétences à l’oral et à l’écrit et ceux où aucune de ces compétences n’était requise. Selon Bastien et Bélanger (2010), cette dimension de l’employabilité des immigrants devrait être davantage étudiée au cours des prochaines années.

La question de la discrimination interpelle aussi Chicha et Charest (2008). Les auteurs constatent que les employeurs ont rarement les outils et les structures nécessaires pour éviter la discrimination à l’embauche, même s’ils se disent sensibles à la diversité culturelle. Il semble que les soft skills revêtent une importance toute spéciale à l’embauche, mais que les formations qui visent à aider les immigrants à développer ces compétences ne sont pas suffisantes. En ce sens, le contact avec la population majoritaire constituerait un avantage pour les candidats immigrants.

Renaud, Piché et Godin (2003) nuancent lorsqu’il s’agit de discrimination sur la base de l’origine ethnique. Ils suggèrent que le lien entre l’origine nationale et l’accès à des emplois de qualité devient de plus en plus ténu au bout de 10 ans de résidence.

Exigences spécifiques à l’embauche
Bastien et Bélanger (2010) constatent que certains types d’emplois, notamment dans la fonction publique, ont des critères d’embauche difficiles à atteindre pour les nouveaux immigrants. D’une part, il faut être citoyen canadien ou résident permanent pour travailler dans un grand nombre d’emplois de la fonction publique fédérale. D’autre part, certains emplois requièrent une cote de sécurité, qui est difficile à obtenir pour un individu provenant de pays considérés « à risque ».

Conciliation travail et famille
Chicha et Charest (2008) constatent que les femmes, qu’elles soient immigrantes ou pas, peuvent être plus particulièrement affectées par la question de la conciliation travail et famille. Toutefois, ils soulignent que des défis additionnels liés au mode de vie typiquement canadien se présentent aux immigrantes : « (…) méconnaissance du fonctionnement du système de garderies publiques, des horaires de travail atypiques ou trop rigides dans les secteurs économiques où elles sont concentrées, la durée des déplacements entre le domicile et le lieu de travail… » (Chicha et Charest, 2008 : 13).

Catégorie d’admission
Boudarbat et Boulet (2010) abordent la question de la catégorie d’admission à laquelle l’immigrant appartient comme facteur d’embauche. Ils admettent que les études sur l’employabilité des immigrants qui prennent en compte la variable de la catégorie d’admission sont rares et que des recherches étudient souvent les immigrants selon d’autres critères d’analyse. Il est toutefois reconnu que les immigrants entrés au Canada dans l’une des catégories « économiques » trouvent plus facilement des emplois que les immigrants des catégories du regroupement familial ou humanitaires. Les auteurs croient cependant que d’autres études sont nécessaires afin de mieux connaître les liens entre la catégorie d’immigration et l’intégration du marché du travail.

Âge lors de l’immigration
Boudarbat et Boulet (2010 :64) constatent que l’âge d’immigration importe lorsqu’il est question d’insertion en emploi : « Plus les immigrants arrivent tôt dans leur vie, plus ils auraient de la facilité à s’insérer sur le marché du travail. En effet, en arrivant très jeunes, les immigrants font leurs études ici et développent de meilleures habiletés linguistiques comparativement aux autres immigrants ». Cette conclusion est aussi partagée par Renaud, Piché et Godin (2003), qui croient que le niveau d’adaptation est plus élevé chez les jeunes immigrants.

Pistes de réflexion
À la suite de leurs recherches, les auteurs recensés ont identifié différentes pistes de réflexion. Tout d’abord, Bastien et Bélanger (2010) notent que plusieurs immigrants ont affirmé en entrevue qu’ils avaient peu d’informations sur le marché du travail canadien avant d’arriver au pays. Puisque la plupart d’entre eux entrent au Canada dans des catégories d’immigration fondées sur leurs formation et compétences professionnelles, ils constatent avec surprise que de nombreux défis doivent être relevés avant d’intégrer le marché du travail. Cette situation se complique avec le « quota » d’immigrants à sélectionner à chaque année par le MICC : les informations fournies aux futurs immigrants ne sont donc pas nécessairement claires et précises quant à la réalité linguistique au Canada, à la reconnaissance des diplômes et titres de compétences, et de manière générale, des enjeux sociaux et économiques canadiens (par exemple, le système de garderies, les réseaux professionnels, etc.). Dans la mesure du possible, le futur immigrant pourrait mieux se préparer à son entrée au pays en recevant des informations susceptibles d’être pertinentes à son intégration au marché du travail.
Ensuite, Bastien et Bélanger (2010) constatent que les services d’accueil et d’intégration offerts aux immigrants sont fragmentés et qu’il y a un manque de coordination entre les acteurs concernés. Par exemple, à Montréal, il y a de nombreux organismes d’aide à l’établissement qui travaillent à l’intégration des immigrants, mais il n’existe pas de stratégie commune ni de synchronisation de leurs activités respectives, comme c’est le cas pour le MICC et Emploi- Québec. Chicha et Charest (2008:39) ajoutent que « cette fragmentation s’inscrit en contradiction avec la réalité qui nous montre que l’intégration des immigrés au marché du travail est le fruit d’un cheminement long et difficile, semé d’embûches, qui se réalise dans la durée et qui exige la cohérence, la synchronisation et la continuité des interventions ».

Il semble également exister un écart entre les stratégies utilisées par les organismes communautaires et gouvernementaux : tel que mentionné dans la section portant sur les services d’employabilité, les premiers se concentrent sur les intérêts particuliers des immigrants, alors que les seconds s’intéressent de manière plus générique aux besoins en matière d’aide à l’emploi de l’ensemble de la population, les immigrants étant considérés comme une clientèle marginale. En ce qui a trait au processus de recherche d’emploi, l’immigrant se retrouve souvent confronté à un système où divers intervenants semblent agir de manière contrainte (selon un rôle et des responsabilités déjà préétablies) sans qu’il y ait de suivi ou de communication entre eux. Les services offerts aux nouveaux arrivants ne semblent donc pas assez efficaces, situation qui porte les immigrants à se tourner vers l’aide des organismes plus près de leurs communautés culturelles. Ces derniers organismes ne possèdent toutefois pas nécessairement l’ensemble des ressources nécessaires pour offrir une aide adaptée dans le domaine de l’aide à l’emploi et l’insertion professionnelle et économique. Bastien et Bélanger (2010) soulignent également qu’il y a sous-financement de programmes d’insertion en emploi au Québec. Ce sous-financement atteint plus précisément les organismes communautaires, qui ne peuvent pas combler la demande grandissante pour leurs services. Les auteurs mentionnent à cet égard que les services liés à la reconnaissance des diplômes devraient être améliorés. Dans cette perspective, il faudrait selon eux mettre en place un organisme d’évaluation des diplômes, gouvernemental ou privé, que les employeurs et les universités pourraient utiliser lors de la potentielle embauche d’un immigrant.

La francisation fait également l’objet d’une recommandation des auteurs. Selon eux, il importe que cette formation vise un niveau de compétence plus haut et rejoigne l’ensemble des immigrants.

Bastien et Bélanger (2010) croient aussi que la Ville de Montréal, à l’instar de celles de Toronto et d’Ottawa, devrait assumer une certaine responsabilité dans l’intégration économique des immigrants, ce qui n’est pas le cas en ce moment. Diverses initiatives ont été mises en place au cours des dernières années (par exemple, des partenariats avec la CRÉ de Montréal), mais selon eux, la Ville devrait investir davantage dans son approche et sa gestion de l’immigration.

Outre la Ville, les chercheurs croient que les employeurs devraient également être impliqués dans la stratégie pour favoriser l’insertion des immigrants au marché du travail. En les sensibilisant davantage à cette question, les employeurs peuvent eux-mêmes développer des stratégies qui conviendront aux besoins de leur entreprise. Il faut aussi tenter de cibler les PME, qui pourraient s’inspirer des plus grandes entreprises en ce qui concerne le développement de mesures d’intégration des immigrants. Dans la même optique, Chicha et Charest (2008) suggèrent que l’hypothèse selon laquelle les problèmes d’intégration sont dus à l’inadaptabilité des immigrants devrait être revue. La responsabilité dans ce cas-ci doit être partagée, c’est-à-dire que les programmes d’employabilité déjà en place doivent être accompagnés d’offres de travail durables et de qualité par les employeurs (Chicha et Charest, 2008 : 40) : « Agir sur l’offre de travail sans agir simultanément et avec la même détermination sur la demande de travail risque de vouer à un demi-échec plusieurs initiatives intéressantes ».

Bastien et Bélanger (2010) constatent, après avoir mené des entretiens avec des personnes immigrantes au sujet de leur insertion en emploi, que les syndicats et autres associations professionnelles revêtent une importance particulière dans le processus d’intégration du marché du travail. Il conviendrait alors de favoriser l’investissement de ces institutions dans la planification et le développement de programmes d’aide à l’insertion en emploi des personnes immigrantes.

Certains sujets liés de près ou de loin à l’insertion en emploi des immigrants n’ont pas actuellement fait l’objet de recherches plus poussées ; il s’agit notamment du travail autonome chez les immigrants ainsi que du milieu des PME au Québec.

Plusieurs nouveaux arrivants choisissent cette voie professionnelle, mais encore peu de chercheurs se sont intéressés à la réalité de ces travailleurs. Certaines études suggèrent que ce choix s’explique par des facteurs culturels, et d’autres postulent que les immigrants choisissent ce chemin par obligation, faute de trouver d’autre emploi convenable (Bastien et Bélanger, 2010). La question du genre devrait également être étudiée lors des recherches portant sur l’insertion en emploi des immigrantes et immigrants. Il semble que les femmes intègrent le marché du travail beaucoup moins facilement que leurs homologues masculins, et qu’elles sont plus souvent sujettes à la déqualification, même lorsque très qualifiées. Chicha et Charest (2008) notent à cet égard que les femmes subissent plus souvent de la discrimination sur le marché du travail en raison de leur origine ethnoculturelle et de la pénurie des services de garde au Québec.

Conclusion
Tel que démontré par plusieurs recherches, les défis de l’intégration des immigrants sur le marché du travail sont importants. Trois grands constats peuvent émerger de cette revue de la littérature.

Premièrement, les études portant sur l’insertion en emploi des personnes immigrantes évacuent parfois certaines variables qui pourraient avoir un lien avec l’insertion en emploi. C’est par exemple le cas des catégories d’immigration, de l’âge et du niveau de scolarité à l’arrivée. Les études actuelles tendent à généraliser les expériences des immigrants, ce qui peut être difficile par la suite pour une élaboration de politiques pertinentes.

En second lieu, il ne semble pas exister de stratégie concertée en termes d’intégration des immigrants sur le marché du travail. Différents acteurs sociaux et politiques agissent sur le terrain, mais la collaboration entre les institutions et acteurs présents sur cette scène reste encore à construire. Cette situation peut engendrer une certaine confusion chez les immigrants et peut occasionner des problèmes d’intégration à long terme.

Finalement, une grande différence préexiste entre le cas métropolitain de Montréal et celui des régions. Puisque les deux-tiers des immigrants choisissent de vivre à Montréal, la problématique et les défis diffèrent de ceux qui existent dans les municipalités qui accueillent un moins grand nombre d’immigrants. Dans cette optique, des recherches qui étudient ces situations séparément ou dans une perspective comparative enrichiraient grandement la compréhension de la problématique.

Chapitre 2 Les pratiques d’intervention adaptées aux jeunes en recherche d’emploi : interprétation des résultats d’une recherche menée pour le Comité Consultatif Jeunes (2012).

Introduction

Les données de la section suivante sont issues d’une enquête menée pour le CCJ intitulée Les jeunes éloignés du marché du travail au Québec (Nolet, 2012). Cette étude a été construite selon un cadre qui analyse la problématique de l’intervention auprès d’une clientèle cible. La question de recherche y était formulée ainsi : « Quelles sont les pratiques d’intervention adaptées aux diverses situations des jeunes qui ont des problèmes à se trouver un emploi sur le marché du travail ? » (Nolet, 2012 : 15). La collecte de données visait à connaître en détails les obstacles à l’accès à l’emploi que rencontrent les jeunes qui sont éloignés du marché du travail et à identifier les besoins de ces derniers en matière d’aide à l’emploi.

Dans le cadre de la présente étude, les données et résultats de la recherche de Nolet (2012) s’avèrent utiles puisqu’ils nous permettent d’obtenir des informations plus à jour sur la question peu étudiée de la perception et de la satisfaction face à l’aide à l’emploi reçue par les jeunes. Ces informations nous permettent également de compléter et de confirmer certains énoncés présentés dans la revue de la littérature présentée précédemment.

Le travail d’interprétation des résultats de la recherche de Nolet (2012) propose de s’intéresser à un sous-échantillon des répondants au sondage (les jeunes immigrants) et de le comparer au reste du groupe. En isolant ainsi la variable « immigrant », nous sommes en mesure de constater si une tendance externe se dessine entre le groupe « immigrant » et le groupe « non-immigrant », puis de repérer des tendances au sein du sous-groupe « immigrant » afin d’identifier et d’orienter la recherche qualitative qui sera menée par la suite.

Nous présentons d’abord brièvement la méthode de collecte des données effectuée dans le cadre de la recherche de Nolet (2012), ainsi que le sous-échantillon des « immigrants » que nous avons constitué à partir de l’ensemble des répondants. Les trois questions auxquelles nous portons une attention particulière pour le sous-groupe des immigrants sont Q6 (a-x), qui traite des besoins d’aide à l’emploi exprimés, Q7a, qui traite des ressources d’aide à l’emploi et Q7b, qui porte sur la satisfaction exprimée quant à l’aide reçue.

Nous présentons par la suite les quatre tests statistiques dont nous avons fait usage pour valider nos conclusions.

Par la suite, nous dressons un portrait descriptif du sous-échantillon des « immigrants ». Ce portrait est axé principalement sur les caractéristiques sociodémographiques (sexe, âge, lieu de naissance, etc.) des répondants ainsi que sur les besoins exprimés et services reçus.

Rappelons que cette première évaluation quantitative se veut exploratoire. L’objectif premier était de mieux orienter la recherche qualitative qui a suivi, et qui avait pour objet l’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration. Pour ce faire, nous avons pris comme point de départ trois éléments fondamentaux émergeant de la recension de la littérature, et qui pouvaient être étudiés à partir de la banque de données quantitatives rendue disponible suite au dépôt de la recherche de Nolet (2012). Les trois éléments principaux choisis sont les suivants : 1) le type de ressources auxquelles les jeunes immigrants accèdent ; 2) les besoins en ressources d’aide à l’emploi exprimées par les jeunes immigrants ; 3) la satisfaction des jeunes immigrants quant aux services d’aide à l’emploi reçus.

Mentionnons enfin qu’il importe de considérer les perceptions face aux services d’aide à l’emploi reçus. À la lecture des résultats, il faut garder en mémoire que l’analyse statistique n’est pas une analyse de causalité. Il faut aussi rappeler que nous ne proposons pas ici un modèle prédictif. Ainsi les constats faits à partir des tests statistiques établissent un lien entre certaines variables, mais ne permettent pas de complexifier davantage l’information. Les résultats des tests permettent cependant de poser d’autres questions, que nous aborderons dans la section d’interprétation des résultats. Ces questions ont à la fois trait aux possibles interrelations entre certaines variables, et dont l’existence demeure inconnue, et aux perceptions des répondants, qui ne peuvent être vérifiées uniquement en récoltant des données qualitatives complémentaires.

La collecte des données
La collecte de donnée a été effectuée par questionnaires [36]d’août 2011 à octobre 2011 dans le cadre de l’ « étude sur les jeunes éloignés du marché du travail ». Le questionnaire a été construit dans le but de répondre à une problématique sensiblement différente de la présente recherche. C’est pourquoi seuls quelques éléments du questionnaire sont conservés. Les données sociodémographiques constituent les variables indépendantes, et que les questions concernant la satisfaction, les besoins et les ressources, constituent les variables dépendantes [37].

La population à l’étude est constituée de jeunes âgés de 18 à 35 ans, résidant au Québec et se trouvant en situation d’éloignement du marché du travail. Ils avaient recours aux services d’un organisme d’aide à l’emploi au moment de la collecte de données. Le concept d’éloignement est défini en fonction du « Cadre de référence sur la clientèle éloignée du marché du travail élaboré par les différents acteurs en employabilité au Québec » (Nolet, 2012 : 17) [38].

L’échantillonnage a été effectué par les intervenants des organismes en employabilité du Québec participants. Il s’agit d’un échantillonnage exhaustif lors de la période mentionnée ci-dessus. Il est important de souligner « […] que cet échantillon ne respecte pas totalement les lois probabilistes et que, par le fait même, il est impossible d’inférer à l’ensemble de la population cible les résultats des analyses » (Nolet, 2012 : 18). Il s’agit là d’une limite importante qui n’est pas à sous-estimer lors de la lecture des résultats. Si la généralisation des résultats était l’objectif visé, cela invaliderait le choix de cette base de données comme outil d’analyse. Comme ce n’est pas le cas, les statistiques descriptives et les résultats des tests restent valides, mais doivent être interprétés pour le seul échantillon recueilli. Ces données demeurent donc une ressource précieuse – notamment parce qu’elles permettent de jeter un premier regard sur le groupe à l’étude –, mais ne peuvent mener en elles-mêmes à des conclusions définitives. Rappelons que les résultats présentés dans cette section avaient d’abord pour objet d’enrichir le questionnement qui sous-tend l’élaboration d’une recherche qualitative à mener par la suite.

Le sous-échantillon des immigrants
À partir de l’échantillon de départ, nous avons sélectionné un sous-échantillon représentant les jeunes immigrants qui utilisent des services d’aide à l’emploi. Essentiellement, les caractéristiques de cet échantillon correspondent aux critères de recrutement principaux utilisés dans l’étude qualitative à mener.

Le sous-échantillon est composé de jeunes immigrants [39] (N=52) interrogés lors de l’étude sur les jeunes éloignés du marché du travail. Ce groupe sera parfois comparé à d’autres répondants, les non-immigrants. Dans ce cas, par souci de cohérence avec la littérature, nous avons préféré sélectionner uniquement les natifs du Québec (N=357) plutôt que l’ensemble des répondants non-immigrants (N=369), qui comprend alors des résidents d’autres provinces canadiennes ainsi que les répondants qui n’ont pas divulgué leur lieu de naissance.

Nous dressons un portrait détaillé de ce groupe de jeunes éloignés du marché du travail à l’aide de données récentes et détaillées. Celui-ci est basé sur des variables sociodémographiques qui ont été soumises à des tests statistiques afin de déterminer si des liens existent entre ces certaines d’entre elles.

Avec le N (taille de l’échantillon) limité que nous offre le sous-groupe de 52 cas, plusieurs croisements possibles sont invalidés, et plusieurs variables ont dû être recodées en variables dichotomiques qui permettent de créer des tableaux croisés de plus petit ordre. Dans le cas des variables ordinales, en raison d’un N valide souvent inférieur à 30, ainsi que des distributions qui ne respectent pas la loi de Gausse, nous préférons utiliser à nouveau des tests non paramétriques [40].

L’accent est davantage porté sur les ressources utilisées par les jeunes immigrants dans leur recherche d’emploi, notamment les organismes gouvernementaux et communautaires. Un intérêt particulier est ensuite porté aux réponses aux questions suivantes :

- Q6 (a-x) – « J’ai besoin d’aide pour… » (échelle de Likert à quatre niveaux pour établir l’urgence du besoin)
- Q7a – « Si tu as déjà travaillé en 2010, qui t’a le plus aidé à te trouver un emploi ? » (type d’aide le plus utilisé ; échelle nominale) ;
- Q7b – « Si tu as utilisé un organisme d’aide à l’emploi en 2010, peux-tu nous dire si tu as été très satisfait, satisfait, insatisfait ou très insatisfait ? », sur le niveau de satisfaction quant au service offert par un organisme d’aide à l’emploi, si utilisé lors de l’année 2010 (échelle de Likert à quatre niveaux pour établir la satisfaction).

Présentation des tests
Nous présentons d’abord les tests utilisés afin d’établir un lien entre les variables. La section suivante présentera une description plus détaillée de l’échantillon à l’étude.

Les tests utilisés ici servent à analyser indépendamment trois variables dépendantes : 1) La satisfaction quant à l’aide reçue dans un organisme d’aide à l’emploi ; 2) Les besoins exprimés en termes d’aide à l’emploi ; 3) Les principales ressources disponibles chez les demandeurs d’aide à l’emploi.

Pour ce faire, nous comparons d’abord deux échantillons indépendants, soit le sous-échantillon « immigrants » et le sous-échantillon « non-immigrants ». Ensuite nous analysons l’influence des variables indépendantes – associés aux caractéristiques sociodémographiques – pour le seul sous- échantillon « immigrants ».

Étant donnée la taille restreinte du sous-échantillon à l’étude (N = 52), nous avons préféré utiliser des tests non-paramétriques. Ces tests ont le défaut d’être moins spécifiques que les tests paramétriques, mais n’impliquent pas de condition d’application préalable (Howell, 2008). Elliot et Woodward (2007) précisent que ces tests peuvent fréquemment être utilisés afin de remplacer des tests paramétriques puisque, contrairement à leurs équivalents paramétriques, ils n’ont pas à respecter le postulat d’une distribution gaussienne car ils n’utilisent pas les données brutes. En effet, l’analyse est fondée sur les valeurs de rangs attribuées aux données.

Quatre tests ont été choisis : le test du Khi-carré (χ2) ; le U de Mann Whitney (dans le cas d’une comparaison bi-variée) ; le K de Krustall-Wallis (dans le cas d’une comparaison multivariée) et le test de corrélation du Rhô de Spearman (ρ). Les différents tests statistiques ont été effectués à l’aide du logiciel SPSS. Pour chacun des tests effectués, nous avons utilisé un seuil d’erreur standard de 5 %. Voici une brève présentation de ces tests ainsi que des raisons de leur choix.

Le test du Khi-carré (χ2)
On utilise le test du χ2 lorsque l’on veut vérifier l’hypothèse nulle d’indépendance de deux variables catégorielles. Ce test se fait à partir d’un tableau croisé des deux variables catégorielles. Chaque croisement, ou classe, représente les effectifs observés et les effectifs théoriques ou attendus. Le test consiste à déterminer s’il y a une différence statistiquement significative entre ceux-ci, ce qui mènerait à rejeter l’hypothèse nulle et à affirmer qu’il existe une relation de dépendance entre les deux variables. Ce test fut utilisé pour évaluer la question des principales ressources disponibles, car celles-ci ne peuvent être ordonnées. Rappelons que la principale condition d’application du χ2 est l’absence d’effectifs théoriques inférieurs à 5.

Le test U de Mann-Whitney
Il s’agit d’un test que nous utilisons afin de comparer deux échantillons indépendants. On peut considérer qu’il constitue l’équivalent non-paramétrique du test t de Student. L’hypothèse nulle propre à un test U stipule que les deux échantillons proviennent d’une population identique. En rejetant l’hypothèse nulle, on confirme statistiquement la spécificité d’un échantillon par rapport à l’autre. Le test U est principalement utilisé pour comparer le sous-échantillon « immigrant » au sous-échantillon « non-immigrant ». On l’utilisera aussi lorsqu’en présence d’une variable indépendante dichotomique, par exemple le sexe des répondants.

Le test K de Kruskal-Wallis
Ce test permet de comparer la distribution d’une variable lorsqu’il y a plus de deux échantillons indépendants. Il s’agit d’une alternative à une analyse de variance (ANOVA) à un (1) critère de classification. L’hypothèse nulle consiste à affirmer que les distributions des différents échantillons sont semblables. Si cette hypothèse est rejetée (donc que le test est statistiquement significatif), on peut considérer qu’au moins un groupe se démarque des autres. On utilisera le test K lorsqu’en présence de variables indépendantes multi-catégorielles. C’est le cas notamment des pays d’origine des immigrants.

Le Rhô de Spearman (ρ)
Il s’agit d’un test de corrélation dont l’indice ρ, exprimé entre -1 et 1, indique le sens et la force d’une relation entre deux variables ordinales. En d’autres mots, la relation est similaire à celle obtenue par le r de Pearson. Toutefois, on rappelle que la corrélation s’effectue en fonction des valeurs ordonnées par rang.

Portrait descriptif du sous-échantillon

Portrait sociodémographique
Voici les données sociodémographiques extraites du sous-échantillon. Celles-ci incluent le sexe, l’âge, le logement, l’état civil, la situation familiale, le lieu de naissance et la langue parlée. S’ajoutent à ces caractéristiques les données en matière de niveau d’études, de travail et de revenus.

Le sexe des répondants
Pour la question Q14 – « es-tu un homme ou une femme ? », on note 30,8 % d’hommes (16 cas) et 67,3 % de femmes (35 cas), avec un cas manquant :

Tableau 1 : Sexe des répondants

L’âge des répondants
Pour la question Q15 – « En quelle année es-tu né ? », le tableau suivant permet de répartir les effectifs en deux catégories d’âge :

Tableau 2 : Âge [41] des répondants

En pourcentage valide, on compte 43,8 % de jeunes de 18 à 25 ans, ainsi que 56,3 % de 26 à 35 ans.

Le lieu de résidence des répondants
Pour la question Q17a – « Au cours de la dernière année (2010), où vivais-tu la majorité du temps ? », le tableau suivant démontre qu’en pourcentage valide, 42,6 % des effectifs (20 cas) demeuraient chez leurs parents, alors que 57,4 % habitaient en logement (27 cas), pour un total de 47 effectifs.

Tableau 3 : Lieu de résidence des répondants

L’état civil des répondants
Pour la question Q18 – « Au cours de la dernière année (2010), étais-tu … », on note 53,8 % d’effectifs pour le statut célibataire, contre 46,2 % d’effectifs en couple (marié ou non).

Tableau 4 : État civil simplifié des répondants

La parentalité des répondants
Pour la question Q19 – « as-tu des enfants ? » [42], on note à l’aide du tableau qui suit que plus du quart des effectifs (27,5 % en pourcentage valide) ont répondu positivement (14 cas) contre 72,5 % ayant répondu « non » (51 cas).

Tableau 5 : Parentalité des répondants

Le lieu de naissance des répondants
Pour la question Q20b – « Lieu de naissance hors-Canada » [43], on note une majorité d’effectifs en provenance d’Haïti (13 cas et 25 %). Suivent les immigrants nés en Asie du sud, de l’Est et Pacifique (8 cas et 15,4 %), en Afrique subsaharienne (7 cas et 13,5 %), en Amérique du Sud et Caraïbes (7 cas et 13,5 %), en Europe de l’Est (6 cas et 11,5 %), en France (5 cas et 9,6 %), au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (3 cas, 5,8 %) et dans le Reste de l’Europe (2 cas, 3,8 %). On compte un cas manquant (1,9 %).

Tableau 6 : Lieu de naissance (par région) des répondants

La langue parlée des répondants
La question Q21 – « Quelle(s) langue(s) parles-tu ? » permet de diviser les effectifs entre les immigrants parlant le français, l’anglais et autre (46,2 %) ; le français (28,8 %) ; le français et autre (13,5 %) ; le français et l’anglais (9,6 %) et l’anglais (1,9 %).

Tableau 7 : Langue(s) parlée(s) des répondants

Le niveau de scolarité des répondants
La question des études, couverte par les trois questions suivantes, permet tout d’abord de voir que 38,5 % des effectifs étaient aux études durant l’année 2010, contre 7,7 % à temps partiel et 50 % qui n’étaient pas aux études.

Q1a – « Au cours de la dernière année (2010), étais-tu aux études ? »

Tableau 8 : Statut d’étudiant des répondants au cours de l’année 2010

Parmi ceux qui étaient aux études en 2010, soit 24 cas, 41,7 % étaient au secondaire, alors que 4,2 % étaient à une école de métiers, 8,3 % à l’école des adultes, 8,3 % au Cégep, 20,8 % à l’université et 16,7 % en francisation.

Q1b – « Si tu étais aux études, à quel niveau étais-tu ? »

Tableau 9 : Niveau d’études des répondants, si aux études en 2010

Q22a – « Quel est le dernier diplôme que tu as complété ? »

Tableau 10 : Dernier diplôme obtenu des répondants

Pour ce qui est des diplômes complétés, 32,7 % des effectifs n’en détiennent aucun, alors que 15,4 % des effectifs ont complété un D.E.S. ; 15,4 % un D.E.P. ; 7,7 % un D.E.C ; 3,8 % un certificat universitaire (mineure, majeure) ; 9,6 % un diplôme de baccalauréat ; 13,5 % un diplôme de maîtrise ; et un seul cas (1,9 %) a obtenu un diplôme d’une autre nature.

Les questions suivantes nous donnent un portrait de la situation des effectifs du côté du travail et des revenus.

Le travail et les revenus des répondants

À la question 3 – « Au cours de la dernière année (2010), travaillais-tu ? », 41,7 % des répondants étaient sans emploi ou ils ont connu une période sans emploi au cours de l’année 2010. Moins d’un répondant sur trois pouvait affirmer occuper un emploi à temps plein (cela inclut les répondants ayant précisé être travailleur autonome à temps plein).

Tableau 11 : Emploi des répondants en 2010 [44]

On constate par la suite que le pourcentage de répondants qui affirment avoir déjà eu des difficultés à trouver de l’emploi est très élevé.

5 a)–« As-tu déjà eu des problèmes à te trouver un emploi sur le marché du travail ? »

Tableau 12 : Expériences d’insertion sur le marché du travail chez les répondants

En effet, 77,8 % (pourcentage valide) des immigrants affirment avoir éprouvé des problèmes à trouver un emploi. Notons toutefois que très peu d’immigrants n’ont jamais travaillé.

La question Q25 – « au cours de la dernière année (2010), quelle était ta principale source de revenus ? » dénote un taux élevé de valeurs manquantes. En ce qui a trait aux réponses valides, 41,5 % des répondants du sous-échantillon affirment que leur source principale de revenus provient du marché du travail.

Tableau 13 : Source de revenus des répondants

Aide à l’emploi : besoins et ressources

Les tableaux qui suivent illustrent les données extraites des réponses en matière de besoins et des ressources ainsi que de la satisfaction face à l’aide à l’emploi obtenue.

Pour la question Q6 – « Si tu as déjà eu des problèmes à te trouver un emploi, indique parmi ceux-ci quel a été ton besoin d’aide ? », 25 énoncés (a-x) sont proposés avec la formulation « J’ai besoin d’aide pour… ». Chaque sous-question propose un degré de besoin d’aide, de « grand besoin d’aide » et « besoin d’aide » à « un peu besoin d’aide » et « pas besoin d’aide ». Les comparaisons pertinentes entre les sous-échantillons sont présentées dans la section des résultats.

Pour la question Q7a – « Si tu as déjà travaillé en 2010, qui t’a le plus aidé à te trouver un emploi ? », les sous-échantillons non-immigrants et des immigrants sont comparés. En pourcentages valides, on y constate que, chez les non-immigrants, les répondants affirment à 38,3 % que la ressource la plus utile provenait des réseaux personnels. Suivent les moyens personnels à 29,7 %, les organismes gouvernementaux ou communautaires à 15,8 %, les réseaux professionnels à 3,6 % et les réseaux scolaires ferment la marche à 1,4 %, alors que 11,3 % des répondants ont répondu « autres ». Notons que 135 des 357 cas se situaient dans la catégorie « manquante ou sans objet ».

Tableau 14 : Ressource la plus utile pour trouver un emploi selon les répondants
Chez les immigrants, les réseaux personnels sont vus comme la ressource la plus utile à 50 %. Toujours en pourcentages de réponses valides, les moyens personnels suivent à 36,8 %, alors que les réseaux scolaires et les organismes gouvernementaux ou communautaires récoltent tour à tour 5,3 %, devant les ressources « autres » à 2,6 %.

Le tableau suivant est basé sur la question Q7b – « Si tu as utilisé un organisme d’aide à l’emploi en 2010, peux-tu nous dire si tu as été très satisfait, satisfait, insatisfait ou très insatisfait ? ». Nous y comparons également le taux de satisfaction chez le sous-échantillon des immigrants avec celui des non-immigrants.

Mentionnons que le concept d’organismes inclut ici à la fois les organismes gouvernementaux et les organismes communautaires, puisque les deux catégories d’organismes étaient amalgamées dans les résultats de l’étude de Nolet (2012). Par conséquent, il convient d’interpréter les résultats avec prudence.

Tableau 15 : Satisfaction de l’aide reçue dans un organisme d’aide à l’emploi chez les répondants

Chez les non-immigrants, 41,9 % des répondants étaient très satisfaits, alors que 44,8 % étaient satisfaits, contre 11 % insatisfaits et 2,3 % très insatisfaits. Chez les immigrants, 16 % étaient très satisfaits et 48 % étaient satisfaits. Les insatisfaits constituent 24 % des réponses valides, alors que les très insatisfaits sont à 12 %.

Dans la section suivante, nous présentons un résumé des résultats obtenus. Nous mettons l’accent sur les tests qui se sont révélés statistiquement significatifs. Rappelons que les résultats non-significatifs n’invalident pas nécessairement une hypothèse, mais ne permettent pas de rejeter l’hypothèse nulle (il pourrait alors être pertinent d’augmenter la puissance des tests, notamment en utilisant un échantillon de taille plus importante). Dans ce cas, il faudra éviter de tirer des conclusions à partir de cela.

Présentation des résultats
Comme nous l’avons souligné plus haut, le but des résultats présentés ici n’est pas de créer un modèle explicatif. Nous tentons plutôt de répondre à des hypothèses statistiques de base qui n’ont pas besoin d’être reliées. Ajoutons que par moments, la comparaison externe du sous- échantillon immigrant au sous-échantillon non-immigrant peut aider à déceler des tendances en matière d’appartenance. Nous effectuerons également des comparaisons de sous-échantillons au sein même du sous-échantillon immigrant, en fonction de différents critères pour voir si des variations existent. Voici les résultats obtenus pour les catégories retenues :

La satisfaction par rapport à l’aide reçue
À la lecture du tableau 15, qui illustre la satisfaction à l’égard de l’aide reçue dans un organisme d’aide à l’emploi, on constate qu’une plus grande proportion de répondants immigrants semble avoir été insatisfaite de l’aide reçue dans un organisme d’aide à l’emploi. Le test U s’avère statistiquement significatif (p 0,001 < 0,05), ce qui nous permet d’affirmer que la perception de l’aide reçue dans les organismes tend à être plus négative chez le groupe des immigrants.

Or, il n’y a pas d’explication causale liée à cette constatation. D’une part, nous proposons de vérifier s’il existe des différences dans le niveau de satisfaction en fonction de certaines catégories du groupe des immigrants (le sexe, le lieu de naissance, la langue parlée). D’autre part, nous proposons de tester la corrélation entre la perception de l’aide reçue chez les immigrants et certaines variables.

À défaut de pouvoir effectuer une collecte de données plus large, la très faible taille de notre sous-échantillon nous incite à la prudence lors des interprétations. Ainsi, nous devons rappeler que le but premier de l’exercice est de vérifier l’existence de pistes possibles afin de les développer lors d’une recherche qualitative.

Comparaisons de sous-échantillons

Nous souhaitons maintenant examiner les tendances à l’intérieur du sous-échantillon immigrant. Nous voulons comparer le taux de satisfaction de la question Q7b en fonction de sous- échantillons basés sur les variables du sexe (Q14). Le test de Mann Whitney s’avère non significatif. Il n’y a donc pas de différence statistiquement observable entre les femmes et les hommes immigrés quant au taux de satisfaction par rapport à l’aide reçue dans un organisme d’aide à l’emploi.

Lorsque nous avons plus de deux échantillons indépendants à comparer, nous utilisons un test H de Kruskal Wallis (équivalent d’un Mann Whitney en ces circonstances) afin de comparer les différents sous-échantillons définis par le lieu de naissance (Q20a). Le test H n’est pas significatif. Cela indique qu’il n’y a pas de différence significative entre les niveaux de satisfaction des groupes formés en fonction du lieu de naissance.

Nous avons effectué un autre test H en vue de vérifier la dissemblance des groupes formés par la langue parlée. Ce test n’est pas significatif, ce qui indique qu’il n’y a pas de dissemblance entre les groupes.

Corrélations

Nous désirons maintenant vérifier l’existence d’une corrélation entre la satisfaction par rapport à l’aide reçue (Q7b) et les variables de l’âge (Q15, en valeurs continues), du nombre de mois depuis l’arrivée au Québec (Q20c) et du dernier diplôme obtenu [45] (Q22a). Nous avons à nouveau besoin d’un test non-paramétrique et utilisons le Rhô de Spearman. Une fois le test effectué, aucune corrélation significative n’a été observée entre chacune de ces variables et la variable Q7a.

De nouveau, il n’a pas été possible d’établir une corrélation significative entre l’une ou l’autre des variables de Q6 et Q7b.

L’accès aux ressources

Pour la question de l’accès aux ressources (voir tableau 14), nous souhaitons effectuer un croisement. En croisant la variable « immigration » (Q20a) et la variable « ressources aide à l’emploi » (Q7a), on obtient un Khi2 non-significatif (0,062).

Cependant, lorsque l’on observe la distribution intra-groupe autant chez les immigrants que chez les québécois natifs, on obtient des Khi2 significatifs (p 0,000 pour chacun des groupes). Cela indique que la disproportion observée en faveur de l’utilisation de réseaux et de moyens personnels n’est pas due au hasard.

Les besoins d’aide exprimés

Nous avons déjà établi qu’il n’existait pas de corrélation entre les variables de la question Q6 (« J’ai besoin d’aide pour… ») et la question Q7b (taux de satisfaction face à l’aide reçue d’un organisme d’aide en employabilité). Rappelons maintenant que la question 6 est composée de 25 sous-questions qui correspondent chacune à un type de besoin que pourrait avoir un jeune qui désire accéder au marché du travail.

Chacune des sous-questions est construite selon une échelle de Likert à quatre niveaux. Ces niveaux sont « grand besoin d’aide », « besoin d’aide », « un peu besoin d’aide » et « pas besoin d’aide ». Nous croyons que l’étude de cette question constitue une bonne voie pour comprendre les besoins spécifiques à la clientèle immigrante. Nous optons donc à nouveau pour un test de Mann Whitney afin de comparer les groupes des immigrants et des non-immigrants pour chacun des types de besoin. Le tableau suivant présente les items pour lesquels le test U s’avère significatif.

Tableau 16 : Test U de Mann Whitney selon le critère de regroupement immigration (Q20a)

La répartition des réponses pour chacun des cinq groupes significatifs est illustrée dans le tableau suivant.

Tableau 17 : Les besoins d’aide à l’insertion en emploi spécifiques aux immigrants

À la lecture du tableau, on constate que les immigrants ont des besoins plus marqués pour ce qui est des items ayant trait à des ressources d’ordre informationnel (Q6 i ;n ;s ;u), alors que les non- immigrants ont une tendance plus forte à demander des ressources qui puissent les aider à se motiver (Q6 p). Ces cinq sous-catégories mériteraient ultérieurement davantage d’attention.

Conclusion

En conclusion, suite à notre sous-échantillonnage basé sur les données de Nolet (2012), notre collecte et nos tests ont permis de dresser un portrait sociodémographique plus complet, tout en dégageant des tendances au sein du groupe « immigrants ». Par exemple, nous avons constaté qu’une grande portion des effectifs provenait d’Haïti (25 %) ; que 38,5 % des effectifs étaient aux études durant l’année 2010 (contre 50 % qui ne l’étaient pas) ; que plus du quart des effectifs avaient des enfants (27,5 %) ; qu’une grande majorité (77,8 %) des répondants affirmaient avoir déjà éprouvé des difficultés à trouver de l’emploi et que les réseaux personnels sont vus comme la ressource la plus utile par 50 % des immigrants (contre 38,3 % pour les non-immigrants).

Rappelons que nous ne souhaitons pas établir de modèle explicatif comme l’a fait Nolet (2012), et que le travail du chercheur ainsi que la taille de notre sous-échantillon nécessitent que des précautions soient prises lors de toute interprétation. Cela ne nous empêche toutefois pas de noter quelques particularités suite aux tests effectués quant à la satisfaction, aux ressources et aux besoins.

En ce qui concerne la satisfaction, le test U nous a permis d’affirmer que la perception de l’aide reçue dans les organismes était plus souvent négative chez les effectifs immigrants. Les autres tests effectués avec les sous-échantillons nous ont par contre démontré qu’il n’y avait pas de différence observable quant à l’insatisfaction entre les femmes et les hommes, les groupes séparés en fonction du lieu de naissance ou de la langue parlée. Les tests concernant l’accès aux ressources ont démontré que le contraste de l’importance accordée aux réseaux chez les immigrants et les non-immigrants n’était pas un simple hasard. Pour ce qui est des besoins, les tests ont permis de constater que les types de besoins exprimés lors des visites à des organismes d’aide à l’emploi variaient d’un groupe à l’autre. Les immigrants exprimaient davantage un besoin d’aide pour des ressources reliées à l’information, alors que les non-immigrants recherchaient de l’aide d’ordre motivationnel.

Considérant les limites exprimées plus tôt, mentionnons qu’il est pour l’instant impossible de corroborer davantage que ce qu’expose la revue de littérature et que nous devons nous limiter aux pistes résumées ci-dessus.

Chapitre 3 L’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration : méthodologie de recherche

Objectifs et portée de l’étude

À la lumière de la revue de littérature sur l’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration et des résultats de la recherche quantitative présentés ci-dessus, nous constatons que les type de données dont nous ne disposons pas sous forme détaillée sont des données qualitatives sur les modes, pratiques et motifs d’utilisation des différentes ressources d’aide à l’emploi se destinant aux immigrants. La recherche que nous présentons ici s’intéresse donc à cet aspect particulier de l’insertion en emploi des jeunes issus de l’immigration. Elle vise à comprendre la réalité que vivent les jeunes issus de l’immigration sur le plan de l’employabilité au Québec. Nous mettrons l’accent sur les facteurs facilitant et entravant l’accès à un emploi qui leur convient dans les diverses régions ciblées, et sur les stratégies que les jeunes immigrants mobilisent pour arriver à leurs fins. Nous ne visons pas à produire une recension des ressources disponibles, puisque cet exercice a déjà été fait (…). Nous visons plutôt à connaître et à comprendre comment ces ressources sont utilisées et perçues par les clientèles-cibles.

La collecte de données a été réalisée par des entretiens de groupe (focus groups), suivis d’une analyse des contenus des discussions. Nous croyons qu’une recherche qualitative de ce type peut se hisser dans le débat public. Les études qualitatives peuvent y trouver leur place car elles mettent en lumière les pratiques quotidiennes occasionnées par les choix de politiques publiques. Nous croyons donc que notre étude sera en mesure d’enrichir les connaissances sur le sujet. Aussi, les typologies que nous retirerons de cette étude constitueront un corpus de connaissances nouvelles sur la situation, desquelles pourront résulter de nouvelles questions de recherche et hypothèses, qui pourront faire l’objet de recherches ultérieures.

Territoire couvert par l’étude
Nous avons choisi d’étudier le cas de quelques régions spécifiques du Québec [46]. Les données antérieures dont nous disposons sont très variables d’une région à l’autre. Le choix de ces régions était à la fois lié à l’intérêt que portaient leurs acteurs régionaux au projet, et aux contraintes de temps liées au projet.

Les régions visitées accueillent des personnes immigrantes en nombres différents, mais les volumes d’immigration sont en hausse dans presque toutes ces régions. Il devient donc intéressant d’explorer la réalité de cette population spécifique dans des régions qui sont différemment organisées pour y répondre. Notons que certaines régions ou sous-régions ont commandé et financé une recherche plus approfondie de leur situation spécifique. Même si ces sous-régions se situent à l’intérieur des frontières d’une autre région étudiée, elles seront traitées comme des entités étudiées comparativement aux autres. C’est notamment le cas de la Montérégie Est et de la Vallée du Haut-St-Laurent, toutes deux situées dans la RMR de Montréal. Les régions que nous avons visitées sont la RMR de Montréal (Montréal (deux groupes de discussion) ; Longueuil ; Laval ; St-Jérôme ; Terrebonne), Montérégie Est, la Vallée du Haut-St-Laurent, la Capitale-Nationale et la ville de Sherbrooke.

Échantillonnage
Choix des sujets

Nous avons choisi d’étudier la situation des jeunes immigrants résidant au Québec depuis deux à huit ans parce que, comme nous l’avons constaté dans la recension des écrits, ces personnes sont plus susceptibles de vivre des difficultés d’insertion en emploi pour diverses raisons.

Les liens sociaux tissés à travers les réseaux fournissent un support pratique et des informations qui permettent souvent aux nouveaux arrivants de faire des choix de localisation résidentielle plus éclairés. Toutefois, les personnes des diverses catégories d’immigration et origines nationales n’accèdent pas toutes au capital social de façon équitable (D’Addario et al. ; 2007, Rose et Ray, 2001 et Ray, 1998). Ainsi, si les membres de la même origine ethnique forment une communauté bien organisée à Montréal, les choix de localisation résidentielle et l’intégration du marché du travail des nouveaux arrivants issus de ces communautés donnent lieu à des parcours d’insertion en emploi de différentes natures. Nous avons donc tenté de recruter des jeunes immigrants d’origines, de catégories d’immigration et de profils socioéconomiques diversifiés. Nous présenterons dans une section ultérieure une brève description de l’échantillon des participants à l’étude.

Mode de recrutement
Nous avons d’abord procédé au recrutement des participants aux groupes de discussion par le biais des organismes offrant de l’aide à l’emploi des régions ciblées, en prenant soin, au préalable, de nous faire connaître et de faire connaître notre recherche. Certains intervenants de ces organismes ont été contactés afin qu’ils constituent des groupes de 8 à 12 personnes âgées de 18 à 35 ans, ayant déjà cherché un emploi et vivant au Québec depuis deux à huit ans. Les organismes en mesure de recruter des participants sont nombreux au Québec ; ils ont grandement contribué à la constitution de groupes hétérogènes en termes d’âge, de provenance ethnique et de catégorie d’immigration. La méthode « boule de neige » (c’est-à-dire l’établissement d’un contact avec des participants potentiels par le biais d’autres participants) a également été utilisée à certains moments pour compléter les groupes. Selon May (2001), ce mode de recrutement est très utile afin d’atteindre certains groupes, moins accessibles, comme les personnes qui n’auraient pas eu recours aux services d’aide à l’emploi, par exemple. Nous connaissons les biais de cette méthode, qui ne nous permet que très rarement de sortir des réseaux des individus auxquels nous faisons appel ou de ceux des centres d’aide de première ligne. L’utilisation de cette méthode nous contraint aussi à nous fier au jugement des participants antérieurs quant aux candidats potentiels qu’ils nous réfèrent. Dans cette optique, les candidats référés sont susceptibles d’avoir des opinions très similaires à celles des candidats précédents, ce qui aurait pu nous mener à omettre certains types ou certaines catégories d’expériences et d’opinions.

Description de l’échantillon
Nous avons réalisé 18 groupes de discussion composés d’en moyenne 8 personnes par groupe. La taille de l’échantillon est de 140 personnes immigrantes âgées de 18 à 35 ans et vivant au Québec depuis 2 à 10 ans. L’échantillon est composé d’un peu plus de femmes (76) que d’hommes (64) et la moyenne d’âge des personnes rencontrées est de 29,5 ans. Une importante proportion des immigrants provient de l’Amérique Latine et Mexique (24 %) et d’Afrique subsaharienne (24 %). L’autre moitié de l’échantillon se répartit relativement également (environ 10 %) entre cinq grandes régions de provenance, soit l’Europe occidentale (principalement la France) ; l’Europe orientale (Russie, Moldavie) ; l’Afrique du Nord (Algérie, Maroc, Tunisie) ; Haïti et les Antilles ; et l’Asie (Asie occidentale et méridionale) [47].

L’échantillon présente une surreprésentation de personnes très scolarisées : plus de la majorité des personnes rencontrées détenaient un diplôme universitaire au moment de l’entretien de groupe, ce qui surpasse grandement la moyenne provinciale de diplômés universitaires. En effet, parmi les 140 participants, 38 détenaient un diplôme universitaire de second ou de troisième cycle, alors que 43 d’entre eux avaient complété un baccalauréat. Une très faible proportion (7 %) des participants n’avaient aucun grade certificat ou diplôme ou un niveau d’études primaire.

Le tiers des participants aux groupes de discussion est arrivé au Canada dans l’une des catégories d’immigration économiques, ce qui en fait la catégorie d’immigration la plus importante dans l’échantillon. Mentionnons toutefois qu’un nombre important de participants n’a pas mentionné de catégorie d’immigration, souvent en raison d’une incompréhension de la question ou parce qu’ils ne connaissaient pas la réponse.

En moyenne, les participants étaient au Canada depuis environ 6 ans, la médiane se situant à environ deux ans de résidence au Canada. En fait, beaucoup plus de la moitié des personnes rencontrées sont au Canada depuis 2 à 4 ans. Parmi celles-là, la grande majorité s’est installée directement dans la ville ou la région où ils ont été rencontrés et ont pour objectif d’y rester.

Même s’il demeure impossible de connaître la composition des ménages des personnes rencontrées, nous connaissons le nombre de personnes qui les constituent. Si le plus souvent (55 personnes), les immigrants rencontrés vivent dans des ménages composés d’une ou deux personnes, près de la moitié (67 personnes) vivent dans des ménages composés de 3 à 9 personnes. Parmi ceux qui vivent dans des ménages plus nombreux, certains cohabitent avec des parents et amis qui résidaient au Canada avant eux, et d’autres sont arrivés accompagnés de leur (s) enfant (s). À cet égard, près de la moitié des participants connaissaient des parents ou amis au Canada avant d’y immigrer, ce qui a souvent contribué à influencer le choix du lieu de résidence. Ces personnes sont plus nombreuses que celles qui ont affirmé ne connaître personne avant d’arriver au pays.

Bien que la très grande majorité des participants avait acquis une expérience de travail dans le pays d’origine, 19 % des personnes rencontrées lors des groupes de discussion n’avaient, quant à elles, jamais travaillé. Les facteurs sont divers : résidence dans un camp de réfugiés, âge à l’arrivée (certains sont âgés de 19 ans et arrivés depuis 8 ans) ; facteurs liés au genre et à l’emploi dans certains pays, etc.). Comme nous l’énoncerons ultérieurement, l’expérience (ou inexpérience) de travail antérieure à l’arrivée au Canada ne semble pas nécessairement liée à la situation d’emploi au Canada. Certes, les participants sans emploi ou en recherche d’emploi au moment de l’entrevue de groupe sont plus nombreux que ceux qui n’avaient jamais travaillé dans leur pays d’origine (29 % contre 19 %), l’inexpérience de travail ne pourrait pas systématiquement être mise en cause. Comme nous l’aborderons dans une section ultérieure, la difficulté que représente l’apprentissage de la langue ainsi que le choix d’intégrer un programme ou une mesure d’aide à l’emploi ou de suivre une formation académique semblent plus souvent expliquer la situation de non-emploi que l’inexpérience de travail dans le pays d’origine.
Finalement, les deux-tiers des participants aux groupes de discussion ont eu recours aux services d’organismes d’aide à l’emploi de tous genres. Cette proportion pourrait présenter une surreprésentation du recours à l’aide organisée pour la recherche d’emploi en raison du mode de recrutement utilisé. En effet, puisque le recrutement a été effectué par le biais des organismes des différentes régions visitées, il était plus fréquent de rencontrer des personnes ayant préalablement fait appel à l’aide d’organismes. La méthode « boule de neige » a également été utilisée, ce qui a permis de diversifier (légèrement) les types de profil et les parcours des participants rencontrés.

Choix des outils de collecte de données
Focus groups auprès des jeunes issus de l’immigration

Les entretiens de groupe sont, conformément à Morgan (1996) une technique de recherche qui collecte des données à travers des interactions de groupe sur un sujet prédéterminé par le chercheur. Ils constituent également une méthode de recherche qui se prête très bien aux études exploratoires, puisqu’ils offrent l’opportunité de recueillir de l’information contextuelle, préciser certaines idées et comprendre les réactions du groupe à certains problèmes et questions particuliers. Nous choisissons cette méthode de recherche comme outil principal de cueillette de données parce que nous croyons qu’elle nous offre l’opportunité d’approfondir notre compréhension des enjeux liés au sujet de recherche. Les focus groups permettent en effet à des participants ayant des points en commun – ou divergents – de se réunir pour converser d’une question et d’en dégager leurs propres façons de concevoir ou d’interpréter les choses.

Avantages des focus groups
Le focus group nous a permis de corroborer les informations issues de l’étude quantitative présentée au chapitre 2 et d’en dégager les tendances générales, puis de les remettre en perspective dans un contexte de groupe, comme le suggère Skop (2006 : 116). Pour Hollander (2004), les groupes de discussion visent à mettre en abîme les différentes interprétations, comportements et modes de compréhension des participants face au sujet. Ils créent des situations idéales pour qu’un échange spontané et réciproque d’informations se produise ; le chercheur est donc en mesure de tester ses hypothèses et d’en recevoir une réponse diversifiée et plus complexe. Ainsi, les groupes de discussion peuvent fournir au chercheur de nouvelles pistes de réflexion grâce aux conversations entre les participants, qui possèdent leurs propres dynamiques et spontanéité (Bedford et Burgess, 2001 : 124 dans Skop, 2006 : 121). Dans ce cas, les participants ont été vivement interpelés par les thèmes principaux que nous avons choisi d’aborder, soit les obstacles à l’insertion en emploi dans leur domaine d’expérience, leurs réactions face au fonctionnement de la structure du marché du travail et les services et programmes d’aide à l’emploi qui s’offrent à eux.

Selon Wilkinson (2004 : 180), les focus groups suscitent des discussions plus naturelles que les entretiens individuels, puisqu’on y observe un éventail de processus discursifs qui leur sont uniques, tels les récits, les controverses, la persuasion, les taquineries, les mésententes et les désaccords. Un autre avantage reconnu des groupes de discussion réside dans la construction de discours à partir des propos des autres personnes. Cela crée un effet de synergie qui engendre des propos plus élaborés. Le contexte et l’ambiance de groupe donnent également l’occasion au chercheur de mieux percevoir l’importance de certains thèmes et sujets par rapport à d’autres, puisque ceux-ci produisent des discussions plus riches et animées.

Méthode utilisée
Le succès des groupes de discussion repose généralement sur le regroupement des participants selon leurs caractéristiques communes, soient les facteurs d’homogénéité (Skop, 2006 : 119). Pour Skop (2006), Pires (1997) et Wilkinson (2004), une certaine homogénéité des caractéristiques des participants comporte des avantages majeurs : le sentiment d’appartenance des participants, et donc une certaine motivation à la collaboration au groupe, puis la facilitation du codage des transcriptions à des fins d’analyse.

Les participants étaient généralement de la même catégorie d’âge, et pouvaient tous communiquer en français. Ces facteurs nous ont permis d’alimenter une discussion entre personnes susceptibles d’avoir vécu des expériences dont ils peuvent discuter. Les participants aux groupes de discussion étaient donc âgés de 18 à 35 ans, en mesure de s’exprimer en français, et arrivés au Canada depuis 2 à 10 ans. Lors des discussions, ils ont fait ressortir les expériences partagées, les enjeux les plus importants et les points de vue communs ou divergents sur différentes questions.

Nous avons aussi favorisé la réussite des focus group en agissant à titre de chercheur-modérateur. Nous avons animé les groupes de discussion de façon non-directive, méthode suggérée dans le cadre des recherches exploratoires (Geoffrion, 2004 :405), c’est-à-dire que nous avons créé un guide de discussion très flexible, comportant des questions simples, comprises par tous, ouvertes, et qui incitent à aller au-delà du « premier degré de réflexion » (Geoffrion, 2004).

En dernier lieu, pour favoriser l’analyse des transcriptions, nous avons prévu un ordre logique et une procédure construite selon un guide d’entretien qui s’inspire du processus « habituel » de recherche d’emploi. Il s’agit de tenter de remémorer aux participants les étapes à travers lesquelles ils sont passés depuis leur première tentative d’obtenir un emploi au Québec et dans leur région de résidence. Cette méthode nous a alors permis de traiter de tous les grands thèmes de l’étude, dans un ordre que les participants peuvent tous appliquer à leur propre situation. Cet ordre chronologique permet d’aborder ces thèmes dans une perspective qui favorise la comparaison entre les différentes expériences. Étant donnée la vocation exploratoire de l’étude, il était prévu de laisser libre cours à la discussion et ainsi avoir l’occasion d’ajuster les questions en cours d’entretien, tout en tenant compte du temps alloué à chacun des thèmes (Geoffrion, 2004). Le guide d’entretien tel que présenté aux participants aux focus groups se trouve en annexe III.

Déroulement du focus group
Les groupes de discussion ont généralement eu lieu dans les locaux des organismes ayant contribué au recrutement des participants. Dans certains cas, l’activité s’est tenue dans d’autres lieux publics de la ville visitée (bibliothèque, centre communautaire, CEGEP). Des discussions d’une durée d’une heure trente minutes étaient prévues et ce cadre a généralement été respecté.

Au moment où tous les participants étaient présents, nous avons distribué les formulaires de consentement à la participation au projet. Nous avons alors débuté l’enregistrement, et posé un magnétophone sur une table. Les participants n’ont jamais semblé dérangés ni contraints dans leurs discours par l’enregistrement.
Nous avons entamé les discussions en présentant les objectifs du projet et en expliquant brièvement la méthodologie de la recherche. Des fiches présentant les grands thèmes de discussion étaient distribués à chacun des participants afin qu’ils connaissent et comprennent la trajectoire que prendrait la discussion. Nous avons généralement disposé d’assez de temps pour aborder l’ensemble des thèmes, mais la participation a été inégale chez les différents participants au projet et ce, pour diverses raisons, dont la maîtrise de la langue. Il était cependant possible d’encourager la participation des personnes qui s’exprimaient moins souvent. Dans l’ensemble, les participants ont été satisfaits de leur participation à l’événement. Des informations pertinentes pour certaines personnes ont été échangées, quelques participants ont quitté avec des notes ou des contacts supplémentaires et d’autres ont profité de l’occasion pour diffuser diverses informations.

Limites de la méthode de cueillette de données : les focus groups

En premier lieu, les groupes de discussion, selon Halcomb et al. (2007 : 1007) ne constituent pas toujours un environnement propice à la confidence. Ainsi, certains participants peuvent être freinés par la présence d’étrangers participant à la discussion. En second lieu, le succès d’un focus group dépend en grande partie de la qualité du travail du modérateur, de son habileté à mener des discussions pertinentes et qui susciteront un intérêt général et une participation enthousiaste des membres (Geoffrion, 2004 ; Halcomb et al., 2007 ; Wilkinson, 2004 ;). Un modérateur qui connaît moins son sujet, qui s’exprime difficilement devant un groupe ou qui suscite peu d’intérêt pour les questions et thèmes peut entraver le déroulement du groupe de discussion ou simplement le mener à la dérive, pouvant se traduire par des conflits entre les participants, des bifurcations importantes vers d’autres sujets de discussion ou l’attention de l’événement vers une minorité de participants. Nous possédons une très bonne connaissance des thèmes de discussion (en particulier l’immigration), et disposions d’une bonne expérience en tant que modérateur : l’ensemble des groupes de discussion se sont très bien déroulés. Finalement, les focus groups présentent davantage d’enjeux sur le plan éthique que d’autres méthodes d’enquêtes. En effet, la confidentialité ne peut être assurée de façon aussi rigoureuse que dans le cas des entretiens individuels puisque la présence d’autres participants ne permet pas de garantir l’anonymat des membres du groupe. À cet égard, Halcomb et al. (2007) suggèrent d’identifier les participants par leur unique prénom, ou même par un pseudonyme, à leur demande. Il demeure néanmoins qu’à titre de chercheur, nous ne pouvons en aucun cas prévenir le cas accidentel de la connaissance préalable de deux participants. Les enjeux liés à la confidentialité n’ont posé aucun problème dans le cadre des groupes de discussion que nous avons tenus. Certains participants se connaissaient préalablement, parce qu’ils fréquentaient les mêmes organismes d’aide à l’emploi, mais ont été informés des exigences de discrétion liées à l’exercice.

Chapitre 4 « Les gens pensent que l’ingénierie dans mon pays c’est très primaire. Ou qu’on ne fait rien » : Les défis de l’insertion en emploi des jeunes immigrants

De façon générale, des circonstances variées ont conduit les jeunes immigrants que nous avons rencontrés vers le Québec. L’arrivée dans un nouvel environnement – la grande majorité des immigrants sont arrivés en premier lieu dans une ville du Québec – est souvent source de stress et de perte de repères. Il faut d’abord trouver un logement et comprendre le fonctionnement du système : écoles, garderies, services divers, marché du travail. L’emploi constitue souvent l’une des priorités des personnes qui arrivent de l’étranger pour vivre au Québec. Les deux chapitres suivants font état des résultats de la recherche qualitative que nous avons menée auprès des clientèles immigrantes (actuelles ou anciennes) des organismes offrant des services d’aide à l’emploi de diverses régions du Québec (RMR Montréal, Capitale-Nationale, Sherbrooke, Vallée du Haut-St-Laurent et Montérégie Est).

Entre les mois de juin et septembre 2012, l’équipe de recherche a rencontré 140 jeunes immigrants lors de 18 groupes de discussion. Ces derniers, âgés de 18 à 35 ans, étaient invités à discuter des enjeux relatifs à leur employabilité.

Contexte de l’établissement des immigrants dans les différentes régions du Québec

Dans la plupart des cas, le contexte de l’établissement des immigrants dans les régions visitées n’est pas lié aux perspectives d’emploi que celles-ci présentent. Ceci n’équivaut cependant pas à dire que les différentes régions ne présentent pas de potentiel d’emploi pour les personnes immigrantes, mais plutôt que celles-ci se sont installées à un endroit ou à un autre pour des raisons autres que le potentiel d’employabilité de la région. Parmi ces raisons, la plus courante est la présence de membres de la famille ou d’amis dans la région. La réputation de tranquillité et le coût de la vie moins élevé ont également été mentionnés. En effet, le capital social des immigrants a constitué le motif principal de leur localisation résidentielle dans près des trois quarts des cas. Ces situations s’articulent souvent par l’établissement du nouvel arrivant dans un quartier qui est déjà investi par les membres de sa famille – proche ou élargie – ou par des amis, qui l’aident à intégrer son nouvel environnement. La réunification familiale a également été mentionnée à de nombreuses reprises. Dans ces cas, le nouvel arrivant rejoint un conjoint ou un membre de sa famille, le plus souvent dans la même résidence.

Les groupes de discussion qui ont eu lieu dans la Ville de Montréal ont montré des résultats semblables, bien que moins tranchés. En effet, les perspectives d’emploi n’ont pas nécessairement attiré une plus grande proportion des personnes que nous avons rencontrées. Toutefois, les motifs de l’installation dans un milieu urbain diffèrent quelque peu. La présence des communautés ethnoculturelles et la proximité d’un marché de produits et de services typiquement liés à leur région d’origine furent citées plus souvent par les participants établis dans la RMR de Montréal.

L’exception campivalencienne

Seuls les participants au groupe de Valleyfield ont majoritairement choisi de s’établir dans la région pour les perspectives d’emploi qu’elle offre. La discussion a démontré que les participants, attirés par le potentiel d’employabilité de la région – meilleur qu’à Montréal à leurs yeux, – sont presque tous employés dans le secteur secondaire (fabrication, transformation). Ce n’est toutefois pas uniquement le cas des employés du secteur secondaire. Certains ont également partagé des réflexions au groupe à l’égard de l’accès différencié à l’emploi selon le contexte régional ou métropolitain :

« D’un point de vue académique, il n’y avait pas de problème mais ça dépend du métier, mais je suis persuadée qu’on ne m’aurait pas donné la même chance à Montréal, au même niveau. Automatiquement en région, peut-être, les besoins sont plus grands. Il y a moins de monde qui se présente. Automatiquement, on nous laisse plus de chance. Le fait aussi qu’il y a moins d’immigrants qui soient présents, il y a peut-être une tolérance, une ouverture, une forme de quiétude, de confiance qui se fait peut-être plus que dans la grande ville » (Isabella, (France), Valleyfield).

Sherbrooke, ville étudiante

À Sherbrooke, une partie importante des participants ont dit s’y être établis pour compléter des études universitaires. C’est là une différence majeure par rapport aux immigrants qui s’installent au Québec pour d’autres motifs et ce, pour deux raisons : premièrement, le contexte d’établissement dans la région semble être spécifique à Sherbrooke car le choix de s’établir dans une région dans l’objectif d’y suivre une formation universitaire est peu ressorti dans les autres groupes de discussion. Deuxièmement, le type de formation suivie semble également être spécifique à Sherbrooke ; plusieurs des participants rencontrés étaient inscrits dans des programmes de second ou de troisième cycle universitaire, ce qui démontre souvent que le choix d’étudier ne constitue pas une stratégie pour favoriser l’employabilité, mais un projet préparé avant l’immigration. (Cet aspect sera étudié plus en profondeur dans le chapitre suivant).

S’installer là où les perspectives d’emploi semblent prometteuses

Les personnes ayant choisi leur localisation résidentielle en fonction des perspectives d’emploi ont, dans certains cas, mentionné les grandes industries de la région ou la présence d’entreprises jeunes. Il est important de noter que souvent, ces personnes possèdent déjà un diplôme dans un domaine connexe et cherchent à poursuivre leur cheminement professionnel ou à obtenir une validation académique des diplômes et titres de compétences acquis à l’étranger. C’est notamment le cas de la technopole agroalimentaire ainsi que les formations offertes dans ce champ de spécialisation (technique en santé animale, techniques de l’Institut de technologie agroalimentaire) à St-Hyacinthe.

La région ou la ville ?

Les participants rencontrés dans la banlieue de Montréal confirment ce que plusieurs recherches énoncent quant à la perception des immigrants de la métropole. En effet, on tend à démontrer que les immigrants ont une forte perception de la grande ville comme étant moins propice à l’éducation des enfants et à la vie familiale, la banlieue rapprochée ou éloignée constituant l’alternative la plus convenable (Charbonneau et Germain, 2002). Si les personnes rencontrées à Montréal vivent moins souvent dans un contexte familial dit classique (famille nucléaire) que les participants rencontrés dans ses banlieues, elles n’y résident toutefois pas pour des raisons d’emploi pour autant. Le mode de vie qu’offre la ville, la présence des membres de la communauté ethnique d’origine et la réunification familiale représentent les motifs les plus souvent évoqués.

Opinion – ou mythe – généralisé au Québec, et parmi les immigrants rencontrés en région, la qualité de vie serait bien meilleure en région qu’à Montréal. Selon ces derniers, en plus de représenter un endroit d’une qualité supérieure pour élever une famille, il pourrait s’agir d’un environnement favorable à l’employabilité des immigrants.


« C’est plus facile d’être en banlieue qu’à Montréal. La qualité de vie à Montréal, c’est dangereux, il y a beaucoup de problèmes, pour les écoles, pour les enfants donc la qualité de vie, c’est plus tranquille. Tout le monde se connaît, c’est plus sécuritaire » (Tereza, (Pérou), Châteauguay).

La logique sous-jacente – et contredisant presque toutes les revendications d’égalité des chances présentées ci-dessous – serait que la Ville accueille beaucoup d’immigrants, donc l’offre d’emplois serait réduite. Les immigrants rencontrés ont donc la perception d’un nombre fini d’emplois disponibles pour les personnes immigrantes.

D’autres participants ont suggéré qu’il était plus facile d’accéder à un emploi dans certaines régions pour les immigrants, puisque généralement, la maîtrise de l’anglais semble moins souvent exigée.

Finalement, comme plusieurs interlocuteurs lors des discussions l’ont fait valoir, les besoins en main-d’œuvre dans les secteurs primaire et secondaire dans la région favorisent l’employabilité des immigrants peu qualifiés ou dont les compétences et titres de compétences ne sont pas reconnus.

Contribution du capital humain à l’employabilité des immigrants au Québec

Près de la moitié des participants aux groupes de discussion avaient obtenu un diplôme de niveau collégial ou supérieur à l’extérieur du Canada avant d’y immigrer, et presque autant avaient acquis une expérience pertinente de travail dans le domaine de leur formation. Parmi ceux qui ne possédaient pas de diplôme ou de titre de compétences étranger, la majorité avait des expériences de travail dans des domaines non-qualifiés (principalement dans les secteurs manufacturiers et du commerce de détail). Il semblerait que le champ dans lequel la formation académique, et surtout l’expérience professionnelle ont été acquises influence de façon substantielle l’employabilité de l’immigrant dans ce même domaine et ce, dans les différentes régions visitées. Par exemple, les diplômés dans le domaine agroalimentaire (ingénieurs et techniciens) semblent avoir été en mesure de faire valoir leur capital humain plus facilement que les autres. Les participants ayant une expérience antérieure dans le domaine des services (gestion), des professions réglementées ou régies par un ordre (économie, architecture, éducation ou autres champs du génie que celui de l’agroalimentaire) ont éprouvé davantage de difficultés à faire valoir leurs compétences et connaissances dans leurs domaines respectifs. C’est notamment le cas d’une participante ayant éprouvé des difficultés à faire valoir son diplôme pour trouver un emploi et qui en a plutôt profité pour effectuer des études supérieures. Ces observations confirment les résultats de plusieurs recherches, dont certaines recensées dans la revue de littérature présentée au chapitre 1 (Chicha et Charest, 2008).

« C’est la même chose en communications. J’ai utilisé mon diplôme de communications pour entrer à la maîtrise de service social. C’est [seulement] pour ça que je peux utiliser mon diplôme (…) Ils m’ont dit si vous étudiez très bien les langues, c’est sûr que vous pouvez trouver un emploi en communications, mais ce n’est pas si facile » (Dina, (Colombie), Sherbrooke).

Tant en région que dans la métropole, la contribution du capital humain à l’employabilité des immigrants est souvent très faible. Même si certains domaines semblent plus ouverts, l’accès à l’emploi dans ces domaines dépend de plusieurs variables, dont le pays d’origine et les compétences linguistiques. Dans plusieurs cas, il demeure difficile de faire valoir les compétences les plus simples qui ont été acquises à l’étranger.

Premières stratégies de recherche d’emploi et accès aux ressources d’aide à l’accueil et intégration et à l’employabilité au Québec

La mobilisation du capital social

Les discussions démontrent que la plupart des nouveaux arrivants usent de tactiques très semblables, dès leur arrivée, pour obtenir un emploi. Tout dépendant de leur position dans le cycle de la vie (étudiant, jeune parent, parent de famille nombreuse), ils auront recours à un moment ou à un autre de leur parcours aux services d’aide à l’emploi, mais dans un premier temps, ils consulteront d’abord leur entourage afin de les orienter sur le marché du travail : c’est la mobilisation du capital social.

Il s’agit là de recourir aux personnes de l’entourage – amis, famille et connaissances – (liens forts et liens faibles) afin qu’ils contribuent à l’obtention d’un emploi ou qu’ils mobilisent leurs propres réseaux afin d’aider une personne à trouver un emploi. Les personnes rencontrées ont généralement eu recours à l’aide des personnes qu’elles connaissaient, d’abord pour se familiariser avec le marché du travail, lorsque c’était possible. Ceci confirme les résultats de certaines études portant sur l’employabilité des personnes immigrantes (Bastien et Bélanger, 2010 et Chicha et Charest, 2008) ainsi que les résultats de l’enquête par questionnaire que nous avons réinterprétés en section 2 (Nolet, 2012).

Il semble toutefois exister une dichotomie dans les perceptions de l’utilité du capital social. En effet, certains participants reconnaissent l’importance de la mobilisation de l’entourage uniquement pour obtenir un emploi dit « alimentaire ». D’autres, toutefois, ne reconnaissent que le contraire, c’est-à-dire l’importance du capital social pour trouver un emploi dans son domaine. Ces deux positions tranchées ont été évoquées à maintes reprises lors des discussions de groupe.

« Comme ça, j’ai connu beaucoup de personnes. J’ai travaillé avec eux à des affaires qu’ils font. Je l’ai fait. Ça a marché. C’est pratique pour trouver un emploi alimentaire, un endroit pour m’habituer, toute ça » (Jose, (Colombie), Sherbrooke).

« S’il y a une offre, je pense que c’est déjà parce qu’il y a une personne qui a travaillé dans cette organisation, une bénévole qui a déjà travaillé donc… Si une personne arrive sans réseau professionnel, c’est très difficile » (Ulrich, (Allemagne), Sherbrooke).

On a aussi reconnu l’utilité du réseau social pour permettre l’accès aux emplois du « marché caché », c’est-à-dire qui ne sont pas diffusés par les canaux officiels. De nombreux participants ont effectivement fait référence à ces emplois qui ne s’obtiennent pas par le biais des répertoires d’offres d’emploi des journaux ou des organismes d’aide à l’emploi.

« C’est sûr, ils nous disent tout le temps que 80 % des offres d’emplois sont cachées. Donc, il faut vraiment faire une recherche. (Et où sont-elles cachées ?) Dans les gens, dans les réseaux informels. Je pense que les réseaux sont importants » (Isidore, (Colombie), Montréal).

Certains participants ont aussi établi un lien entre l’intégration sociale et l’obtention d’un emploi. Il est en effet important pour eux de construire un réseau social parce qu’ils reconnaissent les vertus de ce type de réseau dans l’insertion en emploi. L’établissement de liens forts avec des personnes de leur entourage s’avère toutefois plus difficile dans certains cas. Plusieurs personnes ont reconnu que les réseaux sociaux, malgré leur utilité à plusieurs égards, demeure l’apanage des co-ethniques, et que parfois les contacts avec la société d’accueil se limitent aux réseaux professionnels. Ces constatations révèlent une difficulté pour certains immigrants à s’intégrer socialement, ce qui peut entraîner – ou faire perdurer – des difficultés d’insertion en emploi.


« (…) c’est un préjugé, c’est une réponse naturelle, mais comme on veut faire des activités sociales, on [se] retourne vers notre communauté parce qu’on ne trouve pas d’autres réseaux sociaux (…) c’est difficile de trouver les amis québécois. Même avec les gens avec qui on travaillait, nos relations restaient toujours professionnelles ». (Hannah, (Iran), Québec).


« Je n’ai pas d’amis québécois qui m’ouvrent la porte et qui me disent « viens manger, on va jaser ». Non. Ce n’est pas vrai ça. (…) Tu ne rentres pas dans ma bulle, je ne rentre pas dans la tienne puis on est bien correct. Chacun pour soi. Ça, ça fait une méchante différence (Francine, (France), Terrebonne).

Les participants nuancent toutefois ce point de vue : la validité des conseils et informations issus des réseaux sociaux n’est pas garantie, et il vaut parfois mieux prendre les informations et l’aide à la source plutôt que de suivre le même chemin que ses prédécesseurs. Dans la littérature, cet état de fait est fréquemment cité comme « l’envers de la médaille » du capital social :

« (…) tu commences à connaître des gens qui ont de l’expérience ici mais ils te laissent de l’expérience qu’ils ont eue. Donc si la personne a un travail comme journalier, ils te disent, tu vas être bien payé dans la compagnie où je travaille, viens travailler. Il s’engage dans la même affaire. C’est là qu’on commence à faire les mêmes erreurs que l’autre. Tu connais quelqu’un d’autre…et ainsi de suite. Tu amènes les personnes dans le même trou. Viens avec moi dans mon trou, on va être ensemble. Tu commences à avoir de la misère à sortir du cercle d’amis pour grandir car il manque d’information » (Baptiste, (Mexique), St-Jean-sur-Richelieu


« Mais les autres qui n’ont pas su gérer les obstacles et qui eux-mêmes se retrouvent dans un cercle vicieux et que vous ne faites pas vous-même appel à votre intelligence, c’est des gens qui peuvent vous entraîner dans le gouffre. Donc c’est… En fait, c’est les deux faces de la médaille » (Tobbi, (Côte d’Ivoire), Longueuil-RMR Montréal).

Recours à des organismes offrant de l’aide à l’emploi et de l’aide à l’établissement

Parmi les régions visitées, aucune ne semblait organisée de la même façon quant à l’aide disponible pour les immigrants. Également, il est clairement ressorti que l’information conduisant à ces ressources semble diffusée de façon inégale.

En Montérégie Est par exemple, les ressources sont nombreuses et plusieurs participants ont mentionné s’en être prévalus. À Granby, les participants ont exprimé leur satisfaction à l’égard de nombreux services d’aide : accueil et intégration, francisation, aide à l’emploi, orientation professionnelle et académique, inscription à différents programmes d’employabilité – PRIIME, Connexion Compétences [48] –, assistance dans les dossiers d’immigration, etc. L’attestation d’études collégiales (AEC) Intégration à la société québécoise offert exclusivement au CÉGEP de Granby [49] a fait l’objet d’une discussion intéressante entre les participants puisqu’après avoir complété son AEC, un des jeunes a réussi par la suite à intégrer une technique très contingentée.

(…) je ne sais pas si vous connaissez l’AEC en intégration de la société québécoise. Ça se donne à Granby, et si je me trompe pas, c’est le seul Cégep qui donne la formation ici dans la Rive-Sud. Moi, je vous encourage à le faire. Moi je l’ai fait. Ça dure un an et demi, ils disent tout ce qu’il y a sur le marché du travail au Québec. C’est quoi vos chances de trouver un emploi dans ce que vous voulez. Si vous avez déjà une formation, à la fin, tu fais un stage dans ton domaine, c’est le cégep qui te trouve un stage. Sinon, il te trouve un stage dans ce que tu veux faire. […] C’est bon parce que c’est pas toi qui cherche le stage, c’est le cégep. Et quand c’est le cégep qui parle, c’est quelque chose d’important (Jeffrey, (Colombie), Granby).
D’une durée de 750 heures, l’AEC vise à favoriser l’intégration de la personne immigrante à la vie professionnelle en lui permettant « d’acquérir une maîtrise suffisante de la langue française tant à l’oral qu’à l’écrit ; en développant sa capacité d’utiliser les logiciels courants dans les entreprises ; en développant des compétences à jour dans l’utilisation des nouvelles technologies [et] en lui permettant de mettre en pratique des techniques de recherche d’emploi » (MELS, 2012).

À St-Hyacinthe, les organismes offrant de l’aide aux nouveaux arrivants ont également semblé très utiles et appréciés. Les initiatives du Forum 2020 [50] ont profité à plusieurs personnes, qui ont salué l’efficacité des activités qui y sont offertes (les déjeuners d’affaires, en particulier). Tout comme à Granby, l’aide à l’établissement et l’aide à l’emploi ont été massivement sollicitées Certains participants ont mentionné avoir préféré les services, plus personnalisés, en Montérégie Est qu’à Montréal en raison du plus petit nombre d’immigrants à desservir pour ces organismes. Plusieurs participants ont profité des programmes d’employabilité gouvernementaux PRIIME et IPOP, ainsi que des ateliers de groupes utilisés notamment dans les clubs de recherche d’emploi. Cette activité favorisant le brassage entre immigrants et non-immigrants leur permet non seulement de s’activer en groupe, mais comporte aussi une dimension d’entraide et de partage de témoignages et d’expériences. Des incohérences dans les informations fournies par les agents des Centres locaux d’emploi ont été relevées par les participants à quelques reprises, notamment en ce qui a trait à leur admissibilité à des programmes gouvernementaux ou aux perspectives d’emploi dans un secteur donné.

À St-Jean-sur-Richelieu, outre les services et programmes d’employabilité mentionnés ci-dessus, le soutien très personnalisé aux nouveaux arrivants a été particulièrement apprécié des participants aux discussions. L’accompagnement jusqu’à la communication avec l’employeur potentiel semble avoir été un élément déterminant dans l’obtention d’un emploi pour certains participants.

À Sorel-Tracy, l’intégration des services a fait l’objet de commentaires très positifs et d’une vive appréciation des participants au groupe de discussion. Un bon nombre de services d’employabilité sont accessibles et un accompagnement particulier pour les personnes immigrantes ont satisfait plusieurs interlocuteurs du groupe.

Un nombre moins important de participants ont indiqué avoir participé à des programmes d’employabilité dans la sous-région de la Vallée du Haut-St-Laurent, où nous avons réalisé des groupes de discussion à Châteauguay, Valleyfield et Vaudreuil. De façon générale, les services d’aide à l’emploi ont semblé utilisés moins massivement qu’ailleurs bien qu’ils l’aient été notamment pour l’aide à la préparation du CV et à l’entrevue de sélection, l’obtention d’une subvention pour un retour à l’école ou pour la francisation ainsi que la participation à des programmes et mesures tels que PRIIME.

À Vaudreuil, la demande pour ces services a semblé moins importante puisqu’en général, les participants ont intégré rapidement le marché du travail ; les difficultés et obstacles ont donc semblé moins importants au sein de ce groupe. L’aide à l’arrivée a généralement été reçue à Réseaux Emploi-Entrepreneurship (REE), où les immigrants semblent avoir été systématiquement réorientés lors de leur première visite au CLE de la région. Les services de francisation, préparation du CV et atelier de recherche d’emploi ont été reçus. La mesure Jeunes en action a été suivie par deux jeunes au Carrefour jeunesse-emploi (CJE) alors que le PRIIME a été proposé à un participant, qui n’y a finalement pas adhéré.

À Valleyfield, le Centre de Recherche d’emploi du Sud-Ouest (CRESO) a accueilli la plupart des participants rencontrés, qui ont notamment apprécié le service personnalisé offert aux nouveaux arrivants.

« Les organismes qui ont vraiment un volet dédié à l’immigration, ça fait vraiment une différence parce que le volet social, il y a de l’accompagnement. Quand tu arrives, tu n’as pas de voiture. Si tu veux aller en région, c’est compliqué de te déplacer » (Isabella, (France), Valleyfield)

Plusieurs participants du groupe de Valleyfield ont obtenu des emplois grâce à une participation au PRIIME. Le Carrefour Blé [51], qui a pour objectif l’insertion en emploi de professionnels d’origine immigrante dans les secteurs de l’agroalimentaire et de l’environnement a aussi permis à une participante d’intégrer le marché du travail dans son domaine de compétences antérieur. Parallèlement, le programme d’accompagnement des diplômés en génie de l’organisme CITIM [52] (Clef pour l’intégration au travail des immigrants), qui accompagne les diplômés en génie dans leurs démarches administratives à l’ordre des Ingénieurs du Québec et leur permettent de suivre une formation de mise à jour des connaissances à Polytechnique Montréal a également permis à une personne d’obtenir un emploi dans son domaine de compétences.

À Châteauguay, les participants ont principalement recouru aux services du Centre local d’emploi, du club de recherche d’emploi et du CJE. Si de nombreux participants ont semblé avoir vécu une expérience plus ou moins satisfaisante au CLE, le CJE a semblé offrir des services plus personnalisés et mieux adaptés aux besoins des nouveaux arrivants. L’une des personnes rencontrées a participé à la mesure Jeunes en action, qu’on lui a proposée au CJE. Une seule personne connaissait l’existence du PRIIME et avait adhéré au programme. Le centre l’Accore de Châteauguay ainsi que le Centre de formation pour adultes à Beauharnois (La nouvelle École) ont aussi permis à des participants de valider ou de compléter des formations commencées ou obtenue à l’étranger.

À Québec, où deux groupes de discussion ont été réalisés, les SOIIT, RIRE2000, GIT, CJE et Option Travail CJE ont été massivement fréquentés (mais de façon inégale pour chacun des organismes) pour obtenir les différents services offerts (francisation, ateliers de groupe, construction d’un CV, préparation à l’entrevue de sélection, inscription aux programmes PRIIME et IPOP). Malgré des difficultés liées à la conjoncture et à la structure du marché du travail, les participants ont semblé, dans l’ensemble, très satisfaits des services obtenus et ont indiqué avoir reçu un encadrement et une orientation adéquats quant à leur projets professionnels. Parmi les participants rencontrés, une majorité semblait connaître les programmes auxquels ils avaient la possibilité d’adhérer et un bon nombre d’entre eux y participaient ou y avaient déjà participé au moment de la discussion.

À Sherbrooke, puisqu’il y avait surreprésentation d’étudiants de cycle supérieur, les jeunes rencontrés ont relativement peu recours aux services d’aide à l’emploi. Les services offerts par l’Université de Sherbrooke ont généralement été davantage sollicités. En ce qui concerne les autres participants, ils ont mentionné avoir trouvé des services correspondant mieux à leurs attentes au Service d’aide aux Néo-Canadiens et au CJE. Un bon nombre d’entre eux ont eu accès à des programmes d’employabilité (IPOP, PRIIME, PPE entreprises d’insertion, Québec pluriel) et ont tous semblé avoir été bien orientés par rapport à leurs projets. Les organismes offrant de l’aide à l’emploi ainsi que les programmes qui sont accessibles aux immigrants ont semblé bien connus des participants.

Dans la RMR de Montréal, où nous avons respectivement rencontré deux groupes de personnes immigrantes dans la Ville de Montréal ainsi que des groupes à Terrebonne, Longueuil, St- Jérôme et Laval, la majorité des participants ont eu recours à une aide organisée. Les CJE et CLE ont été fréquentés massivement. Certains participants ont fréquenté plusieurs organismes, et parfois plus d’un en même temps, pour y trouver des services complémentaires ou plus satisfaisants. En général, les participants sont beaucoup plus satisfaits des services reçus dans les organismes communautaires qui offrent des services d’aide à l’emploi adaptés à la réalité des personnes immigrantes.

Les programmes d’employabilité Connexion Compétences, PPE-Entreprise d’insertion et PRIIME ont semblé avoir contribué de façon importante à l’employabilité des participants de la RMR de Montréal. L’existence de ressources d’aide à l’emploi semble connue de l’ensemble des participants rencontrés, en dépit du fait que certains d’entre eux avaient fait le choix ou ne se sentaient pas prêts à en utiliser les ressources.

Cette section visait à faire un portrait général des initiatives prises par les participants dès leur arrivée dans leurs régions respectives. La section suivante s’intéressera aux obstacles rencontrés par les participants lors de leurs recherches d’emploi dans leurs régions respectives.

Obstacles rencontrés lors de la recherche d’emploi

Non-reconnaissance des diplômes et titres de compétence obtenus à l’étranger

Il s’agit d’une difficulté rencontrée par la majorité des nouveaux arrivants diplômés à l’étranger que nous avons rencontrés dans le cadre de cette étude : la reconnaissance des diplômes et titres de compétences obtenus à l’étranger par le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) représente un casse-tête et fait l’objet d’incompréhensions et de frustrations chez les immigrants. Les ordres professionnels québécois posent autant de difficultés aux personnes qui, dans leurs pays d’origine, pratiquaient des professions qui sont réglementées au Québec. Cet obstacle fait aussi l’objet d’analyses complexes dans la littérature québécoise (Chicha et Charest, 2008).

L’élément apporté par cette recherche est plutôt la perception qu’ont les participants de cet obstacle communément rencontré. Les participants – et particulièrement ceux que le Canada et le Québec ont admis comme travailleurs qualifiés – jugent contradictoire le fait d’être admis sur la base de leurs « qualifications » et voir ces dernières non-reconnues par les institutions de ce même pays. La non-reconnaissance des acquis et titres de compétences acquis à l’étranger est la difficulté la plus souvent mentionnée lors des discussions, la scolarisation moyenne des personnes présentes intensifiant plus ou moins la discussion.

« Ça arrive aussi aux infirmiers. Ils ont besoin d’infirmiers ici alors, dans le programme d’immigrants qualifiés, on leur donne beaucoup plus de points. Mais, quand ils arrivent ici, ce n’est pas comme ça, ils doivent aller au CEGEP et blah, blah, blah » (Marisa, (Venezuela), Terrebonne).

À Sherbrooke, cet obstacle a été nommé à plusieurs reprises, notamment en raison de la surreprésentation de participants plus scolarisés aux groupes de discussion. Ci-dessous, un extrait de verbatim qui évoque bien la perception d’une contradiction entre le fait d’être admis comme travailleur qualifié, et de ne pas voir ses compétences reconnues :

« C’est un long processus de se faire donner la résidence permanente. Toute l’expérience, toutes les capacités qu’on a, ils te donnent le domaine que tu vas être capable de travailler. Ils m’ont donné développeur des affaires, agent de développement économique. Alors pour moi, ce titre, ça m’a donné beaucoup d’attentes. Wow ! Après, je pourrais faire mieux. J’ai tout laissé, ma carrière pour venir. Ici, j’ai trouvé une autre chose complètement différente. Ce n’était pas si facile m’intégrer au marché de l’emploi » (Zoey, (Colombie), Sherbrooke).

Manque d’expérience canadienne

Un obstacle connexe à la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences obtenus à l’étranger est la non-reconnaissance de l’expérience professionnelle acquise à l’étranger. Aussi désignée comme « manque d’expérience canadienne » par les employeurs et candidats immigrants, cette difficulté d’insertion professionnelle touche un grand nombre de personnes qui occupaient des emplois qualifiés ou semi-qualifiés dans leur pays d’origine.

« (…) j’avais 3-4 années d’expérience quand je suis arrivée ici. […] Je me suis fait dire carrément des fois par des gens que les expériences hors Canada, on n’en avait strictement rien à faire et qu’il fallait être prêt de repartir de zéro. […] C’est comme si tu arrivais pas de référence ». (Mariona, (Algérie), Québec).

« J’ai fait des efforts. J’ai posté des CV. J’ai passé des entrevues, mais c’est toujours un problème d’expérience canadienne qui me bloque » (Bernardo, (Maroc), Sherbrooke).

Certains participants suggèrent que le « manque d’expérience canadienne » pourrait aussi dissimuler d’autres motifs de refus d’un candidat immigrant parfois évoqués lorsque les jeunes immigrants postulent pour des emplois non-qualifiés :

« Quand je suis allé pour la plonge, ils m’ont demandé de l’expérience. C’est juste pour laver des assiettes ! (Jean-Maurice, (Haïti), Laval)

« Et moi je suis allé dans un lave-auto manuel. Je précise que c’est manuel parce que, oui, avec la technologie, je n’ai pas d’expérience mais, manuel, tu prends le balai… Je suis allé avec mon CV, il m’a dit « désolé mon ami mais tu n’as pas d’expérience ». Cette journée là, ça m’a… J’aurais mieux aimé entendre « désolé on n’embauche pas aujourd’hui ». Ça, ce serait juste. Mais si on me dit que je ne suis pas expérimenté pour laver des voitures à la main… » (Orelien, (Haïti), Laval)

« J’ai cherché comme femme de ménage mais, quand je suis allée, ils m’ont demandé de l’expérience. Je suis une femme ! » (Nima, (Afghanistan), Laval) ».

Certains programmes gouvernementaux d’aide à l’emploi visent précisément à réduire, voire éliminer ce type d’obstacles. Les stages en entreprise en sont un exemple. Il semble toutefois que dans certaines régions et dans certains domaines, l’accès aux stages soit plus restreint. Comme le mentionnent plusieurs immigrants rencontrés, « quelqu’un doit donner la première chance », et cette chance pourrait passer, selon eux, par l’accès aux stages et au bénévolat dans des entreprises du domaine de travail pressenti par l’immigrant. La prochaine citation présente notamment la difficulté, pour les jeunes immigrants, d’accéder aux stages à du bénévolat :

« Je trouve que c’est un peu ironique que les personnes veulent de l’expérience d’ici mais, aussi, trouver du bénévolat ou des stages, c’est difficile » (Lina, (Colombie), Montréal).

Discrimination et préjugés
Les participants aux groupes de discussion n’ont pas échappé aux préjugés ou à différentes manifestations de discrimination à l’égard des nouveaux arrivants. Ce n’est toutefois pas sans démontrer une certaine forme de compréhension des comportements des employeurs que les immigrants ont relaté leurs expériences. Par exemple, certains employeurs ont interrogé les immigrants à propos du motif de leur immigration ou discriminent sur la base du nom qui apparaît sur le CV. Certains participants ont aussi eu l’impression que leur formation technique antérieure était négligée pour l’unique raison qu’elle a été suivie à l’étranger. Parallèlement, l’expérience de travail dans des secteurs non-qualifiés acquise à l’étranger semble également faire l’objet d’un problème de reconnaissance qui envoie un message discriminatoire aux nouveaux immigrants qui jugent irrespectueux ce type de pratique :

« Les expériences au travail, on peut pas les mentionner. Quand tu fais ton CV… Disons si tu n’as pas de profession, disons que tu as déjà travaillé au resto ou dans une usine en Afrique, ça sert à rien du tout. C’est du temps perdu parce qu’il n’y a personne qui va reconnaître ça » (Bobby, (Rwanda), Granby).

« J’ai déjà rencontré des gens qui étaient surpris que je sache comment utiliser un fax. Ils étaient surpris que je sache comment faire un document Excel ou que je sache utiliser Outlook. Ce sont les mêmes gens qui m’ont demandé si je savais utiliser un téléphone. […] C’est dommage parce que nous, on est des gens qui veulent travailler. On ne demande pas de l’argent au gouvernement, on veut travailler. Alors quand on entend les gens dire ça… » (Wanda, (Philippines), Terrebonne – RMR Montréal).

« L’entreprise qui m’avait choisie m’a vue pour la première fois. Et là, après ça, ils ont envoyé une feuille à la directrice [une personne au CLE] pour dire qu’ils n’avaient pas besoin de moi. Elle leur a demandé pourquoi par écrit et ils ont dit parce qu’elle est voilée. Ça a été le choc que ma vie » (Zohra, (Tunisie), Montréal)

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Malgré des préjugés encore présents, comme le démontrent les citations précédentes, les situations de discrimination n’ont en somme pas été rencontrées couramment. Malgré certaines perceptions de préjugés et de discrimination des personnes immigrantes – qui ont plus souvent pour motif la condition immigrante que l’origine ethnique particulière – plusieurs personnes ont suggéré que les perceptions de discrimination sur le marché du travail pouvaient être erronées et qu’il pouvait s’agir d’un phénomène expliqué par une volonté de s’assurer que le travail serait fait selon les normes en vigueur.


« Tout ça pour vous dire que pas juste au Québec, mais partout, il y a un problème de barrière quand on ne connait pas le candidat. C’est comme leurs impressions au début. C’est à nous, en tant qu’immigrants, de faire preuve que nous, on est capables de faire ceci ou cela » (Zeineb, (Madagascar), Sherbrooke).

Nous notons, à la suite de l’analyse des données, et certainement sans prétendre à la possibilité de généraliser la situation plus largement qu’à l’échantillon analysé, que les cas de perception de discrimination et d’expression de préjugés semblent plus courants dans la RMR de Montréal que dans les régions visitées. Il demeure difficile d’interpréter cette observation – offre de main-d’œuvre plus importante à Montréal, possibilité accrue pour les employeurs de refuser des candidats, employeurs des régions mieux préparées à l’insertion professionnelle des nouveaux arrivants ? Ces hypothèses restent à être vérifiées.

La question de la langue

Il va de soi que la maîtrise de la langue d’usage au Québec est de mise pour occuper un emploi. Les immigrants rencontrés ont semblé bien comprendre cette exigence, reconnaître son importance et avoir suivi assidûment les cours de francisation qui leur étaient offerts. La maîtrise de la langue française a toutefois représenté un obstacle majeur dans l’intégration en emploi des immigrants. La majorité d’entre eux, dans l’ensemble des groupes de discussion, recommanderait à un jeune immigrant de placer l’apprentissage de la langue française au sommet de ses priorités lorsqu’il amorce sa recherche d’emploi.

« (…) si on n’a pas la langue, tu ne peux pas trouver un travail ! (…) La langue est un problème, mais c’est notre problème. Il faut qu’on prenne beaucoup de cours. Si on habite ici, il faut qu’on le parle, quoi » (Rita, (Mexique), Sorel).

La maîtrise de la langue anglaise a été mentionnée de façon inégale selon les régions où les groupes de discussion ont été réalisés. Il semble qu’en termes de maîtrise de la langue, celle du français soit suffisante pour obtenir un emploi dans certaines régions comme la Montérégie Est et la Capitale-Nationale. Il n’en demeure pas moins que le fait de connaître la langue anglaise constitue un avantage, mais pas nécessairement une exigence, comme nous l’avons observé dans la Vallée du Haut-St-Laurent et surtout à Sherbrooke et dans les secteurs de la RMR de Montréal situés plus près de l’agglomération. L’exigence d’une langue seconde, qui semble bien rarement mentionnée lors des procédures de sélection des immigrants, en laisse plus d’un perplexe lorsqu’il amorce sa recherche d’emploi. En effet, plusieurs immigrants ont rapidement perçu les sensibilités québécoises liées à l’usage des langues française et anglaise.

« Quand j’ai immigré au Québec, j’ai immigré dans le Québec français mais, quand je cherche un travail, ils demandent toujours l’anglais. Plus l’anglais que le français » (Asif, Moldavie), Longueuil)

« C’est ridicule. L’anglais devrait avoir une plus grande place dans le test [procédure de sélection] pour représenter sa présence réelle au Québec. En entrevue, on te demande toujours l’anglais (Horace, (Cameroun), Longueuil)

« C’est plus facile si tu parles anglais. Là, je cherche un travail et j’en ai trouvé plein mais je ne parle pas anglais. On demande ça partout » (Jean-Maurice, (Haïti), Laval)

« Quand tu arrives ici, tu parles français, tu te dis c’est correct, je suis francophone mais on demande que tu sois bilingue. C’est quelque chose de caché. C’est normal, c’est vrai, mais c’est juste qu’on ne le dit pas » (Anne, (Burkina Faso), Montréal).

Transport et taille de la famille
Si la connaissance de l’anglais ne semble pas essentielle à l’obtention d’un emploi dans certaines régions du Québec, la possession d’un permis conduire semble l’être. Plusieurs participants ont rapporté des difficultés de déplacement vers le lieu de travail, et la nécessité d’obtenir un permis de conduire et de se procurer une automobile rapidement, ce qui occasionne des dépenses importantes.

« Dans mon cas, on arrive à Montréal, on n’avait pas d’obstacles par rapport au transport car il y a l’autobus, le métro. En arrivant ici, on a dû obtenir tout de suite le permis de conduire. […] à Montréal car j’en avais pas besoin, ni voiture. Mais il a fallu aller les deux premières semaines en marchant au travail (40 minutes). Rires. Ensuite, je me suis acheté un vélo » (Luis, (Pérou), St-Hyacinthe).

Structure et organisation du marché du travail

Outre les obstacles liés aux ressources et caractéristiques personnelles, la structure d’emploi dans les différentes régions peut être considérée comme un obstacle à l’insertion à l’emploi dans le domaine de spécialisation, surtout pour les personnes diplômées qui cherchent un emploi depuis plus longtemps. Certaines régions présentent par exemple une plus grande offre d’emplois non- qualifiés qui soient plutôt payants. Pourtant, si cette situation constitue un obstacle pour certains, c’est l’opposé pour d’autres. Quelques participants se sont notamment réjouis de la situation qui convient bien à leurs attentes en termes de rémunération et d’employabilité dans la région.


« Ici, c’est sûr que tu vas trouver un emploi dans une usine, il y a en beaucoup ici à Granby, moi je trouve ça plus facile, donc déjà le français, si tu parles pas beaucoup le français, c’est pas grave, ils vont te laisser rentrer parce qu’ils ont besoin de main-d’œuvre » (Jeffrey, (Colombie), Granby).

D’autres participants ont fait allusion au fait que l’avantage économique et l’accès des immigrants à certains emplois dans le secteur manufacturier peuvent ralentir le processus de recherche d’emploi dans leur domaine de compétences. Cette réalité laisse place à des perceptions négatives (et relativement répandues) du milieu du travail au Québec, particulièrement chez les travailleurs qualifiés :

« Moi je travaillais pour la compagnie X. Pour le plancher, pour ne pas dire un autre mot là, c’est de la merde. (…) Peu importe, Noir, Marocain… y’en a beaucoup. Même le gars de l’agence embauche juste des immigrants. Pourquoi ? Parce qu’on accepte, on prend n’importe quoi » (Baptiste, (Mexique), St-Jean-sur-Richelieu).


« Moi, si on m’avait dit la vérité, je n’aurais pas quitté mon boulot et ma vie chez moi. Donc c’est un peu ça, je me sens trahi. Est-ce qu’on fait venir des immigrants juste pour le travail d’usine, juste pour faire la manufacture ? Parce que là non plus on ne dit pas la vérité. Pour faire un boulot de manufacture, il suffit de faire quelques appels pour trouver du travail mais, quand il s’agit de votre domaine en tant que tel, c’est comme si vous entriez dans une confrérie à laquelle vous n’êtes pas invitée. C’est vraiment choquant et ça ne donne vraiment pas une bonne image » (Tobbi, (Côte d’Ivoire), Longueuil – RMR Montréal).

« Étant donné que le travail dans la manufacture n’est pas un travail qui nécessite des connaissances, on te prend sans entrevue. Ça veut dire que le travail de manufacture, c’est le travail de quelqu’un qui n’a aucune valeur. Je trouve que c’est très injuste » (Horace, (Cameroun), Longueuil – RMR Montréal).

Autrement, les professionnels et diplômés à l’étranger ont évoqué, de façon assez concordante d’un groupe à l’autre, une différence au niveau de la polyvalence des travailleurs de certains domaines. Il semblerait selon eux qu’au Québec, les travailleurs soient moins polyvalents et appelés à se sur-spécialiser, voire à ne pas être en mesure d’accomplir certaines tâches connexes à leur sur-spécialisation. À l’opposé, dans leurs pays d’origine respectifs, les travailleurs seraient plus polyvalents, notamment au niveau de la formation, mais également en emploi. Selon leur analyse, cet état de fait leur confère à la fois un avantage ou un désavantage, selon les demandes des employeurs et les autres candidats qui postulent pour l’emploi.

« (…) dans mon pays d’origine (…) les professionnels sont un peu plus polyvalents, à cause du manque de spécialisation. Donc, on embauche une personne qui peut faire plein de tâches. Ici, la hiérarchie des entreprises est plus spécialisée. Embaucher pour faire telle chose et c’est tout. Donc cette polyvalence peut t’aider et te nuire à la fois ». (Josua, (Colombie), St- Jean-sur-Richelieu)


« Ici, on est plus spécialisés dans un domaine… mais pour les ingénieurs qui viennent d’ailleurs, on est plus pluridisciplinaires. Peut-être que ce n’est pas la formation, mais quand on travaille. Quand on travaille, on touche à plusieurs domaines. Ici, tu touches à quelque chose de plus spécifique. Moi, ça m’embêtait pas d’aller voir ailleurs ; mais ici, [les gens] disent ce n’est pas leur sujet [spécialisation] » (Hannah, (Iran), Québec).

Se situer sur le marché du travail

Un autre obstacle lié à l’intégration sur le marché du travail se traduit par la façon dont les personnes immigrantes se situent elles-mêmes sur le marché du travail, à partir de leurs compétences et expériences antérieures. Cet obstacle est à la fois lié à la structure du marché du travail québécois, qui est différent d’ailleurs, et à l’épineuse question de la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences acquis à l’étranger.

Parallèlement, certains domaines de compétences semblent plus ouverts aux immigrants qualifiés que d’autres. Tel que mentionné précédemment, les emplois qui requièrent des compétences culturelles et communicationnelles (soft skills) sont plus difficiles d’accès pour les immigrants, ce qu’ils semblent généralement bien accepter et qui les entraînent parfois dans des processus d’adaptation ou de réorientation professionnelle. En effet, certains secteurs semblent plus difficiles à intégrer, tels que l’administration générale, le travail au sein d’organismes communautaires, les emplois à vocation juridique, etc.

A contrario, les professions dans le domaine agroalimentaire (dont plusieurs régions visitées accueillent des industries) semblaient plus ouvertes à la main-d’œuvre qualifiée immigrante.

« Je trouve que c’est vraiment fermé ici, le communautaire, parce qu’il faut avoir un bon réseau professionnel. S’il y a une offre, presque toutes [les offres] sont déjà données. C’est semi-officiel. (…) Il faut connaître beaucoup de personnes pour trouver un emploi ». (Yan, (Allemagne), Sherbrooke)

« Dans mon cas, j’ai fait une erreur. J’ai fait une maîtrise très générale. (…) Ok, oui, c’est bon une maîtrise en administration. Mais exactement, pas quelque chose en concret. Gestion, non. Concret, non. Pour moi, ça aurait été mieux de faire des études en marketing. Quelque chose de très, très concret pour le marché. On ne le savait pas, on arrive avec la culture de notre pays, qu’on pense qu’on peut transférer ce type de choses et ce n’est pas vrai » (Zoey, (Colombie), Sherbrooke).

« Le principal obstacle, c’est nous-mêmes »

Finalement, il est reconnu dans la littérature sur l’immigration et l’intégration qu’à l’arrivée, les processus d’établissement de recherche d’emploi peuvent représenter les premières difficultés d’intégration rencontrées par les nouveaux arrivants (Séguin et al., 2003). Les difficultés d’intégration dans ces deux importantes sphères de la vie (résidence et travail) sont dues à différents obstacles et caractéristiques intrinsèques et extrinsèques aux obstacles mentionnés précédemment, et le plus souvent, à la somme de ces difficultés.

Il demeure un obstacle auquel un participant a singulièrement fait référence en évoquant l’idée que « le principal obstacle, c’est nous-mêmes ». Son propos, auquel les interlocuteurs se sont ralliés, indique que les attentes des immigrants sont souvent très importantes à l’arrivée et les frustrations qui en découlent, nombreuses. Il suggère également que les immigrants comparent fréquemment leur situation à l’arrivée à celle du pays d’origine et que cette comparaison est source de déceptions. Les participants reconnaissent que le soutien, le support et les conseils et le fait de côtoyer ses compatriotes ne constituent pas toujours un choix approprié, tant en amont (avant de quitter le pays d’origine), qu’une fois arrivé dans le pays d’accueil.

« C’est très différent [de] faire des vacances et [de] déménager dans un autre pays. (…) Quand tu déménages – moi, personne ne m’avait dit que tu vas rencontrer ces sortes de problèmes : tu parles pas la langue, tu vas te frustrer tellement pour ci et ça, ça va être dur pour ci et ça. […] Mon seul cercle social, c’était des amis immigrants. On parlait comme maintenant, partager des expériences, et on commençait à remarquer qu’on faisait tous les mêmes erreurs, on faisait tous pareil » (Farouk, (Mexique), St-Jean-sur-Richelieu).


« Dans mon cas, c’est important de remarquer que tout dépend de nous, de la personne. Si on se fixe des objectifs, qu’il faut trouver un travail, mais il faut s’adapter avant […] C’est vraiment changer la façon de penser pour se préparer au travail » (Ugo, (Colombie), Sherbrooke).


« J’ai commencé des cours de francisation. Dans mes cours, j’ai rencontré des gens qui ont besoin d’argent mais font du travail manuel qui ne demande pas de qualification. Dans ces cas-là, les personnes parlent dans leur langue. […] Si on reste là, on ne devient pas meilleur [en français] » (Eva, (Colombie), Montréal).

Chapitre 5 « Oublie le diplôme universitaire et travaille comme technicien » : Les stratégies mobilisées par les jeunes immigrants pour intégrer le marché du travail et les expériences d’emploi

Stratégies mobilisées pour surmonter ces obstacles

Afin de surmonter les obstacles qui jonchent la route vers l’intégration d’un emploi qui leur convient, les immigrants usent de stratégies diverses. La plupart des nouveaux arrivants mobilisent d’abord les ressources qui les entourent afin de trouver un emploi : amis, connaissances et aide organisée. Les stratégies subséquentes peuvent être divisées en deux grands groupes, soit des stratégies « combatives » et « défensives ». Les premières, tel qu’observé lors des discussions avec les nouveaux arrivants, semblent plus souvent employées par des personnes plus jeunes, plus scolarisées et qualifiées et dont les responsabilités familiales semblent moins lourdes. Elles incluent la visite de différents organismes d’aide à l’emploi, la rencontre de conseillers en emploi, le déboursement des coûts liés à l’évaluation comparative du MICC, le suivi d’une formation professionnelle, technique ou universitaire ou l’établissement du ménage dans une nouvelle région. (Note : au moment des discussions, l’évaluation comparative ne faisait pas obligatoirement partie du processus de sélection des immigrants).

Les secondes stratégies semblent plutôt utilisées par des immigrants ayant possiblement d’autres personnes à leur charge, ou qui sont moins scolarisées ou un peu plus âgées. Ces nouveaux arrivants sont plus souvent portés à accepter une déqualification, la considérant comme un « mal nécessaire », et faisant ultimement le choix de conserver cet emploi, faute d’énergie ou de temps pour trouver autre chose. Notons d’emblée qu’il s’agit là de typologies, puisque tous les nouveaux arrivants ne correspondent pas nécessairement à l’un ou l’autre de ces types.

Ce chapitre vise à la fois à rendre compte des diverses stratégies dont les participants à l’étude ont fait usage, et à approfondir les résultats de l’étude quantitative menée par Nolet (2012). En effet, cette dernière recherche démontrait que pour les jeunes immigrants, les réseaux personnels sont plus souvent vus comme la ressource la plus utile que chez les non-immigrants. Pour ce qui est des besoins, les résultats permettent de constater que les immigrants expriment davantage un besoin d’aide pour des ressources reliées à l’information, alors que les non-immigrants recherchaient de l’aide de l’ordre motivationnel. De plus, la réinterprétation des résultats de la recherche de Nolet (2012) permet d’affirmer que la perception de l’aide reçue dans les organismes offrant de l’aide en employabilité tend à être plus négative chez le groupe des immigrants que chez les non-immigrants. L’interprétation des données qualitatives présentée ci- dessous propose d’examiner en plus de détails les raisons pour lesquelles les immigrants semblent être relativement moins satisfaits de l’aide reçue lors de leurs visites dans des organismes offrant de l’aide à l’emploi.

Recours à l’aide organisée ou informelle

L’aide informelle : les réseaux sociaux

Sans reprendre la section présentée précédemment, il convient de rappeler que les nouveaux arrivants ont souvent eu comme premier réflexe de mobiliser leur capital social – c’est-à-dire les liens forts et faibles qui les unissent aux personnes de leur entourage – afin de trouver un emploi qui leur convient. La majorité des participants ont reconnu l’utilité de la mobilisation du capital social dans la recherche d’emploi, soit en reconnaissant la pertinence d’avoir des amis au Québec, ou en évoquant le fait qu’ « on ne peut dépendre que de nous-mêmes ». Les « emplois cachés » ont été mentionnés à plusieurs reprises lors des discussions qui portaient sur le réseautage, puisque les participants avaient l’impression que ces derniers ne sont accessibles que par le biais de contacts. Les aspects favorables et défavorables du recours au réseau d’amis ont également été cités ; nous faisons ici état des résultats de l’usage répandu de cette stratégie. Le commentaire le plus fréquent concernant cette stratégie est la lenteur du processus pour réussir à créer son propre réseau de contacts. Il peut certes s’avérer difficile de construire un réseau social fiable, mais une fois celui-ci acquis, il peut grandement contribuer à l’intégration des immigrants dans ses diverses dimensions.

« Moi, ce qui a fait la différence pour moi, c’est de tout le temps chercher à connaître des gens. Les amis, les collègues des uns et des autres, parler à tout le monde. Et là, tu finis par trouver quelqu’un dans ton domaine ; ça adonne que tu l’aides à faire quelque chose … elle se dit : tiens, elle est valable [cette personne] là, elle finit par parler de toi et un moment donné, ça finit par déboucher quelque part.

Ce qui est difficile, c’est que c’est long » (Laura, (France), Sorel-Tracy).

« Si tu restes à la maison et que tu n’as pas d’amis, tu ne peux pas vraiment trouver un bon emploi … Moi j’ai eu de bons emplois mais c’était mal payé. J’ai commencé comme plongeur. Ça m’a appris beaucoup de choses. Au début, j’avais des idées de retourner dans mon pays car c’était vraiment difficile. Avec le temps et avec les amitiés que j’ai développées avec des gens d’ici, ça commence à aller bien » (Edward, (Roumanie), Montréal).

L’aide organisée les CLE et les organismes communautaires

De nombreux participants aux discussions ont fréquenté les CLE de leurs régions respectives et en ont relaté des expériences de diverses natures. En effet, il semblerait en premier lieu que les CLE ne soient pas les organismes les mieux outillés pour répondre aux besoins particuliers des jeunes nouveaux arrivants. Les opinions étaient plutôt mitigées quant à la nature des conseils reçus et des modes de fonctionnement constatés lors de leurs visites en ces différents lieux.

« La critique principale c’est que les règles [ne] sont pas claires […] Mais le trou qu’il y a dans le système de règles mais ça dépend beaucoup [de l’agent] avec qui on tombe et qu’on a pas le choix [d’accepter] […] On entend pas la même chose selon les agents, différentes solutions selon les agents. J’ai entendu des gens dire Demande tel officier car c’est lui qui donne les affaires. Pour moi, ça, c’est pas possible. C’est la différence. C’est pas subtil. Les règles sont pas claires » (Benicio, (Mexique), Québec)

« Lorsque je suis allée à Emploi-Québec, je n’ai pas aimé, pas du tout, comment j’ai été accueillie. Si tu n’es pas sur l’aide sociale, tu as accès juste à l’agent qui est de garde dans la salle […] Ils sont là-bas pas pour t’accueillir mais pour t’envoyer dans les programmes » (Marianne, (Moldavie), Longueuil).

De nombreux questionnements ont été soulevés quant à l’information spécifique que les agents en CLE possèdent et qu’ils retransmettront par la suite. Des participants exprimaient une certaine inquiétude par rapport au niveau de connaissance des agents quant au processus d’immigration, choc culturel, reconnaissances des acquis, etc. Ont-ils les bons outils pour répondre à cette clientèle spécifique ? Certaines personnes ont constaté que les personnes qui devaient les orienter lors de séances au CLE avaient parfois elles-mêmes des idées préconçues quant à la réalité des personnes immigrantes :


« Écoute dans mon esprit c’était clair : je ne peux pas travailler comme avocat, ça c’est clair, mais [je] peux faire plein d’autres choses. J’ai plein de compétences. Elle m’a dit tu peux trouver un emploi en faisant les ménages dans les maisons ou aide cuisinière » (Claudia, (Colombie), Châteauguay).


« Toutes les fois où je suis allé à Emploi-Québec, je suis ressorti avec un goût amer. (…) Ça n’encourage pas quelqu’un à aller demander leur aide. J’ai demandé la lettre PRIIME car je voulais du boulot dans mon domaine. On m’a envoyé balader. La première question qu’on m’a demandée c’est si je travaillais. J’ai dit oui mais pas dans mon domaine. Ils m’ont dit que, comme je travaillais, ils ne pouvaient rien faire pour moi (…) » (Tobbi, (Côte d’Ivoire), Longueuil).

De façon générale, les jeunes immigrants rencontrés semblaient favoriser l’aide personnalisée des organismes en employabilité, notamment ceux ayant l’habitude de recevoir et offrant des services spécifiques à une clientèle immigrante.

Organismes communautaires en employabilité

Comme mentionné précédemment, les organismes communautaires, qui servent des populations plus ou moins étendues en termes territoriaux, semblent souvent mieux équipés – ou plus adaptés – aux besoins spécifiques des personnes immigrantes en recherche d’emploi. Les jeunes rencontrés ont notamment abordé l’hypothèse d’une surcharge de travail vécue par les agents dans les CLE.


« J’ai eu le contact avec Emploi-Québec. J’étais déçu de leur façon de faire dans l’accompagnement des nouveaux arrivants. C’était un peu flou. (…) ils manquent de temps, je ne sais pas ce qui se passe au niveau d’Emploi-Québec. J’ai eu plus d’aide de la part d’un organisme non-gouvernemental que directement d’Emploi-Québec. (Edward, (Roumanie), Montréal)

Bien qu’ils ne l’aient pas formulé en ces mots, la notion de gestion interculturelle serait sans doute à ramener au premier plan dans les CLE afin que les agents soient mieux outillés dans l’accueil et la référence de cette clientèle spécifique. Cet examen de la perception des différents organismes confirme les observations de Chicha et Charest (2008), qui suggèrent que le rôle des organismes communautaires est essentiel, mais que la nature et le détail du travail est souvent méconnu des organismes gouvernementaux (dont Emploi-Québec). Ces auteurs estiment que la multiplicité d’acteurs et d’organismes communautaires fait en sorte que ceux-ci peinent parfois à s’y retrouver.

Parmi les pratiques et activités qu’offrent les organismes d’aide à l’emploi, les ateliers de groupes (notamment utilisés dans les clubs de recherche d’emploi) semblent appréciés de tous ceux qui y ont participé. Cette pratique semble comporter une dimension sociale favorisant l’intégration en emploi et une meilleure compréhension du marché du travail chez les nouveaux arrivants. L’approche en groupe semble avoir été source à la fois d’empowerment, puisque les nouveaux arrivants avaient l’opportunité de constater que leurs problèmes d’employabilité concernent aussi d’autres immigrants. Les groupes ont également autorisé un partage d’expériences et de rencontres entre les nouveaux arrivants, dans un contexte plutôt informel.


« Aussi le club de recherche d’emploi : cette expérience là-bas était très intéressante. C’est comme une façon plus agressive pour chercher l’emploi, plus directe, ça m’a aidé beaucoup parce que j’étais, au début, très gêné de parler au téléphone directement aux employeurs. Mais ça m’a donné confiance. Même si je ne réussis pas avec cette méthode, ça m’a aidé à casser la glace avec ce type d’entrevue ici, au Québec » (Josua, (Colombie), St-Jean-sur- Richelieu).


« Juste le fait d’avoir des conversations avec des gens dans le club […] et en utilisant les outils que le club m’a donné, par rapport aux conversations téléphoniques. Tu passes par la réceptionniste, ensuite c’est quelqu’un chargé du département. Tu commences à améliorer ton français. C’est un long processus, en français. Au-delà des conversations, vous êtes aussi satisfait des outils qu’ils vous ont offerts ? Oui, oui, outils services informatiques, préparation du CV, de l’entrevue. J’ai reçu beaucoup de support de la part du club de recherche d’emploi » (Yuri, (Colombie), St-Hyacinthe).

Les programmes et mesures d’aide à l’emploi

PRIIME

Les participants à cette recherche ont eu recours aux programmes d’aide à l’emploi financés par les gouvernements provincial et fédéral de façon assez importante, mais inégale selon les villes visitées. Le programme cité le plus souvent dans l’ensemble des régions est le Programme d’aide à l’intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi (PRIIME). En dépit de l’objectif fondamental de ce programme, qui est de fournir une aide aux immigrants et minorités visibles afin qu’ils acquièrent une première expérience de travail dans leur domaine au Québec (donc de diminuer l’importance de l’obstacle lié à l’exigence d’expérience canadienne), les personnes rencontrées ont démontré une certaine réticence à se servir du document appuyant leur admissibilité au programme à l’employeur potentiel. Deux motifs principaux soutiennent cette décision. Le premier est que les nouveaux arrivants semblent connaître les règles d’administration du programme, qui stipulent que les travailleurs immigrants n’y sont admissibles qu’une seule fois (première expérience de travail). Les personnes agissent donc par prudence en le conservant à titre de dernier recours. Ils semblent aussi craintifs de perdre leur emploi au terme de la durée de la subvention, en dépit de l’objectif même du programme, qui est de « viser l’intégration dans un emploi durable, c’est-à-dire un emploi qui présente des possibilités raisonnables de se prolonger au-delà de la durée de la subvention » (Emploi-Québec, 2012 : 12).


« Mon agent d’Emploi-Québec qui m’a proposé la lettre PRIIM, quand tu postules, tu peux l’utiliser. Je l’ai pris avec moi mais je n’ai pas eu l’intention de l’utiliser. Je comptais pas là- dessus pour trouver l’emploi. On m’avait dit c’est 6 mois, on ne peut l’avoir qu’une fois… On peut te prendre pour les 6 mois et après on peut te libérer. Je n’ai pas voulu l’utiliser » (Ernest, (Algérie), Québec).

Le second motif semble révéler une volonté des immigrants d’évaluer leur propre situation et valeur sur le marché du travail. En effet, plusieurs participants aux discussions ont évoqué le fait de disposer du document PRIIME, sans toutefois le présenter lors de l’entrevue d’emploi dans le but de connaître leur position par rapport au marché et aux autres candidats. La question se pose en effet légitimement : l’employeur m’embauche-t-il pour mes compétences ou pour la subvention salariale ?

« Bon, ils m’ont donné la lettre mais […] … j’avais commencé à faire de la recherche auprès de grosses compagnies. Donc, moi j’ai pas donné la lettre à chaque compagnie, juste de temps en temps, des petites compagnies qui me donnaient la chance de faire l’entrevue, tout ça » (Baptiste, (Mexique), St-Jean-sur-Richelieu).

« C’est à double tranchant. Parfois ça peut aider, mais parfois aussi il faut réfléchir avant de proposer parce que la personne qui te recrute, il a besoin de savoir si tu es compétent. Quand tu montres une lettre comme quoi tu es une subvention, déjà tu perds dans la négociation. Pour moi, il faut que tu prouves qu’en fait la personne est prête de te prendre. Et si ça coince au niveau du salaire, à ce moment tu peux brandir la lettre. Mais si des personnes l’ont, et l’utilisent avant le recrutement, ça peut être très dangereux » (Edwin, (Sénégal), Valleyfield).

Une troisième situation a été révélée lors des discussions mais il demeure impossible de savoir si cette pratique est fréquente puisqu’il ne semble pas y avoir de répertoire public des entreprises qui ont bénéficié de la subvention à une ou plusieurs reprises, et que le document est d’abord fourni à l’employé immigrant potentiel plutôt qu’à l’entreprise qui embauche. En effet, puisque le PRIIME subventionne une partie du salaire des personnes qui y adhèrent pour une période de temps déterminée (jusqu’à 30 semaines), un participant y ayant adhéré a constaté que l’entreprise qui l’avait embauché dans le cadre du programme l’a congédié au terme de la durée de celui-ci pour, dit-il, embaucher un autre immigrant avec la même subvention :

« (…) ils ne cherchent que les PRIIME. Ils m’ont arrêté [de travailler], ils ont aboli mon poste, et après j’ai entendu parler qu’ils vont engager un technicien (…) pour qu’il fasse l’estimation, etc. C’est presque mon travail mais c’est parce qu’il est subventionné » (Haroun, (Algérie), Québec).

Ce type de registre d’entreprises ne semble pas exister, mais Emploi-Québec posséderait un logiciel qui répertorie les entreprises ayant sollicité des subventions dans le cadre de différents programmes d’employabilité. Nous ne savons toutefois pas si un suivi rigoureux est effectué quant aux différentes demandes effectuées par les entreprises subventionnées et si toutes les données sont disponibles pour tous les agents décisionnels lorsqu’ils consultent ce logiciel.

IPOP

Le projet IPOP (Intégration en emploi de personnes formées à l’étranger référées par un ordre professionnel), qui constitue en quelque sorte une adaptation du PRIIME, vise les immigrants qualifiés, reconnus par un ordre professionnel du Québec, qui rencontrent toutefois des difficultés importantes dans l’obtention d’un premier emploi dans leur profession. Il est administré par Emploi-Québec, en collaboration avec le MICC et les ordres professionnels participants. Tout comme le PRIIME, IPOP a également contribué à l’employabilité de certains participants dans des domaines professionnels spécifiques à Québec et St-Hyacinthe, mais en somme, peu de participants ont adhéré au programme, ce qui s’explique probablement par le fait qu’une faible proportion des participants à l’ensemble des groupes de discussion y était éligible. En effet, contrairement à PRIIME, qui sélectionne de façon moins précise les candidats au programme, IPOP s’adresse aux personnes immigrantes qui sont déjà titulaires d’une autorisation légale d’exercer, référées par un ordre professionnel. Tous les ingénieurs et architectes rencontrés dans le cadre des groupes de discussion et ayant participé au IPOP ont reconnu les impacts positifs de leur participation dans l’obtention d’un emploi qualifié.

Québec pluriel

Il s’agit là d’un apport précieux pour la plupart des personnes qui ont pris part, Québec pluriel [53] leur a permis à la fois de valider certains choix professionnels tout en côtoyant un mentor reconnu dans le domaine convoité et ce, de façon très concrète :


« (…) je suis entrée dans un programme qui s’appelle Québec pluriel. Je le trouve très intéressant. C’est à côté d’un mentor que je peux participer dans une entreprise, faire observation. Demander des choses. Il me dit : tu dois changer ça. Je vais faire un réseautage pour toi. Je trouve ça plus axé sur la réalité. Je trouve ça très différent pour aller chercher des conseils, mais parfois on sort et on est découragés. Mais ça, c’est une aide très axée sur la réalité (Zoey, (Colombie), Sherbrooke).

D’autres participants ont cependant noté que le mentorat demande une adaptation très rapide de l’immigrant à l’environnement qu’il intègre et que cela peut représenter un défi important. D’autre part, il demeure déplorable que Québec pluriel ne soit offert que dans six régions administratives du Québec (Gatineau, Longueuil, Laval, Québec, Sherbrooke et Montréal) et qu’il soit accessible à si peu de personnes (Emploi-Québec, 2013), comme le démontre la faible adhésion au programme parmi les participants à la recherche.

Connexion Compétences

Le programme Connexion Compétences [54], administré dans le cadre de la Stratégie emploi jeunesse du gouvernement fédéral, a été utilisé et semblait connu par relativement peu de personnes. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que certains organismes ne l’administrent pas. Le programme a toutefois semblé très apprécié et fonctionner de façon très efficace selon ceux qui y ont participé. Toutefois, dans certains cas, certains immigrants se sont trouvés sans emploi au terme du stage. À l’instar de l’analyse que d’autres participants ont faite des effets pervers du PRIIME, une participante a également conclu que les entreprises qui reçoivent une subvention dans le cadre du programme Connexion Compétences se désintéressent de leurs stagiaires immigrants au terme de la durée de la subvention.

« C’était bien, ça m’a quand même aidé. Le stage, c’était un peu d’informatique, aider les gens à connaître l’ordinateur, plein de programmes, on a même fait des stages, comment faire des CV, faire des appels aux employeurs, des petites activités, des projets » (Nestor, (Roumanie), Granby).

« Connexion Compétences… j’y ai été, l’année passée… J’ai fini en février. Ça, c’était une bonne chose. C’est seulement qu’après avoir fini, il n’y a pas de suivi. On fait des stages, on commence à voir un peu le milieu du travail mais, après, on ne sait pas quoi faire » (Juliana, (Colombie), Laurentides).


« C’est juste des belles paroles. On te dit de revenir après le programme, qu’ils auront quelque chose pour toi… J’ai travaillé à l’entreprise Y, à l’hôpital, c’était la même chose. « On t’a aimé Gaétane, on te recontacte. » Ce sont des belles paroles. (Alors vous avez fait des stages en entreprise ?) Oui. À la base ces stages doivent te donner du travail concret mais, en fait, on s’est retrouvé avec des entreprises qui ne voulaient des gens que pour la subvention » (Gaétane, (France), Lanaudière).

Les projets de préparation à l’emploi (PPE) et les services d’aide à l’emploi (SAE)

De façon générale, les jeunes rencontrés se souvenaient difficilement du nom des programmes et mesures auxquels ils avaient adhéré. Il semble donc possible que nombre d’entre eux participaient à un PPE ou à un SAE, mais n’étaient pas en mesure de le communiquer dans le cadre des groupes de discussion. Toutefois, pour les jeunes provenant d’entreprises d’insertion, il était possible d’identifier rapidement que le jeune participait à un PPE s’il avait été référé par une entreprise d’insertion. En effet, les entreprises d’insertion ont appuyé plusieurs participants rencontrés dans le cadre des groupes de discussion dans leur processus d’intégration et ce, dans un grand nombre de régions. Elles ont été d’un soutien particulier aux jeunes immigrants peu scolarisés ainsi qu’à ceux éprouvant des difficultés avec la langue et la culture. Les participants aux entreprises d’insertion semblaient, en général, positionnés plus en marge du marché du travail. Si l’un d’entre eux avait trouvé un emploi dans un domaine connexe à celui qu’il pratiquait dans l’entreprise d’insertion, d’autres nécessitaient davantage d’expérience et d’intégration à la société afin de leur permettre d’obtenir un emploi. Les entreprises d’insertion semblent donc avoir représenté davantage qu’un simple coup de pouce vers l’entrée sur le marché du travail « traditionnel » : elles ont souvent participé à l’intégration sociale et à la compréhension de la culture québécoise, qui pour certaines personnes, diffère beaucoup de la leur.

« Ah oui, [l’entreprise d’insertion] m’aide à apprendre comment travailler, comment trouver du travail, où on doit aller pour ci et ça » (Martin, (Bouthan), Laurentides).

Certains jeunes référés par les CJE étaient également des participants à la mesure Jeunes en action (PPE). En effet, cette mesure, s’adressant aux jeunes âgés de 18 à 24 ans dans l’objectif de leur donner la possibilité de développer leur plein potentiel, a été utilisée par au moins quatre participants de quatre régions différentes. Elle vise notamment à répondre aux besoins des jeunes qui éprouvent des difficultés qui freinent leur intégration au marché du travail, en offrant « à la fois une intervention adaptée à la réalité de chacun et un accompagnement soutenu [55] ». La plupart des personnes ayant adhéré à cette mesure semblaient effectivement assez éloignées du marché du travail ; elles étaient plutôt à l’étape de mise en mouvement qu’à celle d’une insertion en emploi. Une seule personne rencontrée n’en était pas si éloignée et a permis, par ses propos, de valider le fait que la mesure est bien adaptée pour une clientèle qui se situe plus en marge du marché du travail.

Les entreprises d’entraînement

Les entreprises d’entraînement visent à permettre aux immigrants de se trouver dans une situation d’immersion dans un domaine d’emploi spécifique et ont fait l’objet de commentaires positifs. S’ils ne favorisent pas l’employabilité de façon aussi directe que peuvent le faire les PRIIME et Connexion compétences, ils permettent certainement aux immigrants d’inscrire une expérience canadienne à leur curriculum vitae.


« L’entreprise d’entraînement a aidée, m’a donné mon expérience québécoise » (Zeineb, (Madagascar), Sherbrooke)

Recours à des agences de placement

Bien que n’ayons pas abordé le sujet volontairement, les participants ont discuté de l’apport des agences de placement dans leur recherche d’emploi. Dans certaines régions, les agences ont plutôt mauvaise presse, alors que dans d’autres, elles semblent avoir contribué à trouver un emploi « alimentaire ». Il convient surtout de mentionner l’inadaptation de l’offre de services des agences de placement vis-à-vis des besoins des jeunes issus de l’immigration et l’importance, pour ces dernières, de référer les jeunes aux organismes en employabilité spécialisés pour les clientèles immigrantes.

« Les agences ne m’ont pas tellement aidées. Ils ne m’ont pas appelé. C’est comme s’ils avaient jeté mon CV, ils m’ont dit de le renvoyer. Je disais à mes amis Africains (…) Quand je n’avais pas de travail, je passais par les agences mais aucune ne m’a aidée. » (Bobby, (Rwanda), Granby)

L’apport de Place aux jeunes en région dans la régionalisation de l’immigration

Place aux jeunes en région [56], un organisme soutenu par le gouvernement du Québec et administré par ses partenaires promoteurs, vise à favoriser la migration, l’établissement et le maintien des diplômés et futurs diplômés de 18 à 35 ans en région. Bien que l’initiative semblât peu connue des jeunes que nous avons rencontrés, quelques-uns se sont toutefois dits satisfaits des visites migratoires visant à bien faire connaître une région et ses ressources aux personnes qui voudraient s’y établir.

Initiatives régionales
Forum-2020

Forum-2020 est un consortium formé de la Ville de St-Hyacinthe, de la MRC des Maskoutains, de la Chambre de commerce et de l’industrie Les Maskoutains, de la Commission scolaire de Saint-Hyacinthe, du Centre de Santé et des Services sociaux Richelieu-Yamaska, du Centre local de développement Les Maskoutains, du CEGEP de St-Hyacinthe et depuis 2010, le consortium s’est élargi en incluant Emploi-Québec, le club de recherche d’emploi de Saint-Hyacinthe ainsi que la Maison de la famille des Maskoutains. La mission de Forum-2020 vise à « dynamiser le développement démographique dans la MRC des Maskoutains au moyen de l’immigration » [57].

Plusieurs participants au groupe de discussion ont fait valoir la pertinence des déjeuners d’affaires, et le club de recherche d’emploi ainsi que les résultats obtenus dans leur recherche d’emploi et dans le développement de leurs capacités. Également, les ressources semblaient particulièrement intégrées et les rôles de chacun des organismes, clairement définis afin d’éviter les dédoublements.

Le Carrefour Blé : un organisme montréalais ayant un impact sur la régionalisation de l’immigration

Tel que mentionné précédemment, le Carrefour Blé se révèle très pertinent pour les nouveaux arrivants qui souhaitent poursuivre leur carrière dans le domaine de l’agroalimentaire. Des participants à plusieurs groupes de différentes régions – Valleyfield, Sherbrooke, St-Hyacinthe – ont indiqué que cette formation avait réellement eu un impact sur leur obtention d’un emploi.

Le retour aux études

Les participants qui en avaient la chance – et le courage – ont souvent pris la décision d’effectuer un retour aux études afin de valider ou de compléter les connaissances acquises à l’étranger, ou de recommencer à neuf dans un nouveau domaine. La décision de retourner sur les bancs d’école était dans la grande majorité des cas liée aux perspectives d’emploi découlant de la formation potentiellement acquise. Nous pouvons diviser les jeunes immigrants qui ont fait une formation en deux grands types : ceux qui ont suivi une formation complémentaire– généralement d’une plus courte durée, et parfois liée au domaine de compétences antérieur, et ceux qui ont fait le choix de changer de domaine, jugeant que leurs compétences antérieures seraient trop difficilement reconnues, tant dans la sphère académique que sur le marché du travail.

Mais d’abord, certains jeunes se sont tournés vers les services d’orientation scolaire accessibles aux nouveaux arrivants offerts dans les CLE, afin d’obtenir des informations pertinentes sur les possibilités qui s’offrent à eux. Les plus incertains, et souvent les plus jeunes, ont parfois déploré le type de conseil qui leur a été prodigué :

« Lorsque je me suis inscrite, ils m’ont dit : « de toute façon tu as déjà un secondaire 4, tu ne referas pas ton secondaire, tu vas aller directement en formation […] ». Lorsque j’ai demandé de l’aide au gouvernement pour faire des études, on m’a tout de suite poussée vers une formation [professionnelle] sans jamais tenir compte de mes compétences. Étant donné que j’étais jeune, on m’a poussé tout de suite vers un travail assez basic. Emploi-Québec ne m’avait pas donné la chance d’aller au-delà de mes compétences réelles. On m’a limitée dans mes études donc je me suis retrouvée avec un DEP pour me rendre compte, à 22 ans, que je pouvais faire plus. Et là, maintenant, je suis obligée de retourner en arrière » (Fanni, (Portugal), Montréal).

En effet, certains jeunes immigrants qui ont consulté un conseiller en orientation alors qu’ils n’avaient pas terminé leur formation secondaire, ont regretté le fait de ne pas avoir été encouragés à terminer cette formation assez fondamentale. Il semblerait effectivement que lorsqu’il est question d’insertion en emploi chez les immigrants, et plus largement, chez les jeunes éloignés du marché du travail, la ligne directrice est celle du chemin le plus court vers l’emploi afin de favoriser la mise en mouvement des jeunes.

Or pour compléter certaines formations professionnelles, comme certains diplômes d’études professionnelles (DEP) par exemple, le diplôme d’études secondaires (DES) n’est pas requis. Il est également fréquent que les jeunes changent d’idée face au parcours professionnel qu’ils ont envie de suivre. Il est également reconnu qu’au Québec, parmi les jeunes qui n’ont pas connu d’interruption dans leurs études au cours des trois années précédant leur inscription en formation professionnelle, 15 % n’ont pas de DES et 17 % viennent de la formation aux adultes dont seulement 26 % ont obtenu un DES.

Une formation complémentaire
Les formations complémentaires ont généralement été suivies par des personnes dont la formation antérieure n’était pas reconnue sur le marché du travail ou dans les institutions d’enseignement (collégial ou supérieur) au Québec. Elles représentent le choix de la majorité des personnes ayant effectué un retour aux études. Pour plusieurs, c’est l’occasion de voir s’ouvrir de nombreuses portes sur le marché du travail. Les formations les plus fréquemment mentionnées sont les certificats (université), techniques (CEGEP), et DEP (formation professionnelle). Elles ont souvent permis aux participants d’obtenir une formation de niveau inférieur par rapport à celles qui étaient acquises dans le pays d’origine, dans un domaine de compétences connu.


« Je suis ingénieur en électronique. Certains logiciels en électronique qu’il faut maîtriser alors ce n’est pas difficile à trouver, j’ai pensé faire une autre formation : AEC en informatique. (…) Le marché du travail en informatique est bon, et j’ai déjà plus de connaissances » (Amir, (Syrie), Québec).

« Pour moi, je pense que c’est vraiment important de faire une formation. Je vais étudier, faire un certificat aux HEC parce que toutes les formations ressemblent beaucoup à ce que j’ai étudié dans mon pays mais, pour les postes dans l’administration et la comptabilité, j’ai besoin d’études d’ici….c’est plus facile de continuer les études car je connais déjà l’information » (Eva, (Colombie), Montréal).

Une formation supplémentaire ou changer de secteur

Les formations supplémentaires ont été plus souvent suivies par des participants dont les responsabilités familiales ou autres sont moindres. Changer de domaine représente souvent un investissement plus important en temps, en plus de ne pas totalement connaître le milieu de travail où la formation conduira. Cette formation constitue également une façon de pallier à la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences acquis à l’étranger. Chez ces participants – avocats, gestionnaires… – cette solution semblait représenter le choix le plus judicieux en vue d’obtenir un emploi qualifié.

« En arrivant ici, oui je savais que ce domaine (ancien domaine de compétences) n’est pas très en croissance mais plutôt en descente mais il y avait quand même des emplois, j’ai quand même réussi mais c’était pas motivant car il n’y a pas de perspective. Le marché du travail est différent que dans le pays d’où on vient. Les conditions sont différentes […] Alors moi, j’ai changé complètement de domaine. C’est un domaine également très ouvert. Oui, je suis revenu à l’école, ça fait juste deux mois que j’ai fini mon cours. Maintenant, présentement, je fais mon stage. J’ai fait un DEP » (Garry, (Moldavie), Québec)

Plusieurs jeunes immigrants étudiant à l’Université de Sherbrooke ont suivi un cheminement aux études supérieures : les différentes maîtrises et doctorats en génie, administration des affaires et travail social représentent l’exception dans les 18 groupes de discussion organisés cet été. Notons cependant que ces personnes sont généralement arrivées au Québec pour étudier et que les études supérieures ne représentent pas pour elles une stratégie pour surmonter les difficultés d’employabilité, mais bien souvent un projet préparé avant l’immigration.

L’évaluation comparative du MICC

Bien que faisant l’objet d’incompréhensions chez certains employeurs, les participants ont évoqué l’importance de défrayer les coûts (109$) de l’évaluation comparative des diplômes et titres de compétences par le MICC. Il s’agit là encore d’un effort financier à faire et duquel ne résulte pas d’ « expérience canadienne » dans le domaine d’expertise évalué. Ceux qui n’obtiennent pas le diplôme équivalent qu’ils souhaitaient obtenir peuvent faire le choix de suivre une formation. C’est le cas de quelques participants, qui ont généralement opté pour une formation technique. Un seul participant, dont le capital social est très important, a choisi de s’inscrire à une formation universitaire à distance, ce qui lui permettra de conserver son emploi tout en poursuivant ses études. Certains participants ont mentionné qu’ils avaient pensé, lors des difficiles débuts de leur vie au Québec, à quitter la région et à s’installer ailleurs. Une seule participante a affirmé qu’elle allait maintenir le projet si sa situation d’emploi ne changeait pas à court terme.

Dans tous les cas, les participants ont fait valoir l’utilité – mais pas nécessairement leur satisfaction – du processus de demande d’équivalence ou d’évaluation comparative des diplômes et titres de compétences obtenus à l’étranger :

« (…) aussi, moi j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de monde font l’erreur de ne pas demander l’équivalence des diplômes, l’évaluation comparative. Ça c’est une erreur monumentale. Ça vaut la peine de le faire. Même avec un DEC, on peut faire un très bon salaire » (Pedro, 30 ans, St-Jean-sur-Richelieu).

« Quand le MICC te donne ton évaluation, c’est un peu comme une étude administrative. Le MICC peut te reconnaître un certificat par exemple mais, lorsque tu vas aller faire l’étude au niveau de l’université, la faculté peut te créditer d’autres cours. (…) Ils m’ont demandé d’attendre la décision de l’ordre. Je saurai à ce moment-là le nombre d’années que ça va me prendre » (Horace, (Cameroun), Longueuil – RMR de Montréal).

Dissimuler la condition immigrante

Certains participants ont développé des stratégies qui visent à dissimuler leur condition d’immigrants. Le plus souvent cette stratégie prenait la forme d’une fausse représentation de soi préalablement à la rencontre de l’employeur potentiel.

Certains participants ont changé leur nom sur leur CV, ou même mentionné un autre nom lors de leur inscription aux services d’aide à l’emploi. Si très peu d’entre eux se représentaient cette stratégie comme une façon de vaincre la discrimination envers les immigrants, la plupart ont reconnu qu’il s’agissait d’une méthode qui faciliterait le travail des recruteurs incapables de prononcer leurs noms. Pour la plupart des participants qui ont usé de cette stratégie, la modification du nom constitue une manière d’égaliser leurs chances lorsque l’employeur doit déterminer les candidatures choisies à partir du CV. Cette pratique confirme les prémisses d’Oreopoulos (2009) et Bastien et Bélanger (2010), qui soutiennent que les employeurs ont tendance à écarter les curriculum vitae où le nom du candidat a une consonance étrangère.

« Quand j’ai commencé à être en recherche d’emploi, une personne m’a dit : vous devriez mettre votre [deuxième] prénom Marianne parce que ça va être comme une porte d’entrée pour vous. Je l’ai utilisé car je voulais un emploi. Et une fois que moi, je suis engagée, j’ai dit à mon employeur : moi je veux qu’on m’appelle Zeineb » (Zeineb, (Madagascar), Sherbrooke)

« Moi seulement mon nom Garry, ça se prononce Garry mais ça s’écrit pas Garry. J’ai eu ce problème-là, j’ai eu quasiment deux mois que j’ai cherché une offre de stage avec possibilité d’emplois. J’avais pas d’appels. Absolument rien (…) Le CV, c’est ton histoire, de ta formation, de ton expérience mais c’est pas un document officiel. Au moment où tu arrives à l’entrevue, si tu passes l’entrevue, tu dis, mon vrai nom c’est celui-là, je l’ai pas marqué tout simplement parce que … c’est dur à prononcer. C’est juste ça. Moi, ce que j’ai fait dans mon cas, j’ai envoyé des CV avec le nom corrigé, et j’ai eu mon entrevue » (Garry, (Moldavie), Québec).

En général, les jeunes rencontrés perçoivent que cette discrimination par le nom ne représente pas une forme de racisme, mais plutôt une forme de simplification de la tâche des recruteurs qui se trouvent devant un choix de curriculum vitae. Ils ont exprimé une certaine empathie pour les recruteurs qui doivent tenter de prononcer les noms des candidats étrangers lorsqu’ils communiquent avec eux :

En fait, il faut comprendre le point de vue de l’employeur, de la personne des Ressources humaines… Moi c’est ça que je regarde. Il tombe sur ton CV, il n’est pas raciste, il n’est pas méchant, il a peur de t’appeler. Allo bonjour monsieur euh.. hum euh… Il va mettre ça de côté parce qu’il y a encore 10, 20 CV qui sont faciles à prononcer. À mon avis c’est plutôt ça. C’est pour lui faciliter la vie. Moi, personnellement, j’ai un ami qui travaille aux RH. C’est lui qui a dit : Je ne sais pas comment appeler cette personne là, je ne sais pas comment l’appeler. (Garry, (Moldavie), Québec).

La déqualification

La stratégie « défensive » la plus souvent évoquée lors des discussions est l’acceptation d’une déqualification. Souvent, il s’agit d’abord d’une façon, pour certaines personnes, de parvenir à subvenir aux besoins de leur famille. Les raisons pour lesquelles ces nouveaux arrivants acceptent une déqualification sont variées : la formation nécessaire pour occuper un emploi correspondant à celui qui était pratiqué dans le pays d’origine serait trop longue, la pratique d’un emploi alimentaire n’a pas vraiment permis à l’immigrant d’acquérir une maîtrise suffisante de la langue, le découragement vis-à-vis de la situation domine les efforts de recherche d’emploi, etc.


« Pour les immigrants, c’est facile de trouver un emploi je pense… à Granby, c’est facile, parce qu’il y a beaucoup d’usines. Pas les professeurs, les docteurs… ils se retrouvent dans les usines comme journaliers à 10-11 $ de l’heure ». (Jeffrey, (Colombie, Granby)


« Il y a beaucoup de possibilités d’apprendre ici, si on a une expérience dans notre pays. Mais, pour moi-même, personnellement, je ne peux pas. Je dois avoir étudié en médecine ici, au collège ou à l’université (…) Quand j’ai fini ma francisation (…) après quelques semaines, j’ai trouvé un travail dans un domaine où je n’avais pas d’expérience, dans le service à la clientèle. Ils m’ont embauchée » (Nima, (Afghanistan), Laval).

Recommandations des participants

À la fin de chaque discussion, les participants étaient invités à formuler des recommandations quant à l’offre de services actuelle en employabilité. Ces recommandations étaient souvent orientées vers l’organisation de l’information disponible pour les personnes immigrantes, ce qui contribue à valider les résultats de la réinterprétation des résultats de l’étude de Nolet (2012) présentée au chapitre 2. Il ne s’agit pas là d’un manque d’information, mais plutôt d’une réflexion sur le mode de diffusion et d’organisation de l’information concernant les programmes, les sources d’information, les ressources disponibles et les différents lieux où se diriger pour les obtenir. Il semble qu’au moment où les participants se trouvent au bon endroit, les ressources nécessaires soient généralement mobilisées assez rapidement et efficacement. C’est donc l’orientation vers cet endroit, puis l’information qui l’y conduira qu’il faudrait considérer.

Le parcours scolaire et la formation professionnelle

Comme nous l’avons mentionné précédemment, certains participants ont déploré le fait de devoir recommencer leur formation universitaire en entier, faute de reconnaissance des universités. Il semble résider une contradiction au niveau des discours, qui conduit à une compréhension erronée des immigrants de leur propre situation : étant admis comme travailleurs qualifiés sur la base de leurs compétences acquises à l’étranger, le fait de voir leur formation et leur expérience non-reconnues en laisse plus d’un perplexes. Ainsi pour les diverses raisons mentionnées aux chapitres 5 et 6, de nombreux immigrants sélectionnés à titre de travailleurs qualifiés accepteront une déqualification et occuperont des emplois non-qualifiés dans leur région d’accueil. Certains participants auraient été prêts à suivre une formation d’appoint – si elle avait existé – dans le but de poursuivre la carrière qu’ils menaient dans leur pays d’origine :

« (…) Tu as un diplôme, tu as déjà fait des études, donne-lui la chance de ne pas aller encore 3-4 ans à l’Université. Qu’ils fassent quelque chose. Une école de 6 mois [pour] transition » (Nestor, (Roumanie), Granby).

« J’ai une place dans un CEGEP pour la session d’automne. J’ai payé et tout mais c’est un peu décourageant. Pour le moment, dans les CEGEP, ils me disent que je dois faire trois ans d’études alors que l’ordre des hygiénistes dentaires me dit qu’il me manque seulement 450 heures de formation pour me délivrer un permis » (Marisa, (Venezuela), Terrebonne – RMR de Montréal).

Cette idée, qui a fait l’objet de plusieurs recommandations de la part d’immigrants qualifiés, pourrait constituer une solution gagnante pour toutes les parties. D’une part, les universités pourraient recevoir davantage d’inscriptions de la part d’immigrants qualifiés qu’elles ne le font actuellement. Effectivement, beaucoup d’immigrants choisissent de ne pas reprendre le processus académique complet et poursuivent plutôt un cheminement court (DEP, AEC). Une formation d’appoint attirerait peut-être davantage d’immigrants qualifiés que ne le font les actuellement les formations universitaires complètes qui en rebutent plus d’un. D’autre part, les immigrants qualifiés, sélectionnés pour leurs compétences, auraient l’opportunité de poursuivre une carrière qu’ils avaient amorcée dans leur pays d’origine.

Parallèlement, certains participants à la recherche ont suggéré que le fait de suivre une formation spécialisée à l’étranger avant d’immigrer constituait une perte de temps. Selon plusieurs d’entre eux, les études de niveau supérieur (la formation technique pour certains, le baccalauréat pour d’autres) seraient souvent sans valeur à l’arrivée et devraient donc être poursuivies dans le pays d’accueil :


« Ce que je dis à mes amis qui veulent immigrer au Canada, n’allez pas plus loin que la licence. Parce que ça frustre. C’est mieux de faire ici. C’est frustrant qu’on a un master ou un doctorat. Par exemple, quand je fais mes recherches de travail, je ne mets pas plus que ça [un diplôme de moindre niveau], même si je l’ai. Ça ne vaut pas le coup d’étudier au-delà de la licence » (Irène, (Cameroun), Valleyfield).
Les services et programmes d’employabilité

Selon quelques-uns des jeunes immigrants rencontrés, certains programmes d’employabilité, le PRIIME notamment, devraient faire l’objet d’une plus grande promotion auprès des employeurs. Plusieurs participants ont rencontré des employeurs qui ne connaissent pas l’existence du programme, ce qui, selon eux, a réduit leurs possibilités d’embauche. Ils soutiennent d’ailleurs qu’une meilleure promotion du programme participerait à améliorer leurs chances d’obtenir un emploi plus rapidement.

Certains participants, particulièrement les plus qualifiés, croient qu’une meilleure offre de stages – rémunérés ou non – leur accorderait de meilleures chances sur le marché du travail à court terme. Selon eux, le manque d’opportunités au niveau des stages se traduit par un allongement du processus de recherche d’emploi, le stage permettant d’acquérir une expérience canadienne pertinente.

« Je pense qu’il faudrait offrir des stages aux immigrants qui connaissent… qui sont des professionnels dans le domaine. Après un certain temps, on pourrait leur permettre de continuer dans leur domaine. (…) J’aimerais juste qu’il y ait plus de stages pour les immigrants, payés ou non. Ça vous donne une expérience canadienne de faire un stage ici » (André, (Iran), Québec).

« J’aurais aimé qu’on me propose des compagnies où faire des stages. J’aurais aimé me faire de l’expérience en entreprise, mais on m’a dit d’aller faire la certification au collège Lasalle pour pouvoir me trouver un stage par la suite. Je pense que les organismes sont les mieux placés pour trouver des stages pour les immigrants. On y travaille six ou huit mois et ils voient qu’on travaille bien. Le stage est important ». (Pablo, (Suède), Montréal).

Les centres locaux d’emploi ont aussi fait l’objet de recommandations des participants. En effet, ils ont évoqué l’inégalité dans les services reçus d’un CLE à l’autre et d’un agent à l’autre. Ils ont mentionné, entre autres choses, l’importance pour les agents d’être davantage sensibilisés à la réalité et au processus d’intégration des immigrants qu’ils rencontrent.


« (…) Je crois qu’il y a un travail de sensibilisation à faire de la part du gouvernement au niveau d’Emploi-Québec. (Sensibilisation à quoi ?) Dans le sens de s’en tenir à leur feuille de route. Parce que si on est Emploi-Québec, la mission c’est d’aider les gens qui viennent, qui ont quitté leur pays et leur culture » (Tobbi, (Côte d’Ivoire), Longueuil)

« On arrive aveugle, on ne connaît rien, parfois on a un manque d’information, parfois on reçoit la mauvaise information. Des fois, il y a des gens qui nous disent des choses (…) et c’était pas vrai » (Jeffrey, (Colombie), Granby).

En ce qui a trait aux employeurs, les participants de tous les groupes ont indiqué que les employeurs n’étaient pas, non plus, suffisamment sensibilisés à la réalité des immigrants, et surtout à la valeur de leurs compétences. Ils jugent qu’en tant qu’immigrants, ils doivent souvent redoubler d’efforts pour prouver leurs compétences par rapport à une personne non-immigrante. Plusieurs participants suggèrent donc d’instaurer des mesures de sensibilisation des employeurs des régions à la réalité des immigrants et à la reconnaissance de leurs compétences.

Les services et mesures d’intégration socio-économiques

En ce qui a trait aux services et mesures d’intégration socio-économiques, la plupart des recommandations ont trait à la formation linguistique. D’un côté, certains participants allophones jugent que les cours de francisation ne sont pas assez complets ni suffisants pour obtenir un emploi convenable et correspondant aux qualifications des immigrants :

« Le niveau n’est pas suffisant pour trouver un travail. Tu finis la francisation et c’est tout, tu n’as pas le niveau pour trouver un travail dans ton domaine » (Eva, (Colombie), Montréal).

D’un autre côté, tel qu’énoncé précédemment, l’exigence d’une connaissance de la langue anglaise représente souvent un obstacle à l’employabilité des nouveaux arrivants, particulièrement dans les régions situées dans la RMR de Montréal et à Sherbrooke. Pour plusieurs d’entre eux, la connaissance de l’anglais est une porte d’entrée importante qui mène vers un emploi qui leur convient et qui correspond à leurs compétences et intérêts. À cet égard, plusieurs participants ont recommandé que l’enseignement de l’anglais soit offert gratuitement aux immigrants au même titre que l’est l’enseignement du français.

La vision de l’immigration
Nous avons évoqué plus tôt la perception d’inadéquation entre le discours du gouvernement sur la catégorie d’immigration économique des « immigrants qualifiés » et la non-reconnaissance des diplômes et titres de compétences par les différentes instances scolaires et professionnelles.

« Il faudrait que [le ministère de] l’immigration soit en collaboration avec les différentes sociétés ici, avec le marché de l’emploi d’ici. Le gouvernement reconnaît les diplômes et l’expérience mais pas le marché de l’emploi et les universités » (Anne, (Burkina Faso), Montréal).

Certains participants ont partagé leurs perceptions quant aux objectifs que poursuivent les instances de l’immigration canadienne en ce qui a trait à l’employabilité des nouveaux arrivants. Il s’agit là d’impressions et de perceptions issues d’expériences vécues lors des processus de migration et de recherche d’emploi. Notamment, une jeune mère de famille suggère que les politiques de gouvernance de l’immigration n’ont pas nécessairement pour conséquence de favoriser l’employabilité des nouveaux arrivants eux-mêmes. Selon la participante, elles seraient plutôt axées sur les perspectives d’avenir que les nouveaux arrivants représentent en tant que parents :

« (…) on a l’impression que le Québec recherche des immigrants avec une bonne job pour les enfants. Parce que, plus tard, ils vont insister pour que leurs enfants aillent à l’université, pour avoir une bonne formation » (Svetlana, (Russie), Longueuil – RMR de Montréal).

Quels conseils pour un jeune immigrant comme vous ?

Les participants font souvent référence à la nécessité de faire preuve de patience, de persévérance et d’humilité. En général, ils ont appris de leur expérience que le retour au bas de l’échelle n’est pas un échec mais la représentation du début d’une nouvelle vie.

Les plus jeunes ont généralement recommandé de miser sur la valeur de l’éducation : « va faire n’importe quoi que tu aimes, même une petite formation est bonne ». Même si la majorité reconnaît l’importance accordée au diplôme canadien sur le marché du travail, notons que les conseils sur la formation ne font pas l’unanimité parmi les participants. Si les jeunes reconnaissent la valeur de l’éducation, cela semble souvent être en raison de leur âge et du peu de responsabilités qui leur étaient incombées lors de la migration. Pour d’autres participants, la formation ne représente pas un gage d’employabilité et nécessite un investissement risqué.

Se succèdent également les conseils sur l’apprentissage rapide de la langue française, « parce que la communication, c’est très important ». Plusieurs ont également recommandé au jeune nouvel arrivant de s’intéresser à la langue anglaise, une fois la langue française maîtrisée.

L’importance du développement d’un réseau social fait également l’objet de nombreux conseils à un jeune immigrant. Ce réseau, pour beaucoup de participants, devrait être composé à la fois de personnes non-immigrantes qui contribuent à l’intégration sociale et à une meilleure compréhension de la réalité culturelle québécoise, mais aussi d’autres immigrants, qui peuvent raconter leur parcours afin de savoir que les obstacles rencontrés se révèlent assez communs mais surtout, surmontables. Les réseaux se construisent, selon les conseils des participants, par le biais d’activités de bénévolat, de stages et de la vie sociale.

Finalement, la recommandation de fréquenter des organismes communautaires semble faire l’unanimité chez les participants. Bien que la méthode d’échantillonnage de cette étude fasse en sorte que la majorité des participants y ont eu recours, il semble que leur aide ait été appréciée dans la très grande majorité des cas, et qu’elle ait fortement contribué à l’obtention d’un emploi pour plusieurs d’entre eux.

Conclusion

À titre de conclusion, nous revenons sur les résultats principaux du travail, ainsi que sur la contribution qu’il a eu sur le plan scientifique. Nous mettons d’abord l’emphase sur la conformité des résultats avec ceux qu’ont obtenus les auteurs de recherches portant sur des sujets similaires, puis faisons un retour sur la possibilité de généraliser les résultats à d’autres réalités. Nous indiquons par la suite la contribution que ce travail apporte aux connaissances sur le sujet, puis la façon dont il participe, des points de vue méthodologique et conceptuel, à l’étude de l’insertion en emploi des jeunes immigrants. Finalement, nous effectuons quelques suggestions quant à l’approfondissement de la recherche dans ce secteur.

Principaux résultats

En ce qui a trait à l’accès à l’information sur le marché du travail, les résultats de cette étude démontrent que les ressources d’information sont nombreuses mais que leur organisation peut parfois mener à une certaine confusion chez les jeunes immigrants. Certaines d’entre elles sont accessibles à divers endroits – ou organismes d’aide à l’emploi – alors que d’autres sont réparties en divers lieux. Les nouveaux arrivants en déduisent qu’il leur faut visiter plus d’un organisme de la même région afin d’obtenir toute l’information nécessaire.

Ainsi, un mode de diffusion de l’information centralisé, et ce même si l’offre de services ne l’est pas, pourrait contribuer à ce que les nouveaux arrivants soient informés de façon plus rapide et efficace.

Les principaux obstacles auxquels les jeunes immigrants rencontrés dans le cadre de cette recherche ont été confrontés confirment les éléments retrouvés dans la littérature québécoise qui porte sur ce thème. La non-reconnaissance des diplômes et titres de compétence obtenus à l’étranger et le manque d’expérience canadienne constituent les deux obstacles les plus souvent cités chez les personnes qui maîtrisent la langue de travail. Certes, la maîtrise du français s’est révélée essentielle à l’obtention d’un emploi au Québec, mais l’exigence d’une connaissance de l’anglais semble gagner du terrain dans plusieurs régions visitées. Les attentes par rapport aux perspectives d’emploi dans le pays d’accueil constituent également un obstacle de taille chez les nouveaux arrivants qualifiés. Le fait de devoir se positionner différemment vis-à-vis un marché du travail dont les pratiques et les normes diffèrent de celles du pays d’origine peut entraîner un sentiment d’impuissance et de découragement devant la situation.

Toutefois, les obstacles liés à la discrimination et aux préjugés – surtout ceux qui sont liés à l’origine ethnique spécifique des immigrants – ont fait l’objet de peu de commentaires. Les préjugés perçus par les participants à cette étude ont davantage trait à la condition immigrante en elle-même et concernent souvent une inquiétude des employeurs quant aux qualifications techniques des candidats immigrants et une volonté de s’assurer que le travail soit fait selon les normes en vigueur.

Les principales stratégies mises en place par les jeunes immigrants afin de surmonter les obstacles à l’employabilité confirment également certains éléments de la littérature portant sur le thème. En effet, comme le démontraient notamment les résultats de Nolet (2012), les immigrants semblent faire bon usage de leur capital social, à la fois pour trouver un emploi dit « alimentaire » que pour obtenir un emploi exigeant des qualifications particulières. Les participants à cette étude n’ont cependant pas manqué de mentionner que les vertus du capital social comportaient une face cachée. Sans en diminuer l’importance tant pour l’intégration sociale qu’économique, ils indiquent qu’un cloisonnement des immigrants auprès de leurs communautés culturelles ou de la communauté immigrante peut freiner leur accès à l’emploi. Parallèlement, la difficulté que peut représenter la construction d’un réseau social au Québec peut aussi entraîner une insertion en emploi plus ardue.

Sur le plan de l’aide organisée, le support trouvé auprès des organismes gouvernementaux et non-gouvernementaux constitue une stratégie très fréquemment utilisée et dont les résultats semblent mitigés selon le type d’organisme fréquenté et la région.

La poursuite d’études, qui sont plus souvent de courte durée (AEC, DEP) est une stratégie qu’ont choisie plusieurs participants. Les observations comparatives des participants du marché du travail québécois par rapport à celui de leurs pays d’origine les incitent à s’orienter vers des formations plus spécialisées qui leurs semblent garantes d’un emploi qui leur convient.

En somme, même si on constate parfois une méconnaissance des programmes et mesures dans certains organismes et une certaine inégalité dans l’offre de services à la clientèle jeune et immigrante d’un organisme à l’autre, les ressources nécessaires à l’employabilité de cette clientèle particulière s’implantent dans les différentes régions de façon croissante.

Nous avons constaté la richesse et le potentiel que portent certaines initiatives régionales en employabilité. Le Forum-2020 à St-Hyacinthe, qui comporte plusieurs volets et activités (déjeuners d’affaires, clubs de recherche d’emploi) semble notamment constituer une initiative fort appréciée et prometteuse pour les nouveaux arrivants. Les organismes qui permettent à des immigrants qualifiés de perfectionner, de compléter ou d’adapter leur formation à la réalité québécoise de leur secteur d’emploi semblent également porter leurs fruits. C’est entre autres le cas du Carrefour Blé, qui accompagne les personnes immigrantes souhaitant poursuivre leur carrière dans le domaine de l’agroalimentaire, et du Programme d’intégration à l’Ordre des ingénieurs du Québec du CITIM. Finalement, les organismes communautaires qui desservent des populations immigrantes plus ou moins étendues en termes territoriaux, semblent souvent mieux équipés – ou plus adaptés – aux besoins spécifiques des personnes immigrantes en recherche d’emploi. Ces initiatives semblent très appréciées des participants rencontrés.

Les résultats de cette recherche nous incitent enfin à aborder brièvement certains éléments qui pourraient faire l’objet d’intéressantes recherches ultérieures. En ce qui concerne les obstacles à l’insertion en emploi, nous notons, après analyse des données, et certainement sans prétendre à la possibilité de généraliser la situation plus largement qu’à l’échantillon analysé, que les cas de perception de discrimination et d’expression de préjugés semblent plus courants dans la RMR de Montréal que dans les régions plus éloignées que nous avons visitées. Il demeure difficile d’interpréter cette observation – offre de main-d’œuvre plus importante à Montréal, possibilité accrue pour les employeurs de refuser des candidats, employeurs des régions mieux préparées à l’insertion professionnelle des nouveaux arrivants pour diverses raisons… Ces pistes de réflexion pourraient certainement être explorées dans des études ultérieures.

Un travail exploratoire sur la compréhension et les perceptions des immigrants de la catégorie d’immigration économique des « travailleurs qualifiés » pourrait aussi apporter davantage de connaissances qualitatives sur la façon dont les nouveaux arrivants comprennent leur situation vis-à-vis de l’immigration et du marché du travail avant et après leur migration. La terminologie utilisée dans la locution « travailleur qualifié » ainsi que le champ lexical auquel elle réfère semble être source d’importantes incompréhensions de la part de ces immigrants économiques, dont l’analyse pourrait s’avérer intéressante et porteuse.

Bien que les études sur le capital social aient fait couler beaucoup d’encre depuis plus d’une dizaine d’années, les liens entre l’intégration sociale par le biais du capital social et l’insertion en emploi pourraient certainement être complexifiés. Une dimension culturelle propre au Québec, qui se traduirait par une difficulté chez les immigrants à développer un réseau social composé de personnes non-immigrantes, semble en effet occasionner une difficulté dans l’insertion en emploi pour les personnes immigrantes. Il serait intéressant d’étudier les liens entre ces deux éléments.

Finalement, les modèles les plus prometteurs, et auxquels nous avons fait référence plus tôt dans cette conclusion (Forum 2020, AEC intégration à la société québécoise, Carrefour Blé, Programme d’intégration à l’Ordre des ingénieurs du CITIM, ONG spécialisées…) font pour la plupart déjà l’objet de mesures d’évaluation. Leur potentiel d’exportation dans d’autres régions devrait selon nous être étudié sérieusement, puisque certains environnements socioéconomiques semblables à ceux où ils sont implantés en bénéficieraient probablement beaucoup.

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Annexe I – Questionnaire de recherche (Nolet, 2012)
Annexe II – Territoire couvert par l’étude
Annexe III – Guide de discussion pour les focus groups

[1Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. 2012. Bulletin statistique sur l’immigration permanente au Québec : 4etrimestre et année 2011, p.1

[2Idem.

[3Idem.

[4Idem.

[5Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. 2012. Bulletin statistique sur l’immigration permanente au Québec : 4etrimestre et année 2011, p.2

[6Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. 2011 Bulletin statistique sur l’immigration permanente au Québec : 4etrimestre et année 2010, p.1

[7Idem.

[8Idem.

[9Idem.

[10Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Bulletin statistique sur l’immigration permanente au Québec : 4etrimestre et année 2010 ». 24 février 2011, p.8

[11Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Bulletin statistique sur l’immigration permanente au Québec : 4etrimestre et année 2011 », 7 mars 2012, p.2

[12Le taux d’activité se définit comme le pourcentage de la population active dans la population totale (15 ans et plus). Il représente les personnes en emploi ou à la recherche d’un emploi dans l’ensemble de la population.

[13Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 ». mars 2012. p.18

[14Le taux d’emploi se définit comme le pourcentage de personnes en emploi dans la population totale (15 ans et plus).

[15Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 ». mars 2012. p.18

[16Idem.

[17Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 ». mars 2012. p.5

[18Idem.

[19Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 ». mars 2012. p.40

[20Ibid, p.7

[21Idem.

[22Idem.

[23Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles. « Les immigrants et le marché du travail québécois en 2009 et 2010 ». mars 2012. p.7

[24Idem.

[25Institut de la statistique du Québec :http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/region_01/region_01_00.htm, consulté le 15 septembre 2012

[26Institut de la statistique du Québec :http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/region_01/region_01_00.htm, consulté le 15 septembre 2012

[27Institut de la statistique du Québec :http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/region_01/region_01_00.htm, consulté le 15 septembre 2012

[28Institut de la statistique du Québec :http://www.stat.gouv.qc.ca/regions/profils/region_01/region_01_00.htm, consulté le 15 septembre 2012

[29Idem.

[30Site web du Ministère de l’Immigration et des Communautés Culturelles : http://www.micc.gouv.qc.ca/fr/dossiers/defi-montreal/index.html, consulté le 15 septembre 2012

[31Idem.

[32MICC, « Des valeurs partagées, des intérêts communs : Pour assurer la pleine participation des Québécois des communautés culturelles au développement du Québec », mai 2004, 135 pages

[33Idem.

[34Idem.

[35Idem.

[36Le questionnaire fut développé en partenariat avec le Comité d’orientation de la recherche. 421 questionnaires furent récoltés grâce à 65 organismes d’aide à l’emploi situés dans 14 régions administratives du Québec. Les régions administratives du Québec participantes sont Montréal ; la Montérégie ; les Laurentides ; le Centre- du-Québec ; l’Estrie ; la Capitale-Nationale ; la Chaudière-Appalaches ; le Bas-St-Laurent ; la Mauricie ; l’Abitibi-Témiscamingue ; l’Outaouais ; Lanaudière ; la Gaspésie–Iles-de-la-Madeleine ; et le Saguenay-Lac-St-Jean (Nolet, 2012 : 17). Le questionnaire exhaustif est disponible en Annexe I.

[37Voir présentation des données. Nous avons reconstruit les catégories propres à certains items initiaux afin de répondre à nos besoins d’analyse.

[38Les représentants de cette population sont soumis à un ou plusieurs des facteurs d’éloignement suivant : Une durée cumulative d’aide égale ou supérieure à 4 ans ; Une absence prolongée du marché du travail ; Une scolarité inférieure à secondaire IV ; Un statut de chef de famille monoparentale ; Des épisodes de contraintes dues à la santé ; Des enfants à charge de moins de 5 ans ; Sortie d’un établissement de santé ou de détention (DGARES, 2004, in Nolet, 2012 : 17).

[39Nous entendons par le terme « immigrants » toute personne ayant affirmé être née à l’extérieur du Canada, mais qui y résident actuellement, sans égard à l’âge d’arrivée ou au statut de résidence.

[40Les tests U de Mann-Whitney et H de K Kruskal-Wallis sont utilisés pour comparer des sous-échantillons indépendants, respectivement K=2 ou K>2. Lorsque l’un test de corrélation est possible, nous utiliserons le Rhô de Spearman.

[41Nous avons préféré recoder l’âge des répondants afin de créer trois catégories qui correspondent à celles qui sont utilisées dans la littérature.

[42Cette question a été recodée afin que le « oui » corresponde à tous les immigrants qui affirment vivre avec leurs enfants ou les enfants de leur conjoint(e).

[43Cette question a été recodée pour les besoins de la recherche, tout comme la question Q20a a été recodée par régions aux fins de l’exercice comparatif.

[44Sans emploi (inclut les personnes qui ont eu une période sans emploi).

[45Nous avons attribué un ordre au diplôme en fonction du niveau d’études en ordre croissant : Je n’ai aucun diplôme ; D.E.S. ; D.E.P. ; D.E.C. ; Certificat universitaire ; Baccalauréat ; Maîtrise ; Doctorat. Notons que la réponse « autres » est considérée comme une variable manquante pour les besoins de ce test.

[46Pour la définition du territoire couvert par l’étude, voir annexe II.

[47Le choix des grandes régions citées est issu de la classification établie par Statistique Canada et utilisée pour définir les régions de provenance des immigrants au Canada. (http://www12.statcan.gc.ca/census- recensement/2006/ref/dict/app-ann010-fra.cfm#anh12).

[48Site web de Services Canada – programme Connexion Compétences (consulté le 15 octobre 2012) h t t p : / / w w w . s e r v i c e c a n a d a . g c . c a / fr a / d g p e / i j / p e j / n o u v p r o g / c o n n e x i o n . s h t m l

[49Site web du Ministère de l’éducation du loisir et du sport – répertoire des formations par CEGEP au Québec (consulté le 15 novembre 2012)

[50Site web du Forum-2020 (consulté le 12 octobre 2012)http://www.forum-2020.qc.ca/

[51Site web du Carrefour Blé – services aux nouveaux immigrants :http://www.carrefourble.qc.ca/fr/services- nouveaux-arrivants/agrippez-vous.shtml (consulté le 17 novembre 2012)

[52Site web du CITIM – programme d’intégration à l’ordre des ingénieurs du Québec : http://www .citim.org/siteweb/content/dipl%C3%B4m%C3%A9s-en-g%C3%A9nie-0 (consulté le 17 novembre 2012)

[53Site web du programme de mentorat Québec pluriel d’Emploi-Québec : http://emploiquebec.net/individus/immigrants-minorites/quebec-pluriel/index.asp (consulté le 20 novembre 2012

[54http://www.servicecanada.gc.ca/fra/dgpe/ij/pej/nouvprog/connexion.shtmlconsulté le 17 novembre 2012
Site web du programme Connexion Compétences – Services Canada :

[55Site web de la mesure Jeunes en action – Emploi-Québec :http://www.mess.gouv.qc.ca/solidarite- sociale/programmes-mesures/jeunes-en-action/

[56Site web de Place aux jeunes en région, Montérégie (consulté le 15 octobre 2012) http://www.placeauxjeunes.qc.ca/region-16

[57Site web du forum 2020 :
www.forum-2020.qc.ca/

Extrait

Le marché de l’emploi au Québec pose divers défis aux différents sous-groupes de la population qui tentent de s’y tailler une place à leur mesure. La conjoncture économique actuelle, les trajectoires professionnelles et personnelles et les exigences de certains secteurs du marché de l’emploi sont autant de facteurs qui influent sur l’accès à un emploi satisfaisant les attentes des candidats. Cette recherche a pour objectif de porter un regard analytique sur les processus d’insertion en emploi des jeunes immigrants de première génération. Partant d’une méthode de recherche qualitative, cette étude exploratoire vise à mieux comprendre les processus par lesquels les nouveaux arrivants s’intègrent au marché de l’emploi, les obstacles qu’ils rencontrent ainsi que les liens entre les attentes en termes d’emploi qu’ils avaient à l’arrivée et leurs conditions de travail actuelles.

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